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Par Le Rire Médecin - Publié le 25 juin 2013 - 17:53 - Mise à jour le 31 août 2020 - 12:26
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Le témoignage de Deborah, 12 ans

« Je m’appelle Deborah, j’ai 12 ans et cela fait 8 ans que je suis dans la galère de la maladie. ». C’est avec ces mots plein de gravité que nous accueille Deborah à l’hôpital Robert Debré. Et pourtant cette jeune fille pleine de vie, qui rêve de gagner Roland Garros, vous illumine de son sourire. La leucémie, elle la connaît par cœur. L’hôpital aussi. Mais c’est une véritable leçon d’espoir que d’écouter Deborah et sa maman raconter leur parcours. Retour sur cette belle rencontre, réalisée dans le cadre de notre campagne annuelle autour de l’action du Rire Médecin auprès des enfants et adolescents souffrant d’un cancer.

Le témoignage de Deborah, 12 ans
Le témoignage de Deborah, 12 ans

Avant d’entrer dans la chambre de Deborah, il faut prendre toutes les précautions : masque, charlotte, chasuble et sur-chaussures. Puis on pousse la porte, et on tombe dans ses grands yeux bleus. Deborah est coquette : un top jaune, un bandana rose. La couleur investit sa chambre. Le regard rieur de sa maman aussi. Sur un tableau, on peut lire : « 25 avril 2013 : maths, anglais, clowns. ». Le ton est donné ! Deborah ne loupera pas les énergumènes du Rire Médecin programmés ce jour. On lui demande de se présenter : « Ça fait plus ou moins 8 ans que je fréquente l’hôpital. J’ai eu environ 6 ans plus tranquilles entre l’hôpital et la maison. Puis rechute et greffe. A nouveau tranquille pendant près de 2 ans. Et à nouveau greffe cette année. ». De l’annonce de sa maladie, Deborah ne garde aucun souvenir. Mais sa maman, si. « Ça a pris 4 mois pour diagnostiquer la leucémie ! Elle avait tous les symptômes (fièvre violente et erratique, douleurs, fatigue…) mais les examens étaient normaux ! L’attente, c’est terrible. Finalement, le diagnostic, aussi dur soit-il, a été un soulagement.». Après l’annonce, la vie de Deborah et de sa maman s’est organisée pendant 3 ans autour de la chimiothérapie, entre hospitalisations et hôpital de jour. Puis enfin : « Après 5 ans et demi sans rechute, on nous a annoncé que c’était fini. ». Entre temps Deborah et sa maman se sont découvert une passion pour le tennis, qu’elles ont commencé à pratiquer à un haut niveau. L’année des 10 ans de la jeune fille, lors des examens pour se voir remettre leur certificat médical, le médecin a fait une prise de sang à Deborah, qu’il trouvait un peu fatiguée. Les examens confirment qu’il s’agit bien d’une rechute. « On a su très vite qu’il faudrait une greffe. Et il a fallu plusieurs protocoles pour y arriver.». Hélas cette année, alors que Deborah vient de « sortir Maman du terrain de tennis » avec un smash redoutable, les 2 inséparables apprennent la nouvelle rechute. Le corps de Deborah a bien récupéré depuis la première greffe, les médecins décident donc de procéder à une seconde greffe. « J’ai le moral, je ne suis pas trop fatiguée et la chimio a l’air de bien marcher. » nous annonce-t-elle. Quand on lui demande où elle trouve cette énergie, elle rétorque maligne : « Si je n’ai pas la pêche, ce sera plus dur ! ». Et Deborah fait tout pour garder cette pêche : « Je reste en contact avec mes amis, avec l’école. Ma meilleure amie vient le samedi aussi. Elle avait un peu peur au début mais maintenant ça va. ». Si le cercle proche de Deborah connaît toute sa vie, la jeune fille reste relativement discrète avec les ados de son âge : « J’ai peur qu’ils éprouvent un peu de pitié. La vie s’est faite comme ça et ils n’y sont pour rien. Ce n’est pas de ma faute, ce n’est pas de la leur. ». Ce mantra positif, elle s’y emploie