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Par L'enfant@l'hôpital - Publié le 18 décembre 2020 - 14:37 - Mise à jour le 18 décembre 2020 - 14:38
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Inclusion, mais quel vilain mot!

Chaque mois, nous vous proposons de découvrir le billet d’humeur d’Anne Dunoyer de Segonzac, fondatrice de l’association L'enfant@l'hôpital. Anne évoque dans son billet les sujets qui lui tiennent à coeur et pose son regard personnel sur notre société. Ces sujets, en lien avec la mission de l’association, vous amèneront (nous l’espérons !), à réfléchir et surtout à réagir.

Inclusion des enfants handicapés, c’est un slogan venu d’en haut, qui offense le statut des enseignants, surtout dans cette période critique angoissante, et déstabilise des classes déjà perturbées par l’hétérogénéité des élèves et leur faible appétence pour les matières scolaires.

Enfants handicapés, ça ne veut rien dire. 88 % des handicaps sont invisibles, et chaque handicap est spécifique. Chaque enfant porteur d’un handicap plus ou moins sévère a son rythme, son endurance, ses aptitudes, ses désirs.

Rappelons qu’avec Kolibri et ses ateliers éponymes, l’association L’enfant@l’hôpital accompagne SUR MESURE, dans toute la France, des enfants et des adolescents atteints de handicaps physiques ou psychiques plus ou moins lourds.

Et mettons-nous, un petit moment, au cas par cas, dans la peau d’enfants, de parents, d’enseignants.

Ysabel Bels, grand-mère

Les AESH (Accompagnants des Elèves en Situation de Handicap), anciennement AVS (Auxiliaires de Vie Scolaire) ont besoin d’une formation exceptionnelle.

Par ailleurs, un enseignant ne peut pas accueillir dans sa classe plus d’un ou deux enfants porteurs de handicaps. Ces enseignants doivent être volontaires, et, pourquoi pas, récompensés, en tout cas, au moins, remerciés.

En cas de moqueries, de harcèlement ou de mise à l’écart de la part des autres élèves, les parents des enfants porteurs d’un handicap doivent rester présents pour veiller de près sur la situation.

La présence de ma petite-fille dans une maternelle et dans le primaire ordinaire a été un succès.

Puis, à 11 ans, elle est allée dans une UPI (Unité Pédagogique d’Intégration).

Au sein d’un collège, puis d’un lycée ordinaire, ces classes, de 10 élèves au maximum, qui accueillent les adolescents jusqu’à 16 ans, assurent un accompagnement très fin. Chaque adolescent porteur d’un handicap a son AESH

Les élèves ne suivent pas tous les cours. Les AESH les préparent aux cours.

C’est à 18 ans que les choses se sont compliquées pour elle…

 

Brune d’Ornano, enseignante

Qu’est-ce que le handicap ? Qui n’est pas handicapé ? C’est seulement si un diagnostic est posé que l’enseignant travaille en connaissance de cause.

En dix ans, j’ai accueilli dans mes classes une quinzaine d’enfants porteurs de handicaps. J’y ai toujours été obligée, sans aucune espèce de reconnaissance d’aucune sorte. Aucun retour d’expérience ne m’a été demandé. Aucune enquête, aucune évaluation n’ont été réalisées.

Après un long séjour dans un lycée catholique qui nous enjoignait d’être charitables sans nous en donner les moyens, j’enseigne maintenant dans un autre établissement privé catholique, responsable et cohérent. La communication entre les enseignants et la direction de l’école, primordiale, est bonne.

Selon les handicaps, l’outillage technique est essentiel.

Handicaps lourds perceptibles

J’ai accueilli :

- une jeune sourde profonde, appareillée, extrêmement sérieuse, sans AVS, qui surcompensait. Il fallait seulement interdire le chahut.

- une fille de 20 ans totalement aveugle, épileptique et caractérielle. Sans aucune aide informatique, et malgré son AVS, sa présence a occasionné pour moi un énorme surcroît de travail. Elle vivait seule. Il fallait envoyer très en amont les cours à l’Institut Louis Braille pour qu’ils soient traduits. Elle a eu son BTS et ne m’a jamais remerciée. Ni elle, ni personne.

