L'ANTISÈCHE - Au fait, c'est quoi le bilan carbone ?

Le bilan carbone, développé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), est un outil qui permet de calculer l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’une entreprise, d’un produit ou d’un individu. Grâce aux résultats obtenus, les responsables de la société ou les individus peuvent avoir une idée de l’empreinte carbone qu’a leur activité ou leur consommation, sur l’environnement. 

En France, il est utilisé pour le calcul du bilan des émissions de gaz à effet de serre (Beges), rendu obligatoire par la loi Grenelle II de 2010 pour les entreprises de plus de 500 salariés (250 en outre-mer), les établissements publics de plus de 250 agents, les services de l'État et certaines collectivités. En plus d'intégrer la méthode de calcul du bilan carbone, ce bilan réglementaire doit aussi faire la synthèse des mesures et des actions programmées pour réduire les émissions. 

Environ  3 100 entreprises françaises sont concernées par cette obligation qui revient tous les quatre ans. La liste des bilans déposés par les firmes peut être consultée sur le site internet de l’Ademe.

Mais en quoi consiste réellement cette méthode et pourquoi est-elle si importante dans le contexte actuel ?

Un processus structuré en plusieurs étapes 

N’importe qui ne peut pas réaliser le bilan carbone. L’entreprise réalisant son bilan carbone doit faire appel à un prestataire certifié par l’Ademe ou alors comporter en interne un chef de projet formé à cette méthode. Ensuite, le processus se décompose en plusieurs étapes distinctes :

1. Sensibilisation et définition du périmètre :

L’entreprise chargée de la mission commence par donner un aperçu de la méthode du bilan carbone aux dirigeants de l’entreprise, ainsi que des enjeux de la démarche. Il s'agit aussi de délimiter le périmètre de l'analyse en identifiant les sources d'émissions à prendre en compte, telles que les activités, les produits, les services, les sites, etc.

2. La collecte des données au sein de l’entreprise :

Cette phase consiste à recueillir toutes les informations nécessaires sur les activités de l'entité étudiée. Cela comprend la consommation directe d’énergie (gasoil, gaz, fuel…) et d’électricité (réfrigérateurs, chauffage électrique…). Depuis janvier 2023, il faut aussi mesurer les émissions indirectes chez les fournisseurs ou les clients. 

3. L’exploitation des résultats : 

Les données collectées sont analysées et traitées pour calculer les émissions de GES associées à chaque activité ou source identifiée. 

→ A noter : le calcul du bilan carbone repose sur une méthodologie précise et encadrée. Pour un calcul efficace, il est important de considérer un périmètre suffisamment large pour bien comprendre l'exposition au risque climat. Les émissions sont généralement catégorisées en trois scopes :

• Scope 1 : émissions directes : ce sont les émissions de GES directement générées par l'activité de l'entreprise, comme la combustion de carburants ou le chauffage des locaux de l’entreprise.
• Scope 2 : émissions indirectes liées à l'énergie : il s’agit des émissions, liées à la production d'énergie consommée par l'entreprise mais qui ont lieu en dehors de ses propres locaux ;
• Scope 3 : autres émissions indirectes : cela inclut toutes les autres émissions non directement associées à la fabrication des produits/services, incluant l'ensemble de la chaîne de valeur, comme l'utilisation finale des produits par les clients, la gestion des déchets et le transport de marchandises.

4. Élaboration d'une stratégie de réduction : 

Sur la base des résultats du bilan carbone, des actions de réduction des émissions de GES sont définies et priorisées en fonction de leur impact potentiel et de leur faisabilité.

Une fois les résultats obtenus, il est possible d’identifier les éléments les plus polluants dans l’entreprise et de mettre en place des projections économiques en cas de diminution ou d’augmentation de certaines activités. Un plan d’action peut ensuite être élaboré pour faire en sorte de diminuer les émissions de l’entreprise.

5. Mise en œuvre de la stratégie :

Enfin, les mesures de réduction sont mises en œuvre dans l'organisation, avec un suivi régulier pour évaluer leur efficacité et ajuster si nécessaire.

Pourquoi faire un bilan carbone ?

Plusieurs raisons peuvent motiver les entreprises à dresser leur bilan carbone :

• Conformité réglementaire : en France, la réalisation du bilan carbone permet de se conformer aux exigences légales en matière de reporting des émissions de GES. Dans la dernière étude de conformité de l’Ademe, qui recense les publications en 2021, seules 40 % des entreprises étaient toutefois à jour. 
• Gestion des risques et opportunités : le bilan carbone permet également aux entreprises d’anticiper plus efficacement les futures obligations réglementaires en termes de pollution et de ne pas se retrouver au pied du mur au moment de leur mise en application.
• Amélioration de la compétitivité : en montrant qu’elle a pris des initiatives pour mesurer ses émissions puis éventuellement des mesures pour les limiter, l’entreprise possède un avantage supplémentaire à faire valoir lors d’appels d'offres par exemple. Une image de marque plus écologique qui montre que la société s’est engagée dans le développement durable est en effet bien vue par un nombre croissant d’entreprises mais aussi de citoyens. Faire un bilan carbone est également efficace pour réduire les dépenses d’énergie de l’entreprise.
• Engagement éthique : le souci et la volonté d’assurer un avenir durable aux générations futures peut également motiver certaines entreprises.

Les limites du bilan carbone

Si le bilan carbone est un outil de plus en plus mobilisé par les entreprises, il connaît un certain nombre de limites :

• Les nombreuses données nécessaires à son élaboration sont parfois complexes à collecter. Aussi, il n’est pas rare que la phase de récolte soit extrêmement longue, ce qui, dans certaines entreprises, peut poser problème.
• Le bilan carbone ne traite que les émissions de gaz à effet de serre. C’est donc largement insuffisant pour avoir une vision globale de l'empreinte écologique que peut avoir une entreprise : pollution des sols, rejet de particules et bien d’autres facteurs ne sont pas du tout pris en compte dans l’établissement d’un bilan carbone.
• Le budget nécessaire à la réalisation de certains plans d'actions est parfois élevé. Certains investissements nécessaires pour réduire les émissions d’une entreprise peuvent s’avérer très coûteux (ex. : rénovation, changement de matériel, isolation, installation de panneaux solaires…).

Félicité Dussel