École du Monde Madagascar : Besely, une école d’exception en brousse
Depuis 27 ans, Écoles du Monde intervient à Madagascar dans les villages isolés pour améliorer les conditions de vie des populations. Cela passe notamment par l’éducation, un préalable essentiel au développement économique d’un village. Rencontre avec Charles Gassot, fondateur de l’association pour évoquer un projet qui lui tient particulièrement à cœur, le complexe scolaire de Besely.
- Bonjour Charles Gassot, nous vous connaissions comme producteur de films à succès, et nous vous découvrons président de l’association Ecole du Monde Madagascar. Comment est née cette association et pourquoi un tel engagement ?
Parce que la vie est tissée de plusieurs fils et de belles rencontres, c’est le cinéma et un tournage qui m’ont conduit à Madagascar il y a 28 ans de cela. À l’époque, nous tournions « Michael Kael contre la World News Company ». Entre la préparation et le tournage, j’ai découvert un pays sinistré, avec d’énormes besoins dans la brousse, loin de la capitale et des grandes villes. Les gens y étaient désarmés, sans école, sans bibliothèque, sans accès à l’eau ni aux sanitaires, les professeurs écrivaient dans le sable… Comment rester impassible ? Comment accepter d’avoir autant d’argent pour financer un film sans aider les populations ? Je suis issu d’une famille engagée, ma mère déjà intervenait auprès de la Fondation Abbé Pierre et les Restos du Cœur. Alors, j’ai décidé de mobiliser mon réseau. D’aller chercher des financements auprès de mes partenaires d’alors, les grandes chaînes de télévision, les amis… Ainsi est née l’association, puis le projet du campus scolaire de Besely.
- Parlez-nous de Besely, qu’y trouve-t-on aujourd’hui ?
Au départ, nous avons lancé la construction de plusieurs écoles sur le territoire de Madagascar. 14 en tout. Elles sont dorénavant gérées par la collectivité. Afin de concentrer notre action, car nos moyens sont limités, nous travaillons aujourd’hui essentiellement sur le complexe scolaire de Besely, situé à 40 km de la ville de Mahajanga. Nous y avons d’abord construit une école maternelle, puis primaire, un collège et, aujourd’hui, nous entamons la construction d’un lycée. La cantine est gratuite, nous avons installé le wifi, une bibliothèque, un ciné-club… Nous accueillons 270 enfants !
Amener l’éducation à Besely, c’est contribuer au développement économique. Cela permet aussi d’inciter les populations locales à rester dans leur commune plutôt que de s’exiler dans les grandes villes où les conditions de vie et de travail sont extrêmement précaires.
Le campus de Besely, nous l’avons souhaité architecturalement beau : les gens sont fiers d’y aller, le campus s’intègre dans son environnement, les parents ont confiance et laissent leurs enfants y étudier, nos partenaires constatent que le projet dans son ensemble comme l’enseignement dispensé y sont de qualité.
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Quel est l’apport de la Fondation groupe EDF ?
La Fondation s’est investie à nos côtés depuis plusieurs années déjà. D’abord pour électrifier l’école, puis le collège et aujourd’hui pour le lycée. L’électrification du lycée, indispensable pour le bon déroulement des cours, permettra d’assurer la qualité de l’enseignement (salle informatique, internet, laboratoire) et contribuera à fidéliser les professeurs dotés de logements avec réfrigérateurs et TV.
C’est important d’avoir des partenaires sur la durée, cela permet de voir loin. Au-delà du financement de la Fondation, nous sommes ravis d’accueillir des salariés qui sur le terrain nous aident à installer et nous apprennent à faire fonctionner des équipements photovoltaïques.
- Comment voyez-vous l’avenir à Besely ?
Radieux ! nous avons construit une école laboratoire qui montre que l’éducation est un vecteur indéniable de développement économique et de bien-être pour les populations locales. Aujourd’hui, de plus en plus de gens, d’associations, d’acteurs associatifs et politiques viennent visiter notre complexe. Nous avons même organisé les rencontres internationales de Besely en 2022 ! La Région de Boény compte sur ce projet colossal, jamais réalisé en brousse, pour développer la région. Créer, construire un Lycée Technique Agricole aux fins fonds de la brousse était, pour beaucoup, une utopie, qui devient réalité.
Plus concrètement, le lycée devrait ouvrir ses portes en septembre 2024. Il accueillera les élèves à partir de la classe de la seconde et ils pourront, au-delà de l’acquisition de l’enseignement général, apprendre un métier soit dans la filière agricole, car le métier d’agriculteur est primordial pour la création d’activités professionnelles génératrices de revenus dans un pays où 81 % de la population vit en milieu rural, soit dans la filière gestion et secrétariat/assistanat, car les besoins sont importants dans les entreprises de la région et du pays qui peinent à recruter du personnel administratif qualifié.
Beaucoup de partenaires de La Réunion (située à une heure d’avion seulement de Madagascar) comme le Lycée Agricole de St-Joseph vont aussi venir régulièrement nous apporter leurs savoir-faire.
L’avenir passera aussi par de nouveaux soutiens et j’invite vos lecteurs à découvrir notre projet et pourquoi pas, à y participer.