chaque jour : « Je profite de chaque journée, d’autant plus que je suis encore jeune. Et plus tard, j’aimerais avoir des enfants. » Jeune fille de 12 ans, Deborah a dû réfléchir bien avant les autres sur la maternité : « La chimiothérapie peut avoir des conséquences sur la stérilité. Du coup on a congelé un peu de tissu de mes ovaires, mais je me suis mise à pleurer quand on m’a dit que peut-être je ne pourrai pas avoir d’enfant. » Plus tard, Deborah veut fouler les cours de tennis en tant que professionnelle et remporter le célèbre trophée à Roland Garros ! Elle en a la force : « Le fait d’être à l’hôpital, ça forge le mental. Sur le terrain, j’ai peut-être une autre façon de voir les choses que mes adversaires. Maman et moi, on est tenaces ; dès qu’on voit la balle, on fait tout pour la chopper, même si ça semble impossible ! ». Quand on lui parle des sujets auxquels sont sensibles les adolescents, Deborah ne se démonte pas. Ni la présence de sa mère ni ces questions intimes ne l’empêchent d’évoquer son futur amoureux : « Il aura les mêmes valeurs que moi. S’il est gentil, me fait rire, s’il y a de la confiance, ça me suffit ! ». La confiance justement, Deborah en est bourrée et ne nourrit aucune rancœur envers la vie, envers les médecins, ou envers ses camarades en bonne santé. Et si parfois elle sent des regards interloqués vers son foulard qui masque la chute de ses cheveux, elle dit ne pas y prêter attention : « Je m’en fiche, les gens pensent ce qu’ils veulent. Moi je sais ce que j’ai vécu ! ». Cette force de caractère se dessine aussi bien dans son goût pour le sport que dans ses notes au collège : « Je n’ai jamais décroché, même en passant toute une année hospitalisée ! Les profs m’ont dit que ce qui les intéresse c’est ma manière de penser, ma logique.». Deborah préserve sa liberté d’esprit et cultive son indépendance, car c’est très important pour elle. Sa mère confirme : « Nous avons une grande complicité mais je respecte son intimité et ses choix. Je ne la traite pas comme un bébé malade et surprotégé. Elle n’est pas sous une cloche. Le fait que je ne sois ni envahissante ni permissive nous permet d’avoir cette complicité ! ». Etonnamment, Deborah appréhende un peu de devenir une « ado rebelle » car elle dit aimer être une jeune fille calme et avoir cette relation avec sa mère ! « Une boule d’énergie », « super sympa », « toujours partante »… Voilà comment les clowns du Rire Médecin décrivent Deborah : « J’ai toujours connu les clowns en fait, ils font partie de mon paysage. Je les connais même en civil ! ». Avec eux, elle se permet de retrouver une enfance pleine d’innocence. Dès qu’ils franchissent la porte, elle s’autorise un retour dans ce monde de bulles et de magie que la maladie lui a fait quitter trop tôt ! « Ils pourraient même aller plus loin dans le délire ! Mardi dernier, ils ont déplacé tous les meubles et mis un vrai bazar autour de mon lit. C’était génial ! Et même quand j’avais des mucites* plein la bouche et ne pouvais pas rire, ils ont imaginé un jeu de rôle avec les expressions de mon visage uniquement ! ». Alors que les clowns Basket et Dédé tapent à la porte à la fin de l’interview, Deborah frémit d’impatience. Dans quelques minutes, cette jeune fille drôle et sage, à qui la maladie n’a pas fait de cadeau, s’autoproclamera princesse et dirigera un défilé de clowns et de médecins sous l’œil roublard de sa maman. Dans la chambre, tout le monde perd quelques années d’un coup grâce à ce moment partagé avec les clowns ! *aphtes très douloureux fréquents avec une chimiothérapie Interview réalisée par Marianne Debiesse le 25 avril 2013 à l’hôpital Robert Debré pour Le Rire Médecin ©Jacques Grison / Le Rire Médecin

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