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Par Carenews PRO - Publié le 7 décembre 2017 - 16:34 - Mise à jour le 7 décembre 2017 - 16:41
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[HORS-FRONTIÈRES] Le Japon, un pays sans associations ?

Combien y a-t-il d’associations en France ? 1 300 000 environ. Et au Japon, pays deux fois plus peuplé ? A peine 50 000. Comment un pays aussi développé peut-il avoir un troisième secteur aussi embryonnaire? Focus sur l’intérêt général et le mécénat dans la 4e puissance économique du monde.

[HORS-FRONTIÈRES] Le Japon, un pays sans associations ?
[HORS-FRONTIÈRES] Le Japon, un pays sans associations ?

 

 

Le secteur non-marchand, une histoire récente

Le nombre d’associations au Japon est extrêmement faible (50 000 environ) comparativement aux autres pays du nord économique. Mais cela est moins surprenant quand l’on sait que ces organisations n’avaient aucune existence légale avant 1998 et le vote d’une première loi sur la question : la NPO law (NPO signifiant nonprofit).

Mais cette traduction législative n’est pas venue seule. En effet, l’élan de solidarité suscité par le tremblement de terre de Hanshin en 1995 ou par des scandales sanitaires ont aidé au développement de la société civile japonaise. “Historiquement, les Japonais ont toujours regardé vers le gouvernement pendant les périodes difficiles mais les associations commencent à se faire une place” soulignait récemment Sarajean Rossitto dans une interview au Japan Times.

 

NPO (Non Profit Organisation), késako? De la pédagogie

Si des groupes d’entraide ou de coopération locale ont largement préexisté à la loi de 1998, celle-ci a donné une véritable légitimité au secteur dans une société qui ne voyait pas très bien de quoi il s’agissait. À tel point que le premier directeur du Centre Japonais des Associations (CJA) a pu écrire en 1997 le livre “Qu’est-ce qu’une NPO ?” en donnant une réponse en six points parmi lesquels :

- C'est un corps étranger du futur (a foreign body from the future).

- C'est le créateur d'une nouvelle société civile.

 

Le CJA souligne toutefois que la société civile n’a pas été atone jusque là. En effet, le sentiment d’interdépendance et de coopération se retrouve tout au long de l’histoire japonaise. En 1886, le code civil prévoit d’ailleurs la création de “sociétés d’intérêts publics” qui restent toutefois sous un étroit contrôle de l’Etat. Mais le chemin est encore long : un sondage de 2013 a montré que 47,1 % des répondants disait avoir entendu le terme “NPO” mais ne comprenait pas complètement sa signification. Pour les ONG le chiffre grimpe à 55 %. Et pourtant, les besoins sont là : 50 % des familles monoparentales japonaises vivent sous le seuil de pauvreté.

 

Le manque de confiance, principal obstacle au développement des associations

Cette méconnaissance globale des organismes sans buts lucratifs et cette incertitude sur les mots qui les désigne s’accompagne d’un manque de confiance criant dans ce type de structure. Un sondage de 2016 montre que 34 % des japonais ne font pas confiance aux associations et l’index international CIVICUS a montré que le niveau de confiance des japonais pour les ONG n’était que de 17 %. En France, 50 % de la population fait confiance aux associations et fondations.

 

Pas de confiance, pas de dons

Ce manque de confiance se traduit également dans le peu de dons réalisés. Dans son édition de 2017, le World Giving Index de l’institut Gallup classait le Japon au 111ème rang mondial derrière le Togo ou le Salvador. Plus étonnant encore, les autres pays asiatiques environnants (Taïwan, Philippines, Corée du Sud) se situent entre la 52e et la 62e place à l’exclusion notable de la Chine (138e rang). A titre de comparaison, la France est 67e. Malgré ce chiffre, l’importante population du pays (120m d’habitants) le place tout de même en 8e place au classement des pays avec le plus de donateurs (36 millions de personnes) et de bénévoles (20 millions de personnes).

 

Et pourtant, un effet de masse

Au-delà d’un tableau qui peut sembler un peu noir, il faut souligner que le Japon est tout de même un donateur important avec 5,6 milliards d'euros de dons d’individuels et 1,8 milliards d’heures de bénévolat en 2014. Les donations des entreprises représentent sensiblement la même somme (5,3 Mds d'euros). Par ailleurs, des catastrophes comme le tremblement de terre et le tsunami de 2011 et l’effroyable bilan (plus de 18 000 morts et disparus) ont soulevé un élan de générosité sans précédent : 75 % de la population a réalisé une donation à cette occasion. Et les grands donateurs ont suivi le mouvement: le patron de SoftBank (qui vient d’entrer au capital d’Uber) a réalisé un don de 75mUSD suite au tsunami de 2011 et a annoncé vouloir donner son salaire de dirigeant jusqu’à sa retraite.

 

Un lent changement de mentalité

Pourtant, de nombreux obstacles restent à lever. “Les associations sont laissées en dehors du circuit de prise de décision gouvernementale.” indique le directeur local de Second Harvest, une association qui distribue les invendus alimentaires. L’association a pourtant réussi à monter un manuel pour les banques alimentaires avec l’aide du gouvernement mais l’interaction reste complexe: “Si un lieu doit servir à confectionner des repas pour les enfants, vous ne pouvez pas y réaliser des panier-repas pour les adultes, tout est micromanagé”.

 

Si le secteur non-marchand japonais n’est pas aussi développé qu’il peut l’être dans d’autres pays même dans la région, celui-ci a déjà accompli beaucoup en 20 ans de reconnaissance officielle. Reste à faire évoluer les mentalités, ce qui n'est pas la tâche la plus simple…

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