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Par Lire pour en sortir - Publié le 24 octobre 2017 - 12:06 - Mise à jour le 25 octobre 2017 - 15:17
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[DANSLESMURS] Rencontre auteur à la prison de Mont-de-Marsan avec Karl Dazin

Karl Dazin a été conseiller municipal en Seine-Saint-Denis de 2001 à 2008. Cette expérience lui a inspiré l'écriture de son premier roman, Sale eau de Montreuil, un polar dans lequel Le Poulpe va mener son enquête sur la société de distribution Méolia qui semble s’enrichir sur les dos des contribuables.

[DANSLESMURS] Rencontre auteur à la prison de Mont-de-Marsan avec Karl Dazin
[DANSLESMURS] Rencontre auteur à la prison de Mont-de-Marsan avec Karl Dazin

« A celui qui le lira », c’est la dédicace que m’a demandée Pédro, un détenu au centre pénitentiaire de Mont-de-Marsan. Il avait déjà lu le bouquin, il allait le laisser sur un banc, pour qu’un autre le lise. Et pour moi, vous écrivez « Pour Marjanne », elle est née aujourd’hui.

Quelle différence entre une rencontre en prison et une rencontre dans un salon du livre ? Dans un cas les lecteurs ont commis un délit passible de prison et purgent leur peine, dans l’autre ils n’ont pas commis d’acte délictueux ou alors ne se sont pas fait prendre et sont encore en liberté. En réponse aux questions des prisonniers, j’ai évoqué la liberté d’écrire, la liberté de la page blanche et le pouvoir démiurgique de la touche suppr qui permet de modifier le cours du récit à sa guise et de faire revenir en arrière un personnage, comme dans les effets spéciaux des films de Charlie Chaplin. Certains d’entre eux, j’en suis sûr, auraient bien voulu modifier le cours de leur existence, revenir sur les choix inappropriés qu’ils ont faits. Mais ici, c’est le non-dit. On ne connait pas, et heureusement sans doute, le motif de l’incarcération. Ce non-dit est tellement puissant qu’il permet de considérer le détenu d’abord comme une personne et non comme un condamné. J’ai donc rencontré des personnes, des lecteurs, des gens, les mêmes que je rencontre au café après une lecture publique.

La corruption d’un élu municipal, sujet au centre de mon polar sale eau de Montreuil, les a fait réagir. Les faits qui m’ont servi de toile de fond sont-ils réels, des élus s’en sont-ils mis plein les poches, ai-je subi des menaces ? Les sous-entendus et les sourires en coin laissaient entendre que l’assistance en connaissait un rayon.

L’un des détenus écrivait, il écrivait chaque jour, m’a-t-il confié après la rencontre, et avait accumulé une vingtaine de chapitres mais ne savait pas comment les articuler entre eux, comment rassembler les pièces du puzzle, un autre encore avait écrit un conte de dix-huit pages et cherchait maintenant à le publier, donc en premier lieu à lui faire passer la censure de l’établissement pénitentiaire. Les mots sont une arme, la seule à être autorisée en prison, mais il n’est pas simple de lui faire franchir l’enceinte du centre.

Avec Léna et les bénévoles de l’association Lire pour en Sortir, Evelyne et Martine, nous avons terminé cette rencontre dans la salle dédiée aux cultes tandis que le soleil d’automne filtrait à travers les barreaux. Les détenus, un livre à la main, nous ont salués et sont repartis en me souhaitant bon courage à moi, pour mon travail d’écriture, au moment même où je pensais qu’il leur en fallait à eux du courage pour se lever chaque matin, privés de liberté.

Ces échanges culturels, programmés par le coordonnateur socio-culturel du centre pénitentiaire de Mont-de-Marsan permettront-ils aux détenus de s’évader quelques heures par la lecture, comme tout un chacun ?

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