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Par Fondation d'entreprise OCIRP - Publié le 11 mai 2020 - 11:49 - Mise à jour le 11 mai 2020 - 12:12
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L’orphelinage, un sujet qui avance

Pour mieux comprendre et mieux accompagner les orphelins à l’école, la Fondation OCIRP a réalisé en partenariat avec l’IFOP une enquête nationale inédite, par son ampleur et son sujet. Il s’agit du premier programme de ce type développé par la fondation. Les résultats de cette étude ont été présentés lors d’un colloque qui a réuni de nombreux partenaires, dont des institutions. Focus sur les interventions de Jean-Philippe Vallat pour l’Unaf (Union nationale des associations familiales), Fabienne Quiriau pour la Cnape (Convention nationale des associations de protection de l’enfance), de Gilles Séraphin, ancien directeur de l’Onpe (Observatoire national de la protection de l’enfance) et de Sophie Pennec pour l’Ined (Institut national d’études démographiques).

L’orphelinage, un sujet qui avance. Crédit photo : iStock
L’orphelinage, un sujet qui avance. Crédit photo : iStock

L’Unaf et la question des orphelins

L’Unaf (Union nationale des associations familiales) est l’institution à laquelle la loi confère la mission de représenter l’intérêt des familles sur l’ensemble des champs de politique publique qui les concernent. Parallèlement à cette mission, l’Unaf est aussi un réseau d’unions départementales et d’associations qui peuvent agir au plus près des familles pour les accompagner dans leurs besoins. Pour ces deux raisons, la question des orphelins est un sujet important pour l’Unaf.

Mesurer, rendre visible et promouvoir la question des orphelins

L’Unaf soutient les efforts de la Fondation d’entreprise OCIRP pour rendre visible la question des orphelins. Dans les nombreuses instances où l’Unaf siège (Haut Conseil de la Famille, Conseil national de l’information statistique...), elle cherche à éviter que les situations de veuvage et d’orphelinage se retrouvent « noyées » dans l’ensemble « monoparentalité » qui est devenu une catégorie à part entière des politiques publiques. Or, la situation psychologique, sociologique et économique des familles endeuillées n’est pas la même et requiert des politiques publiques spécifiques.

Mieux connaître les enjeux économiques et psychologiques de l’orphelinage pour mieux agir

Au-delà de la mesure, derrière l’orphelinage, il y a des réalités et des problématiques sociales et humaines : surmortalité masculine, suicide, surmortalité marquée des catégories populaires... Les travaux du Haut Conseil de la Famille font aussi état de l’appauvrissement que connaît une famille lorsqu’un conjoint disparaît prématurément. Enfin, nous savons, aussi, depuis l’enquête de Nathalie Blanpain de 2008, que les orphelins connaissent – plus que d’autres – des difficultés dans leur parcours, notamment scolaire et sur le plan de leur santé. La réalité, mieux connue et décrite des orphelins, doit nourrir nos politiques publiques, mais aussi nos actions associatives.

La question de l’école

Ce que retient l’Unaf de cette enquête très riche sur le rapport des orphelins avec l’école, c’est à quel point elle révèle les traits généraux de notre système scolaire, bien au-delà de la question de la prise en charge de cette population spécifique. La rupture dans le rôle de l’enseignant entre le primaire et le secondaire est frappante : dans le secondaire, il est beaucoup plus difficile, pour le jeune, de trouver un interlocuteur transversal. La faible présence de professionnels de la santé et du bien-être mental (médecins scolaires, psychologues, infirmières), mais plus généralement d’intervenants extérieurs apparaît en filigrane. Pourtant, 71 % des orphelins qui sont allés consulter ou sont allés dans une association sont contents de l’avoir fait, et 41 % des 15 ans et plus souhaiteraient que le sujet de la mort soit abordé en classe par un intervenant extérieur.

L’enquête montre que les enseignants sont en forte attente d’outils pour savoir « comment s’y prendre », ce qui révèle leur faible formation sur les sujets renvoyant à la vie « hors école » des élèves. On voit à quel point de « petits » changements (au vu des enjeux du système scolaire) pourraient contribuer à modifier l’esprit même du système et la qualité de vie de ces enfants à l’école.

Pour l’Unaf, cela confirme que sur ce plan, des changements relativement simples pourraient modifier le vécu des enfants sans nécessiter de budgets massifs ni de dispositifs lourds de contrôle. En revanche, le portage par les acteurs locaux semble indispensable. Le dispositif des « espaces parents », inscrit dans la loi de refondation de l’école, et qui commence à se déployer dans les établissements, pourrait être un relais utile pour ces transformations.

La Cnape et les politiques publiques de protection de l’enfance

La protection de l’enfance est une politique publique à part entière, mais en interaction avec d’autres politiques, dont celle de l’Éducation nationale. Elle a pour mission essentielle de protéger les enfants du danger qu’ils peuvent connaître dans le cadre intra-familial. Le danger recouvre des réalités variées : carences, négligences, atteintes à l’intégrité physique et psychique, maltraitances. Avec la loi de 2007 notamment, réformant la protection de l’enfance, la notion de risque de danger est introduite, invitant à porter l’attention sur des situations susceptibles de se dégrader au détriment de l’enfant et à réagir le plus tôt possible. Dans tous les cas, il s’agit d’évaluer chaque situation pour déterminer le degré de gravité et de préconiser des modalités de protection.

