[ENTRETIEN] Nathalie Mourlon DG adjoint du Crédit Agricole Île-de-France
Soutenir les jeunes talents et préserver le patrimoine francilien sont les deux ambitions du fonds Crédit Agricole IDF Mécénat, lancé en 2012. En cinq ans plus de trois cents projets ont été soutenus et les candidatures sont de plus en plus nombreuses. Les besoins en la matière sont énormes et les moyens non extensibles.
Quelle est la vocation du fonds de dotation de mécénat du Crédit Agricole d’Île-de-France ?
Notre fonds de dotation pour le mécénat a une double vocation : la préservation et la mise en valeur du patrimoine francilien d’une part, et le soutien aux jeunes talents d’autre part. Si l’on combine les deux dans une même opération, c’est encore mieux !
Plus largement, notre démarche de mécénat est complémentaire aux nombreuses actions de proximité menées par nos 52 Caisses locales. Il s’agit de près 320 projets associatifs soutenus par an sur des thématiques très diversifiées. Si nous n’avions pas eu cette base extrêmement large en local, nous n’aurions pas fait pour le mécénat ce choix très ciblé à l’échelle régionale. Le fonds est doté d’un budget annuel d’un million d’euros jusqu’en 2020, en parallèle de l’enveloppe d’environ un million consacrée aux actions de proximité et laissée au libre arbitre de nos administrateurs de Caisses locales.
Nous sommes fiers du chemin parcouru depuis la création du fonds : nous avons accompagné en mécénat près d’une quarantaine de projets d’envergure. Concrètement, nous avons permis l’ouverture d’une classe de prépa à l’entrée dans la prestigieuse Académie Fratellini pour les métiers du Cirque. Nous avons financé la participation de quatre Compagnons du Devoir et du Tour de France aux EuroSkills (jeux européens des métiers de l’artisanat). A chaque fois, ce sont des jeunes talentueux, parmi les meilleurs dans leur domaine. Au Musée d’Orsay, nous avons soutenu la restauration de grandes œuvres sous l’œil des visiteurs, permettant de sensibiliser notamment le jeune public à la préservation du patrimoine.
Pour détecter les projets le bouche-à-oreille fonctionne maintenant très bien, surtout avec l’implication grandissante des administrateurs de nos Caisses locales – des clients sociétaires élus par les autres clients sociétaires. Une fois sélectionnés, les dossiers sont soumis au conseil d’administration du fonds pour validation. Nous recevons de plus en plus de propositions alliant le patrimoine et les jeunes talents, preuve que l’identité de notre fonds de dotation est désormais bien installée. Je pense à l’École Nationale Supérieure de Paysage de Versailles, qui forme des paysagistes d’excellence et qui recherchait un mécène pour soutenir des élèves boursiers en résidence. Nous soutenons également la formation des jeunes musiciens du Centre de musique de chambre de Paris, installé dans ce magnifique monument classé qu’est la Salle Cortot. En parallèle, nous mettons un point d’honneur à financer chaque année au moins un jeune chercheur en post-doctorat comme Virginie Mournetas, chercheuse en biologie cellulaire et moléculaire à l’I-Stem , l’un des laboratoires du Genopole. Ce financement lui a permis de revenir poursuivre ses recherches scientifiques en France.
Nous rencontrons ainsi des personnalités exceptionnelles, que nous suivons dans la durée. Pour nous présenter l’avancée de leurs projets, ces jeunes interviennent dans l’entreprise lors d’événements. C’est une vraie fierté en interne pour les collaborateurs comme pour nos élus – administrateurs de Caisses locales.
Comment voyez-vous l’évolution du mécénat ?
Le mécénat s’inscrit chez nous dans une approche globale, à la fois locale et régionale. Nous avons l’intention de poursuivre ainsi, car c’est complémentaire et très différenciant. Ces actions renforcent les liens en interne et la relation avec nos clients, ce qui contribue à l’atteinte de notre ambition : devenir la banque préférée des Franciliens à l’horizon 2020.
On nous présente de plus en plus de dossiers de mécénat alors que les pouvoirs publics ont de moins en moins de moyens. Beaucoup de monuments cherchent à financer leurs campagnes de restauration. Beaucoup de jeunes talents ne trouvent pas de soutien pour mener à bien leurs projets. Nous avons en Île-de-France une densité très importante de talents, de monuments remarquables, d’écoles prestigieuses à soutenir pour faire grandir notre région, rester la destination préférée des touristes, innover par la recherche et aussi rayonner par les arts… Le mécénat d’entreprises peut être l’une des solutions, mais n’est pas tout-puissant !
Il y a sans doute d’autres voies de financement à imaginer comme le crowdfunding. Les Caisses locales du Crédit Agricole d’Ile-de-France et la plateforme de financement participatif Bulb in Town ont lancé dernièrement un appel à projets pour soutenir les jeunes entrepreneurs des Yvelines et du Val d’Oise sur le principe du « don / contre-don* ». Cela fonctionne car ce sont des actions locales concrètes où chacun peut soutenir un entrepreneur près de chez lui. Une nouvelle piste que nous allons développer.
* selon la théorie de Marcel Mauss : tout don est suivi d'un contre-don de la part du bénéficiaire.