Avec La Terre en Partage, l’accueil « digne, actif et constructif » des demandeurs d’asile n’est plus une « utopie »
Situé dans la région limougeaude, La Terre en Partage est un lieu de vie communautaire qui accueille des demandeurs d’asile en leur permettant d’exercer une activité de maraîchage. Pionnière en France, l’association est topiste du Top 50 de l'entrepreneuriat à impact 2021 dans la catégorie « création, maintien du lien social et lutte contre l’isolement ».
Cet article est issu du Top 50 de l’entrepreneuriat à impact 2021. Initié par Carenews, piloté par HAATCH et l'ESSEC et soutenu par BNP Paribas, ce classement dévoile les 50 structures (entreprises, associations, coopératives) les plus impactantes de 2021.
Découvrez le détail de la deuxième édition du Top 50 et ses lauréats dans le livre de 136 pages qui présente la méthodologie, les critères d'évaluation, les portraits, les chiffres, les analyses et dossiers de fond sur les réseaux de l'ESS ou la mesure d'impact.
L’histoire de la Terre en Partage commence par une « utopie », celle de « créer un lieu d’accueil différent pour les demandeurs d’asile, qui permette la rencontre et de rendre digne, active et constructive cette période d’attente ». Déjà très engagés sur ces questions-là en région parisienne, Clémence Skierkowski et son mari se prennent « de plein fouet » la situation de ces femmes et hommes qui vivent une période de « vide » : « Tant qu’ils n’ont pas le statut de réfugié, ils n’ont pas le droit de travailler et n’ont accès ni à la formation ni aux cours de français. »
Le couple se lance alors dans le projet de réhabilitation d’un ancien site de la fondation Apprentis d’Auteuil vers Limoges et inaugure, en 2018, un lieu de vie communautaire visant à accueillir des demandeurs d’asile durant ce temps d’attente.
L’expérience de la vie communautaire
La Terre en Partage accueille ainsi 19 demandeurs d’asile. Le projet repose sur une activité de maraîchage. Chacun participe, quinze heures par semaine à l’entretien du potager « très inspiré de la permaculture ». Les fruits et légumes sont vendus en circuit-court aux habitants. L’association approvisionne également deux écoles de communes voisines.
Et qui dit vie en communauté, dit participation aux tâches quotidiennes. « Comme dans une grande famille », chacun participe aux tâches quotidiennes, décrit Whalid Tahar, résidant originaire de Libye et administrateur de l’association. « Ce n’est pas un hôtel ou un lieu d’hébergement. L’idée est de se dire que chacun est compétent et peut apporter au groupe », complète Clémence. Des bénévoles, souvent des habitants, dispensent des cours de français. Mais au-delà de ces cours, les échanges constants sont un véritable « bain de langue » qui permet aux résidents de progresser rapidement.
La démonstration par l’exemple
La Terre en Partage a obtenu l’agrément d’organisme d’accueil communautaire et d’activité solidaire (OACAS). Si cet agrément existait déjà, pour la communauté Emmaüs par exemple, il n’avait jamais été demandé pour accueillir des demandeurs d’asile. C’est une première expérimentation qui offre aux demandeurs d’asile un cadre légal pour exercer une activité en dépendant du code de l’action sociale, et non du code du travail. La Terre en Partage travaille ainsi main dans la main avec l’État : « On est partenaires, pas prestataires. Il a compris qu’il y avait un intérêt expérimental. »
« Essaimer » et « infuser »
L’association défend un projet à taille humaine. Clémence, son mari, les bénévoles et les résidents sont comme les pionniers d’un modèle qui a vocation à « s’essaimer sur d’autres territoires » et à « infuser » dans les politiques publiques comme le décrit très bien la cofondatrice :
Pour moi on aura réussi si on n’a pas uniquement quelques villages d’irréductibles Gaulois disséminés sur le territoire.
Lisa Domergue