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Par Carenews PRO - Publié le 7 juin 2022 - 12:00 - Mise à jour le 7 juin 2022 - 14:19
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Aux USA, les Donors Advised Funds redessinent le visage de la philanthropie

Chaque mois, Hors-Frontières vous emmène à la découverte de la générosité en dehors de France. Ce mois-ci, direction les États-Unis pour parler d’un véhicule philanthropique particulier. Dans ce pays où la générosité est particulièrement développée, un outil bien spécifique est en plein essor.

Le dernier Hors-Frontières décrypte les Donors Advised Funds. Crédit : iStock
Le dernier Hors-Frontières décrypte les Donors Advised Funds. Crédit : iStock

 

Un outil en pleine expansion

Le Donor-Advised Fund (DAF) est un véhicule juridique américain, sans but lucratif, qui existe depuis 1931. S’il n’est pas nouveau en lui-même, leur nombre a explosé ces dernières années : il y en avait 873 000 en 2019 aux USA (+ 300 % sur les dix dernières années) et ils recevraient 12,7 % de dons d'individus. Si cette envolée a plusieurs raisons, la facilité de management et la flexibilité des DAF en sont les principales explications . De plus, ils n’ont pas d’obligation légale de dépenser une partie de leurs actifs (alors que les fondations américaines doivent dépenser 5 % de la valeur de ces derniers chaque année). 

 

Des DAF bien dotés

Les DAF reçoivent surtout des actifs (et non du numéraire) et reversent les dividendes ou le fruit de leurs ventes à des associations. Au cours de l’année 2019, ils auraient reçu 38 milliards de dollars, des sommes importantes dans l’absolu, mais qui doivent être relativisées dans un pays où la générosité avait atteint 427 milliards de dollars la même année. A noter que les donations sont irrévocables et ne peuvent aller qu’à des organismes sans but lucratif. Les DAF américains auraient amassé en peu de temps, 141 milliards de dollars d’actifs en 2019 contre 30 milliards de dollars en 2010 (à titre de comparaison, les actifs des 90 000 fondations américaines s’élèveraient à 1 000 milliards de dollars). Et cela  ne risque pas de s'arrêter : à l'inverse des fondations privées, les DAF valorisent les actifs (actions, bâtiments...) à leur valeur marchande, pas à leur valeur d'achat (cost basis). En conséquence, les déductions fiscales sont plus importantes.

 

Des banques à l’origine des plus grosses ONG américaines ?

 

Si des associations ont créé des DAF, des organismes à but lucratif peuvent aussi le faire. Et, surprise, les DAF les plus imposants en termes de levées sont aujourd'hui ceux de Fidelity, Vanguard et Schwabb, des entreprises de services financiers, les  plus fortunés. Ainsi, les trois DAF les plus importants des USA sont ceux de ces trois banques et totalisent 11 milliards de dollars d’actifs. Avec deux autres DAF importants (la Silicon Valley Community Foundation et le National Philanthropic Trust), ils totalisent 50 % de la collecte pour ce type de véhicule sur l’année écoulée. Et les critiques se focalisent sur eux.

 

Des critiques à pondérer

 

En effet, les DAF de ces banques sont aujourd’hui parmi les 10 plus grosses charities des USA en termes de levées de fonds. Les banques gèrent les actifs des DAF et font payer des « management fees » (des frais de tenue de compte) à leurs clients. Elles sont donc accusées de “stocker” de l’argent sans nécessairement le donner pour en retirer des bénéfices.

Si l’on peut regretter de voir les banques créer des véhicules sans but lucratif, qu’elles facturent par ailleurs, l’argent n’en est pas moins donné : 27 milliards en 2019 et 35 milliards en 2020, soit environ 20 % des actifs de ces structures. Alors que les fondations américaines doivent donner 5 % du montant de leurs actifs chaque année, les DAF font donc mieux. Problème : l’étude de référence sur le sujet, celle du National Philanthropic Trust ne prend en compte que les DAF créés par des organismes sans but lucratif…

Dans une autre étude, portant spécifiquement sur les 2 600 DAF d’un seul état (le Michigan), la réalité semble plus contrastée : 43 % des DAF seulement avaient réalisé des dons pour plus de 5 % de la valeur de leurs actifs. Enfin, il faut noter que les acteurs bancaires ne sont pas nécessairement moins généreux ou plus opaques. Certains, comme celui de Vanguard, sont même particulièrement transparents au point d’être remarqués par Charity Navigator

 

Une philanthropie en voie de transformation

 

S’ils ne représentent qu’une petite partie des fonds donnés chaque année, les DAF sont un outil particulièrement prisé des grands donateurs. En 2018, des données publiées par erreur montraient que plusieurs grands patrons américains avaient réalisé des dons de plus de 600 millions de dollars à des DAF sans que ces derniers soient tenus de distribuer les fonds rapidement. Plusieurs initiatives visant à faire évoluer la loi sont d’ailleurs en cours. S' ils rencontrent un succès important, et alors que la philanthropie américaine est sous le feu des critiques, les DAF vont devoir faire preuve de leur capacité à distribuer efficacement les importantes sommes qu’ils collectent.

 

William Renaut 

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