Aller au contenu principal
Par Generali & THSN - Publié le 10 octobre 2025 - 13:12 - Mise à jour le 10 octobre 2025 - 14:10
Recevoir les news Tous les articles de l'acteur

Interview Rapport Précarité et Santé Mentale : l’inclusion sociale et économique comme levier d’action

« L’inclusion sociale et économique est un levier essentiel pour protéger la santé mentale. » Si la souffrance psychique touche près de 13 millions de Français, elle affecte encore plus durement les personnes les plus vulnérables. Comment la précarité et les inégalités impactent la santé mentale ? Quelles réponses peuvent apporter les acteurs de terrain ? C’est pour mieux comprendre ces mécanismes que The Human Safety Net France a commandé une étude sur le sujet. Elise Ginioux, sa Présidente, nous en dévoile les principaux enseignements.

 

Pourquoi THSN France a-t-il souhaité commander ce rapport « Précarité et santé mentale : l’inclusion sociale et économique comme levier d’action » ?

En 2025, la santé mentale est Grande Cause nationale, mais les personnes en situation de précarité restent trop souvent dans l’ombre. Ce rapport commandité par THSN à Intersection Le Lab, vise à documenter les liens entre précarité et souffrance psychique, et à montrer que l’inclusion sociale et économique est un levier essentiel pour protéger la santé mentale. C’est une démarche engagée, au cœur de notre mission chez THSN France : libérer le potentiel des plus vulnérables. Il faut en moyenne six générations en France pour sortir de la précarité familiale, ce qui montre l’ampleur du défi.

Pourquoi l’accès aux soins psychiques est-il si complexe pour les personnes les plus vulnérables ?

Vivre dans une grande précarité multiplie par trois le risque de renoncer aux soins psychiques. Les freins sont multiples : désertification médicale, coût des soins, absence de dispositifs adaptés, barrière de la langue, méfiance envers les institutions.

Le rapport montre que l’isolement relationnel est un facteur aggravant de la précarité. Comment y remédier ?

Le manque de réseau et de soutien affectif favorise le repli sur soi, la perte de confiance et la chronicisation des troubles. Selon le ministère de la Santé, en 2019, la dépression touchait deux fois et demie plus les personnes les plus modestes que les plus aisées (17 % contre 7 %). Retisser des liens par le collectif, créer des espaces de répit et d’écoute est donc un levier essentiel pour restaurer la santé mentale et l’estime de soi des personnes en situation de précarité.   

Toute une partie du rapport est consacrée aux familles en grande précarité, notamment les mères isolées et leurs enfants. À quelles problématiques particulières ces mères sont-elles confrontées ?

Les mères isolées cumulent les vulnérabilités : précarité économique, isolement social, charge parentale écrasante. En France, 80 % des familles monoparentales sont dirigées par des femmes, dont une grande partie vit sous le seuil de pauvreté. 37 % des mères isolées vivent en logement social ou en hébergement d’urgence. Elles sont souvent sans emploi, sans réseau, et confrontées à une surcharge mentale constante. Le manque de soutien rend difficile la reprise d’un emploi ou simplement le fait de souffler un peu au quotidien.

À cela s’ajoute une forte méfiance envers les institutions et une peur réelle d’être jugée ou stigmatisée. Beaucoup de mères hésitent à demander de l’aide ou à parler de leurs difficultés, par crainte qu’on leur retire leurs enfants. C’est pourquoi la création d’espaces de répit, de confiance et d’écoute est essentielle pour permettre à ces femmes de se sentir en sécurité et de libérer leur parole.

Ces difficultés rencontrées par les parents se répercutent évidemment sur leurs enfants. Le rapport parle de « transmission intergénérationnelle des inégalités » et rappelle que « les enfants pauvres ont 20 % de risque supplémentaire de souffrir de troubles anxieux ou dépressifs ».

Les enfants sont les premières victimes invisibles de la précarité : le stress parental, le manque d’accès aux loisirs ou aux structures d’accueil nuisent à leur développement. 80 % des capacités cognitives et affectives se construisent avant 6 ans ; pourtant seuls 4 % des familles avec un enfant de moins de dix ans ont accès aux lieux d’accueil enfants-parents. De plus, 7 enfants sur 10 issus de familles modestes ne participent à aucune activité culturelle ou sportive. Une autre étude commanditée par THSN France sur l’importance des vacances et des loisirs pour les enfants démontre bien que ce ne sont pas un luxe, mais une nécessité pour le développement cognitif, la santé mentale et l’inclusion sociale des enfants. Favoriser l’accès à ces temps de respiration, c’est agir concrètement pour l’égalité des chances et la prévention des souffrances invisibles liées à la précarité.

