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Par Eva pour la vie - Publié le 19 juillet 2015 - 19:00 - Mise à jour le 20 juillet 2015 - 10:31
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Cancers de l’enfant : l’autosatisfaction ne suffit pas

Cet été, de nombreux enfants hospitalisés pour un cancer ou une leucémie ne gouteront pas aux joies des vacances. Pire, près d’un enfant sur 3 ne sera pas sauvé, faute de traitement efficace et une recherche peu soutenue : en France, seuls 2% des fonds de recherche anti-cancer sont dédiés aux enfants. Malgré ce constat peu glorieux, certains magazines ont récemment évoqué les « fulgurants progrès » de la recherche, arguant qu’en 40 ans, on aurait quadruplé le nombre d’enfants guéris. Notre enquête auprès des organismes officiels démontre que la situation est moins spectaculaire …

Cancers de l’enfant : l’autosatisfaction ne suffit pas
Cancers de l’enfant : l’autosatisfaction ne suffit pas

En juin, quelques magazines français vantaient d'énormes progrès qui auraient été relatés lors du congrès annuel de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) - le plus grand colloque de cancérologie au monde - à travers les propos d’un oncologue américain, le Dr Gregory Armstrong, qui aurait affirmé : "Aux USA, il y a quarante ans, seul un enfant sur cinq survivait au cancer alors qu'aujourd'hui plus de 80% sont vivants cinq ans après le diagnostic".

Surpris par de telles allégations, nous nous sommes procurés, auprès du National Cancer Institute (organisme officiel américain, équivalent de l’Institut National du Cancer, INCA), un rapport officiel  riche en informations ("Cancer Incidence and Survival among Children and Adolescents: United States SEER Program" ) qui indique notamment le taux de survie des enfants sur 1, 2, 5 et 10 ans, ce qui signifie enfants encore en vie X années après leur diagnostic d'un cancer ou d'une leucémie.

Selon ce rapport, en 1975, le taux de survie sur 5 ans des enfants aux USA tous cancers confondus était d’environ ... 57%, et d’un peu plus de 50% sur 10 ans. Ce chiffre a continué à progresser lentement (après de nets progrès entre les années 70 et 80, durant lesquelles les investissements pour la recherche étaient importants, les traitements moins couteux et les royalties offerts aux actionnaires des industriels du médicament, plus faibles qu’aujourd’hui), pour se stabiliser à 80% sur 5 ans (ou 70% sur 10 ans selon la SFCE, ce qui signifie qu’encore aujourd’hui, près d’un enfant sur 3 ne survivra pas à son cancer dans les 10 ans qui suivront son diagnostic) au début des années 2000.

Quiconque a dépassé l'école maternelle comprendra qu’on ne peut donc d'affirmer que 4 fois plus d’enfants guérissent – aux USA tout comme en France – depuis 40 ans. De plus, en creusant un peu dans les chiffres, on peut relever d'énormes disparités.

L’étude du National Cancer Institute rappelle que « la principale raison du progrès statistiques en matière d’espérance de survie des enfants atteints de cancers est dû à l'amélioration de la survie de la leucémie, en particulier des leucémie lymphoïde aigües, qui représente environ un tiers des cas en pédiatrie ».

Une réalité doit être aussi connue de tous : les enfants passent en dernier pour les industriels du médicament. La plupart des enfants qui guérissent à l’aide d’un traitement médicamenteux (la chirurgie restant souvent le meilleur moyen d'éradiquer certains types de cancers) le doivent à la « chance » que leur cancer ou leucémie « ai bien répondu » à un traitement initialement développé pour les adultes. 

Pour les enfants atteints par des cancers ou des leucémies plus spécifiques, les progrès sont très faibles voire nuls. Par exemple, pour les enfants atteints de tumeurs du tronc cérébral (un type de tumeur cérébrale qui touche essentiellement des enfants âgés de 5 à 10 ans), le taux de survie sur 5 ans ne dépasse pas ... 1% en 2015, à l'heure où l'on sait envoyer des fusées sur Mars.

Le nombre d’AMM (autorisations de mise sur le marché) de médicaments développés en première intention pour l’enfant en cancérologie sur les 10 dernières années est quasi nul.

Cette réalité peut être rapprochée à  un autre constat peu satisfaisant : sur les 8 dernières années, le nombre d’essais cliniques effectués – avec des traitements disposant d’une AMM - sur les enfants (selon le ministère de la santé et l’INCA) a quasiment triplé, passant de 872 enfants inclus dans des essais cliniques en 2007, à 2439 en 2013 (rappelons que chaque année, 2500 enfants et adolescents sont diagnostiqués d’un cancer). Pourtant, durant la même période, le taux de guérison des enfants atteints de cancers dits « de mauvais pronostic » et inclus dans des essais cliniques n’a quasiment pas progressé. Preuve qu’il y a beaucoup de progrès qui restent à faire … en amont des dits essais et aussi, pour proposer des traitements (anciens ou innovants) qui soient les plus adaptés possibles à chaque petit patient.

Finalement, les souffrances des nombreux enfants en échec thérapeutique - et des familles d’enfants décédés faute de traitement efficace - méritent mieux que des titres racoleurs.

La France dispose d’équipes scientifiques de qualité qui pourraient apporter de beaux progrès thérapeutiques pour les enfants atteints de cancers aujourd’hui en échec thérapeutique.

Malheureusement, les lourdeurs administratives et le manque de moyens financiers (l’une des premières activités des chercheurs est de chercher … de l’argent pour disposer des moyens indispensables pour l’équipement, les consommables et les ressources humaines indispensables) qui restent largement assumées par la générosité publique - via les associations de parents -  peuvent être décourageantes, d’où un faible nombre d’équipes oeuvrant sur les cancers pédiatriques.

De même, malgré une méconnaissance des facteurs de risques des cancers de l’enfant dans près de 9 cas sur 10, les études épidémiologiques ciblées sur l’enfant restent rares. "Mieux vaut mieux prévenir que guérir" ne semble pas être un slogan adapté aux enfants !

L’espoir d'une loi, pour un fond de recherche dédié aux cancers de l’enfant

500 enfants décèdent, chaque année, d’un cancer ou  d’une leucémie. C’est plus que pour n’importe quelle autre maladie pédiatrique. Et pourtant, en ce bel été 2015 ensoleillé, il n’existe toujours pas, en France, de fond de recherche public spécifiquement dédié à ces maladies.

En novembre 2014, une loi - rédigée par le député Jean-Christophe Lagarde suite à la mobilisation de l’association Eva pour la vie, soutenue par plus de 70 associations - visait à obtenir la création d’un fond dédié à la recherche sur les cancers de l’enfant mais aussi à faciliter l’individualisation des traitements des enfants atteints de cancers et de leucémies de mauvais pronostic.

Cette loi a été rejetée à quelques voix près, pour de sombres raisons.  Ce rejet a choqué de nombreux citoyens, associations, mais aussi, une partie de la classe politique, consciente que « cela n’arrive pas qu’aux autres » et que la protection de l’enfant malade – ainsi que le soutien aux familles – doit être améliorée. Sous l’impulsion d’Eva pour la vie, et d’associations indépendantes, ces députés ont décidé de se (re)mettre au travail.

Si des moyens pérènes soient mis en place, garantis par la loi, on peut espérer que demain, ou après-demain … les progrès – tant en matière de prévention que de traitement  des enfants atteints de cancers et de leucémies - soient réellement "spectaculaires". Et Made in France.

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