Suspension de l’Usaid : un coup dur pour les ONG
Depuis le 20 janvier, jour de l'investiture de Donald Trump, l’Agence des États-Unis pour le développement international (Usaid) a subi un démantèlement inédit. De nombreuses ONG dépendant de l’aide américaine voient leurs missions d’aide humanitaire touchées de plein fouet.

« Vendredi 7 février 2025, à 23 h 59 (heure de la côte est des États-Unis), tous les employés directement employés par l’Usaid seront mis en congé administratif dans le monde entier », ont pu lire les principaux concernés dans une note diffusée sur le site de l’Agence. Ces licenciements interviennent après le gel des financements de l’Usaid, décrété par Donald Trump le 20 janvier, pour une durée provisoire de 90 jours. Cela représente 42 % du budget de l’aide humanitaire mondiale, soit l'équivalent de 41,37 milliards d’euros annuels.
De nombreux programmes d’aide humanitaire stoppés dans leur élan
« Pour Action contre la faim (ACF), l’aide américaine représente 120 millions d’euros pour 2025, soit une cinquantaine de projets dans une vingtaine de pays dans le monde », affirme Benjamin Viénot, responsable de la gestion de crise à ACF au micro de Franceinfo. Parmi les projets touchés, figure un programme destiné à traiter 10 000 enfants victimes de malnutrition aiguë sévère en République démocratique du Congo (RDC). En raison de la suspension de l’aide américaine, ACF ne peut plus assurer le projet. « Ces enfants sont en danger de mort », déplore Benjamin Viénot.
Kevin Goldberg, directeur général de l’ONG Solidarités international s’inquiète également des conséquences d’une telle décision. « Depuis l’annonce initiale de cette suspension, nous avons été informés d’exemptions concernant certaines activités de réponse aux besoins vitaux […] », déclare-t-il. Cependant, de nombreux programmes n’en ont pas bénéficié, à l’instar de l’aide alimentaire déployée au Yémen et assurant la survie des personnes déplacées.
Cela « alors que, dans ce pays, plus d’un million de personnes subissent une crise alimentaire de l’ordre de l’urgence. C’est impensable », ajoute le directeur général de Solidarités international. Dans ce contexte d’urgence, marqué par une baisse de 36 % de son budget, l’ONG a lancé un appel à la générosité publique.
La mise en danger de millions de personnes dans le monde
Alima, ONG basée à Dakar et présente dans 13 pays subit également la politique menée par l’administration Trump. L’organisation humanitaire vient notamment en aide à la population du Mali. « Nous y mettons en œuvre, sur financements américains, des projets dans des districts sanitaires comme Niono, Macina ou Bandiagara qui sont des zones où l’accès aux soins est très fragile », a expliqué à RFI Henri Leblanc, le directeur adjoint d’Alima. « Pour les 90 jours à venir, nous estimons qu’à peu près 40 000 personnes n’auront plus d’accès aux soins si nous devons suspendre nos activités », s’alarme-t-il.
De son côté Avril Benoît, directrice générale de Médecins sans frontières (MSF) craint « une catastrophe humanitaire totale affectant des millions de personnes parmi les plus vulnérables du monde ». « Nous exhortons le gouvernement […] à permettre la poursuite de toute l’aide humanitaire et médicale essentielle pendant que l’administration réexamine ses priorités en matière d’aide étrangère », ajoute-t-elle.
Paul O’brien, directeur exécutif d’Amnesty international, redoute quant à lui la mise en danger de « droits de millions de personnes dans le monde ». En outre, il estime que le Congrès américain devrait intervenir pour contester le gel des financements.
Dans une optique plus juridique, la décision d’un juge fédéral, en date du 13 février est en passe de changer la donne. Le juge de district américain Amir Ali a en effet ordonné à l’administration Trump de « rétablir le financement [temporaire] » de certains « contrats d’aide étrangères et d’autres subventions ». Cette décision fait suite à la demande d’un groupe d’organisations dépendant de l’Usaid.
Léanna Voegeli