- des enfants en fauteuil roulant, pour lesquels une bonne installation technique d’ensemble était nécessaire. Je ne l’ai pas eue.

- un adolescent qui n’avait qu’un doigt à une main. L’établissement l’a repéré et m’a aidée. Mais son père ne voulait rien savoir. Certains parents nient le handicap. Il faut les convaincre de constituer un dossier MDPH.

Handicaps légers

-  J’ai eu un jeune homme sourd de l’oreille droite. Gentil, mais paresseux. Ce n’était pas la surdité qui l’empêchait de travailler.

- Pour les enfants dyslexiques, je dois adapter le sujet sur mesure. Et enlever un tiers des questions posées aux élèves. Ils ont généralement des ordinateurs. Parfois, ce sont des enfants paresseux, pourvus de mères ultra possessives, et qui profitent de la situation.

 

Marielle Lachenal, mère d'une fille intellectuellement déficiente.

Elle utilise avec elle, pour communiquer, des gestes dans le cadre du programme Makaton. Elle est devenue formatrice dans ce programme. Elle est membre du bureau d'Isaac, lieu de rencontres et d'échange.

Mon avis n’est pas carré. Le dogme est contre-productif.

Un chemin d’ouverture extraordinaire a été parcouru. Le regard a changé, et doit encore changer. Mais il ne faut pas aller trop loin. 

Le « grandir ensemble » ne doit pas être obtenu à n’importe quel prix. Et l’inclusion n’est pas destinée à faire des économies.

C’est enfant par enfant qu’il faut l’aménager.

Pendant les trois premières années d’école, en particulier à la maternelle, tout se passe bien. C’est plus tard que la vie en commun à l’école est difficile. Les enfants porteurs de handicaps ne doivent pas  être isolés au fond de la classe. Mais parfois, ils ont peur du groupe composé d’enfants différents d’eux.

C’est pourquoi il ne faut pas fermer les IME (Instituts Médico Educatifs) qui prennent en compte les besoins spécifiques.

Je ne sais pas ce que vont devenir les enfants en grand besoin.

 

Mijo Beccaria mère et grand-mère d’enfants porteurs de handicap

Mijo a été la rédactrice en chef de Pomme d'Api, créatrice de Popi, directrice de collection (Petit Ours brun, Mimi Cracra, Les Belles Histoires de Pomme d'Api,...). Elle a dirigé de longues années Bayard Jeunesse.

Ne nous gargarisons pas d’ayatollesques slogans à courte vue. L’inclusion des enfants handicapés est un miroir aux alouettes.

Une inclusion systématique a tendance à faire oublier tous les travaux et les expériences menés pour répondre aux besoins spécifiques des enfants handicapés.

Cela me paraît être une forme de négation de ce que vivent les enfants et les éducateurs spécialisés.  Et une inclusion forcée peut-être très difficile à vivre, comme une négation des difficultés vécues par les enfants handicapés.

L'inclusion n'est pas une potion magique.

Les handicaps sont infinis et infiniment différents. Quel est le rapport entre un enfant en chaise roulante et un enfant autiste ?

L’inclusion est souvent une réussite en maternelle. Cela ne doit pas laisser croire qu’elle fonctionne plus tard. Pour certains, les acquisitions sont inatteignables.

Pour les handicapés légers, l’entrée au collège est déjà problématique.

Pour les handicaps spécifiques - cécité, surdité – qui nécessitent une formation spécifique du personnel enseignant, on peut imaginer une inclusion partielle : certaines cours isolément, mais récréations et sport en commun.

Ceux qui sont inintégrables peuvent vivre plus tard en relative autonomie, mais avec une formation.

Pour certains enfants, présentant des polyhandicaps lourds, ou autistes, les structures manquent en France. Leurs parents sont encore obligés de les envoyer en Belgique.  

 

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