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Par Carenews PRO - Publié le 13 novembre 2018 - 17:16 - Mise à jour le 16 novembre 2018 - 08:34
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[HORS-FRONTIÈRES] Inde : quelle pratique de la philanthropie ?

Deuxième pays le plus peuplé du monde et troisième en termes de Produit Intérieur Brut à Parité de Pouvoir d’Achat (PIB PPA), l'Inde est un pays de contrastes. En effet, malgré une croissance de 9% du PIB PPA et le fait qu’il abrite 2% des millionnaires et 5% des milliardaires du monde, il reste l'un des plus pauvres au monde. Si les 25 dernières années ont vu une amélioration notable (le taux de mortalité des moins de 5 ans est passé de 126/pm à 56/pm et l'alphabétisation de 48% à 70% de la population adulte), 33% de la population vit avec moins de 1.25USD par jour.

[HORS-FRONTIÈRES] Inde : quelle pratique de la philanthropie ?
[HORS-FRONTIÈRES] Inde : quelle pratique de la philanthropie ?

 

Un pays et une philanthropie en mutation

 

Au-delà d’un rôle de plus en plus affirmé sur la scène internationale, l’Inde voit émerger des géants économiques et, avec eux, des individuels fortunés et une classe moyenne forte de 120 millions de personnes. Dans ce contexte de besoins importants et d’enrichissement d’une partie de la population, la philanthropie des Indiens et des entreprises indiennes tend à se développer. Dans son rapport “Philanthropy in India”, publié avec Alliance et Wings, Caroline Hartnell note également que l’attitude des philanthropes “plus enclins à se regrouper, à échanger et à parler de leur philanthropie” et l’arrivée d’outils nouveaux (plateformes de crowdfunding, paiements en ligne…) participent à cette expansion d’une culture du don naissante. Il faut également noter le rôle de la diaspora indienne en tant que donatrice et qu’exemple sur ce sujet.

 

RSE et mécénat d’entreprise, une loi d’encadrement ambigüe  

 

Alors qu’en France on fêtait cet été les 15 ans de loi Aillagon, c’est en 2013 qu’a été votée en Inde l’Indian Companies Act. Première mise à jour du droit des sociétés en plus de 50 ans, cette dernière a notamment introduit des obligations fortes en termes de RSE. Les entreprises d’une certaine taille au regard de leur capital, chiffre d’affaire ou bénéfice, doivent désormais créer un comité RSE et consacrer au moins 2% des bénéfices de la société à des activités RSE. Ces dispositions concerneraient 8 000 à 16 000 entreprises pour un total de 1,5 milliards de dollars, lesquels doivent être dépensés sur le territoire indien. L’on voit ici que la définition adoptée pour le terme RSE renvoie davantage au mécénat ou même à une forme d’imposition déguisée. En effet, la loi précise les aires autorisées pour les dépenses (pauvreté, éducation, santé, environnement…) et rend possible la contribution aux fonds gouvernementaux dédiés à ces causes. Il semble que cette dernière option soit souvent retenue, la part du mécénat d’entreprise dans le montant global des donations est passé de 30% à 15% quand les donations des individuels ont été multipliées par 6.

 

La classe moyenne, nouvel horizon des associations

 

Si l’on en croit le rapport du Charities Aid Foundation, l’Inde compte en 2018 100 millions de donateurs de plus qu’en 2009. À cette époque, seul 14% des indiens avaient réalisé un don en numéraire à une ONG contre 28% en 2013. Au total on estime que les dons des individuels représentent 0,37% du PIB, cette estimation est cependant complexe à étayer, les dons informels (assistance directe, dons aux organisations religieuses etc.) étant extrêmement importants : 84% des Indiens déclaraient donner (71% d’entre eux dans des contexte confessionnels). Pour la classe moyenne émergente, les plateformes de crowdfunding facilitent la mise en oeuvre avec des contributeurs entre 25 et 45 ans et un don moyen aux alentours de 50$. Le secteur tend d’ailleurs à se densifier avec des généralistes comme BitGiving et ImpactGuru, des plateformes de paiement pour ONG et des plateformes de microprêt, etc. De plus en plus, ces acteurs se structurent en faisant valider les associations répertoriées par GuideStar India (la confiance dans les ONG est un véritable problème en Inde). Des actions comme DaanUtsav (Festival des Dons en Gujarati) participent à la dynamique globale d’implantation d’une culture du don à tous les niveaux de la société indienne, culture que plusieurs ONG, notamment étrangères, réussissent à mobiliser (Amnesty…), sachant que le système fiscal indien permet de déduire à 50% ou 100% des dons du montant des revenus imposables.

 

Régulation, structuration, professionnalisation, les indispensables du développement de la philanthropie indienne

 

Parmi les nombreux écueils auxquels la philanthropie indienne va devoir faire face : la méfiance croissante du gouvernement envers les ONG internationales et les fonds donnés depuis l’étranger. De plus, le manque de professionnels qualifiés et le manque de compétences (notamment en nouvelles technologies) sont notés par Caroline Hartnell comme potentiels problèmes. De même, alors que l’impact investing est en développement (on espère 8 milliards de dollars d’investissement en 2025), le manque d’opportunités d’investissement identifiées en amorçage est un point faible du secteur. Enfin, le manque de réseaux d’importance sur ces sujets rend complexe le partage d’expériences entre acteurs et ce malgré une participation accrue à des organismes d’envergure régionale.

 

Avec ces développements, l’Inde pourrait être un point d’importance de la philanthropie d’ici quelques années. Il lui reste cependant à capitaliser sur l’existant et à franchir un palier en terme de stabilité politique et de mise en commun des expériences. Peut être la clé est elle aussi mentale : dans l'étude consacrée par Bain & Co aux grands donateurs, seul 1 sur 15 estimait son action plus ambitieuse que la moyenne.

 

 

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