Elise Ginioux, Présidente de The Human Safety Net en France
Elise Ginioux, Présidente de The Human Safety Net en France

On imagine les difficultés, quand on est en situation de précarité, à exercer une parentalité sereine. Quelles réponses peuvent être apportées ?

Face à ces constats, THSN France et ses partenaires déploient des solutions concrètes : création de lieux de répit, ateliers de parentalité, accès à la culture et aux loisirs. Depuis 2017, plus de 50 000 personnes, dont près de 28 000 enfants, ont été accompagnées dans 35 espaces d’accueil portés par des associations telles que Les Apprentis d’Auteuil, La Croix Rouge ou Les Restos Bébés du cœur. Dans ces espaces, les familles bénéficient d’un accompagnement psychosocial, d’activités éducatives et de temps collectifs qui restaurent l’estime de soi, le pouvoir d’agir des parents et protègent le développement des enfants.      

Chaque année, THSN mène également une grande collecte de dons, le Global Challenge, pour permettre aux enfants et à leur famille d’avoir accès à des loisirs, à la culture et à des vacances. En 2024, nous avons permis 2 000 journées, soient 2 000 instants de respiration hors du quotidien.

La dernière partie du rapport consacre une analyse approfondie à la situation des personnes réfugiées, avec ce chiffre marquant : 45 % des migrants venus pour des raisons humanitaires déclarent des symptômes dépressifs, soit 14 points de plus que les primo-arrivants venus pour des motifs économiques ou familiaux. Comment l’expliquer ?

76 % des migrants en situation irrégulière ont subi des violences graves et 70 % des réfugiés vivent sous le seuil de pauvreté. Leurs parcours sont marqués par des violences extrêmes et une précarité persistante. Pour les femmes, ces violences prennent souvent une dimension supplémentaire : mariages forcés, violences sexuelles et conjugales, exploitation, chantage pour un hébergement ou de l’argent, prostitution contrainte, ainsi qu’une précarité du logement qui les exposent à de nouveaux risques après l’arrivée en France.

Quels sont les leviers d’action pour accompagner ces personnes, au-delà de l’aide primaire sur le plan matériel ?         

Seuls 42 % des réfugiés retrouvent un emploi un an après leur arrivée en France. Or, l’insertion professionnelle est un levier puissant : travailler ou entreprendre, c’est retrouver confiance, reprendre prise sur sa vie.          

Nous développons des incubateurs, soutenons des programmes d’employabilité, de formation et du mentorat avec nos associations partenaires telles que La Ruche, Singa, Each One, Tent et plus récemment Kodiko et Duo for a Job.   

Depuis 2017, THSN France a accompagné plus de 4 000  réfugiés, dont 400 femmes en 2024, avec une attention particulière portée à l’insertion professionnelle et à l’entrepreneuriat. 40 % des femmes réfugiées ont été accompagnées au sein des incubateurs et 50 % dans les programmes employabilité.

Ces dispositifs permettent également de favoriser l’apprentissage de la langue, la découverte de la culture française, ainsi que le développement des soft skills, en adéquation avec les attentes des entreprises françaises. Ils facilitent ainsi l’insertion professionnelle tout en contribuant à apaiser les inquiétudes des bénéficiaires et à leur redonner confiance en l’avenir. Par exemple, à l’issue du programme de formation proposé par Each One, 85 % des participants accèdent à un emploi, que ce soit en CDD de 6 mois, en CDI ou via un contrat d’alternance.

En tant qu’acteur mobilisé sur le soutien aux personnes les plus vulnérables, qu’attendez-vous de ce rapport ?    

Ce rapport est un appel à l’action. Il doit nourrir les réflexions des grandes causes 2025, alerter sur les oubliés des politiques publiques, et inspirer des solutions concrètes. Il est aussi un outil pour mobiliser les acteurs économiques, politiques et associatifs autour d’une cause commune : protéger la santé mentale des plus vulnérables et bâtir une société plus inclusive et plus forte.

 

Pour en savoir plus sur l’étude THSN : précarité et lsanté mentale

Téléchargez l'Étude précarité et santé mentale

 

 

 

Fermer

Cliquez pour vous inscrire à nos Newsletters

La quotidienne
L'hebdo entreprise, fondation, partenaire
L'hebdo association
L'hebdo grand public

Fermer