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Par Carenews PRO - Publié le 14 septembre 2017 - 14:55 - Mise à jour le 17 octobre 2017 - 14:07
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[ÉCLAIRAGE] Les lauréats de La France s’engage face au changement d’échelle

Initié en 2014 sous le mandat de François Hollande, le label « La France s’engage » se donne pour objectif de soutenir des initiatives socialement innovantes, répondant à des problématiques insuffisamment couvertes par les politiques publiques. Dans un récent rapport, l’Agence Phare analyse les conditions de réussite du changement d’échelle des projets lauréats. Étendre son action, se déployer auprès d’un nombre plus grand de bénéficiaires, généraliser l’innovation, autant de défis qu’il faut encore relever.

[ÉCLAIRAGE] Les lauréats de La France s’engage face au changement d’échelle
[ÉCLAIRAGE] Les lauréats de La France s’engage face au changement d’échelle

 

 

Innovation numérique et innovation sociale

Au cœur du dispositif La France s’engage (LFSE) se trouve la nécessité de stimuler l’innovation sociale. Notion aussi complexe que communément employée, elle consiste, selon la définition du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, à « élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux nouveaux ou insuffisamment satisfaits, dans les conditions actuelles du marché économique et des politiques sociales, en impliquant la participation et la coopération des acteurs concernés, notamment des utilisateurs et usagers ». LFSE soutient les acteurs participants de cette dynamique et leur offre des leviers de communication ou encore de financements. Parmi les associations ou entreprises sociales accompagnées, telles qu’HelloAsso, Bibliothèques Sans Frontières, KOOM, Social Builder ou encore Droits d’Urgence, nombreuses relèvent de l’innovation numérique. À travers la création de plateformes, la mise en place de réseaux de formations, l’ouverture d’espace de ressources en lignes, ces différents projets contribuent à répondre à des besoins clés des citoyens.

L’Agence Phare, mandatée par le gouvernement, s’attache ainsi dans un premier temps à évaluer « la contribution de l’innovation numérique à l’innovation sociale ». Elle résume, au terme de son étude, que les projets lauréats du lot « Numérique » ont un impact social positif car ils permettent « [de] mieux identifier certains besoins sociaux, [d’]ouvrir des espaces de participation favorisant la mise en réseau des acteurs [et de] faire émerger de nouvelles pratiques professionnelles ». Une rencontre qui se révèle donc fructueuse entre ces différents pôles d’innovations mais qui se confronte rapidement à un autre enjeu clé : le changement d’échelle.

De la conception à l’essaimage : quelle stratégie de déploiement ?

Les associations et entreprises sociales fournissent des solutions aux problèmes qu’elles rencontrent sur le terrain mais ce toujours dans un premier temps de manière restreinte. L’Agence Phare interroge alors dans son rapport les méthodes utilisées par ces dernières pour se déployer. Toucher de nouveaux publics et de nouveaux espaces, tout en garantissant l’efficacité de leurs dispositifs, constituent probablement les défis majeurs des initiateurs d’innovation, qui qualifient aussi cette étape de phase « d’essaimage ». L’Agence Phare formule finalement le constat suivant : « Les projets ont été obligés de développer, soit des stratégies de transfert de compétences (scale across), ou bien d’amélioration de l’innovation (scale deep) pour garantir la qualité de l’innovation. (…) ils ont cherché à mieux identifier des partenaires locaux, ou bien à adapter les solutions innovantes à la réalité des besoins des territoires. »

Quant aux modèles organisationnels adoptés, on en dénombre deux : l’un plutôt centralisé, garantissant « un fort contrôle sur la qualité de l’innovation », l’autre basé sur des relations plus souples, voire des franchises. À noter, que les associations ont davantage tendances à adopter le premier tandis que les entreprises sociales acceptent plus facilement le second. Enfin, les modalités de financements sont, elles-aussi, plurielles : « Les projets peuvent adopter, dans l’ensemble, des stratégies d’amplification de financements publics ou privés, des stratégies de diversification des sources de financement (ressources propres, apports en nature, création d’une activité privée), ou bien des stratégies d’inversion (passage d’une logique de financement public ou privé à un autofinancement). » Dernier point du rapport, les obstacles au changement d’échelle pouvant être rencontrés. Les difficultés inhérentes à la gestion des ressources humaines internes et externes sont notamment pointées. Manager des responsables locaux, s’appuyer sur des bénévoles ou mettre à disposition du personnel issu des équipes originelles est un choix compliqué mais déterminant pour l’expansion des projets étudiés. En définitive, s’il n’y a donc pas de recette miracle, demeure l’importance d’une stratégie en adéquation avec la structure concernée et la conjecture. Une souplesse nécessaire et qui donne souvent lieu à l’adoption de modèles hybrides.

Le secteur de l’ESS en pleine hybridation

Face à l’étape complexe de leur développement, les projets LFSE témoignent d’une surprenante flexibilité. Ainsi, il n’est pas rare de voir se combiner « une forme de centralisation de l’innovation (rigidité des principes de l’innovation, pilotage national, absence d’autonomie juridique des antennes locales) » avec un essaimage plus souple, à la manière des stratégies adoptées par HelloAsso ou Bibliothèques Sans Frontières. D’autres variables sont aussi intégrées à cette vaste équation ; certaines structures « militantes » s’attachent à choisir leurs publics et leurs partenaires autour de valeurs fortes, tandis que celles relevant du secteur de l’entreprise s’orientent davantage vers des objectifs de croissance rapide. Toutefois, au-delà de ces divergences, les partenariats avec les collectivités locales sont perçus comme des « vecteur[s] clé de l’essaimage » et apparaissent comme un tremplin de choix pour les lauréats du label LFSE. Facilité d’accès aux financements et complémentarité aux dispositifs d’actions publiques sont notamment les piliers de ces collaborations. Quant aux projets ne bénéficiant pas de ces relations privilégiées, ils s’engagent vers d’autres voies pour s’exporter. Ainsi, « certaines associations peuvent créer des entreprises sociales, lorsqu’elles cherchent à définir un projet dans une perspective de croissance du nombre de bénéficiaire et surtout à diversifier leurs sources de financement. A l’inverse, des entreprises sociales sont capables de créer des associations locales pour toucher des financements publics. »

Au regard de ces évaluations, l’Agence Phare dresse un bilan très clair : « Cette transformation de l’innovation sociale a une signification majeure. Elle signifie d’une part que les associations ne se situent plus dans une logique de «tiers-secteur» qui dépendent de financements publics. Au contraire, les associations assument de plus en plus le caractère économique de leur activité, en se positionnant de manière plus explicite dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. » Ce dernier connaît donc une hybridation et une expansion insoupçonné et mérite d’être pleinement accompagné et encadré par l’État ; car, en effet, si les lauréats LFSE ont pu bénéficier d’une plus grande légitimité auprès du grand public après l’obtention du label, les réseaux d’innovations à travers le territoire gagneraient à être améliorés. L’État pourrait avoir un rôle majeur à jouer en construisant de véritables pôles d’innovations. Ainsi, « un enseignement fort du programme LFSE est qu’il est important de désigner un chef de file de l’innovation numérique pour structurer, financer et animer des partenariats territoriaux d’innovation sociale. » Le travail de l’Agence Phare constitue, quant à lui, un outil précieux pour nourrir la réflexion et permettre demain l’épanouissement d’un dynamisme nouveau, alimenté à la fois par les acteurs de l’ESS et par la puissance publique, pour répondre aux besoins de citoyens.

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