L’enfant peut demeurer sous le toit familial si sa protection est possible par le biais d’actions d’accompagnement auprès de lui et de sa famille. Un peu plus de la moitié des enfants protégés, soit environ 150 000, demeurent dans leur famille. Il peut être décidé de séparer l’enfant lorsque sa protection l’exige. Il est alors accueilli soit en établissement, soit en famille d’accueil, soit par un tiers digne de confiance. Les réponses doivent être appropriées à chaque enfant, tenir compte de son meilleur intérêt, de ses besoins fondamentaux et spécifiques. Tout en protégeant l’enfant du danger, il s’agit aussi de veiller à son développement le meilleur possible. Toutes les actions à mettre en œuvre sont définies dans un projet pour l’enfant, qui est révisable au regard de l’évolution de l’enfant et de la situation familiale. Les actions peuvent inclure un accompagnement de la famille pour l’aider à mieux assumer ses responsabilités éducatives à l’égard de l’enfant, par exemple épauler un parent dans les actes de la vie quotidienne concernant l’enfant ou dans la gestion du budget familial pour améliorer ses conditions de vie. Hormis le nombre d’enfants pupilles, il est difficile, aujourd’hui, d’avoir un décompte précis des enfants protégés qui sont orphelins de père ou de mère. Les quelques estimations révèlent une surreprésentation d’orphelins par rapport à la moyenne nationale selon les classes d’âge. La prise en compte de cette situation dans les modalités de protection semble variable, certains professionnels consultés faisant état d’une prise en compte réelle dans l’accompagnement, d’autres indiquant qu’elle est peu appréhendée. La plupart reconnaissent qu’il y a lieu de mieux prendre en considération le fait d’être orphelin. L’APEX (Association de Promotion des Expérimentations Sociales) en partenariat avec la Cnape et dans le souci d’une meilleure attention portée aux orphelins suivis par l’Aide Sociale à l’Enfance, a mené une étude quantitative et qualitative plus approfondie avec un double-objectif : d’une part prendre la mesure de le proportion des enfants orphelins dans ce dispositif et les rendre visibles par une enquête statistique ; d’autre part mieux saisir la vulnérabilité à laquelle le deuil d’un parent les a exposés et comment celle-ci est prise en compte par les travailleurs socio-éducatifs qui les accompagnent. 

L’Ined : les jeunes orphelins en France

Les jeunes orphelins sont les enfants, les adolescents et les jeunes adultes qui ont perdu leur père, leur mère ou leurs deux parents par décès. On peut parler d’orphelinage précoce pour désigner cette situation. En 2015, Cécile Flammant a soutenu une thèse financéee par la Fondation OCIRP et encadrée par Sophie Pennec et Laurent Toulemon, tous deux directeurs de recherche à l’Ined : Le nombre et la proportion d’orphelins ont diminué depuis la précédente enquête « Étude de l’histoire familiale », qui faisait état de 800 000 orphelins de moins de 25 ans en France, dont 330 000 mineurs (Monnier, Pennec, 2003). En effet, la mortalité des adultes diminue régulièrement. Cependant, les analyses statistiques restent difficiles à approfondir, car la qualité des données sur les décès parentaux est variable d’une source à l’autre et les estimations réalisées à partir des différentes sources ne sont pas tout à fait cohérentes. Par ailleurs, ni le recensement ni l’état-civil ne donnent d’informations sur les décès parentaux. En 2015, 600 000 à 650 000 jeunes de moins de 25 ans étaient concernés par le décès d’un ou de leurs deux parents. C’est donc une situation rare mais loin d’être exceptionnelle, puisque au lycée, cela représente en moyenne un enfant orphelin par classe.

Focus

La majorité des orphelins mineurs en France vivent avec un parent : parmi les orphelins mineurs, 72 % vivent avec leur mère, 21 % vivent avec leur père et 7 % ne vivent avec aucun parent. Lorsque les orphelins vivent avec leur parent survivant, ils vivent le plus souvent dans une famille monoparentale.

Pour en savoir plus : orphelins.site.ined.fr

La fréquence relative des différentes « formes » d’orphelinage est restée stable depuis 1999 : trois orphelins sur quatre sont des orphelins de père dont la mère est vivante, près d’un orphelin sur quatre est un orphelin de mère dont le père est vivant. Le double orphelinage (décès du père et de la mère) est très difficile à estimer mais il s’agit d’une situation très minoritaire, qui concerne environ un orphelin sur cent.

Il reste donc délicat de mesurer l’évolution de l’orphelinage en France. Une analyse plus précise fondée sur les tendances de la mortalité et du calendrier des naissances montre que l’orphelinage a diminué au cours des 15 dernières années, mais de façon moindre. La mortalité des adultes, et donc des parents, entre 30 et 55 ans a diminué d’un tiers pour les hommes et d’un quart pour les femmes entre 1999 et 2015. Mais parallèlement, les adultes ont leurs enfants plus tard : au cours de la même période, l’âge moyen des mères à la naissance a augmenté de 1,0 an et celui des pères a augmenté de 1,4 an. Les enfants ont donc des parents un peu plus âgés en moyenne, ce qui augmente les risques de devenir orphelins.

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