Rempart contre l’entrée en précarité, les épiceries solidaires sont, elles aussi, un modèle à préserver
Dimanche dernier, les Restos du Cœur lançaient un cri d’alarme : 150 000 bénéficiaires pourraient ne plus être aidés dans les prochains mois, et sans mobilisation massive de l’Etat et des grandes entreprises, l’association pourrait fermer d’ici trois ans. Reprise dans tous les médias nationaux, l’appel a généré de nombreuses promesses de don du secteur privé en seulement quelques jours.
La réalité dont témoignent les Restos est partagée par l’ensemble des acteurs de l’aide alimentaire. Les épiceries solidaires, qui accueillent des personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale pour leur permettre d’éviter le basculement vers la grande précarité, occupent une place singulière dans cet écosystème. Elles ont en commun de faire face à une augmentation inédite des besoins : depuis 2020, des ménages qui s’en sortaient difficilement jusqu’alors basculent vers la précarité. En 2022, les épiceries solidaires ont accompagné 20 % de bénéficiaires supplémentaires : travailleurs précaires, étudiants, retraités… qui ne sont pas habitués à demander une aide alimentaire. Semblables à des commerces de proximité, les épiceries solidaires permettent aux personnes fragilisées de choisir leur panier d’achat contre une faible participation financière et leur proposent une démarche dynamique pour créer du lien, reprendre confiance en soi et sortir des difficultés. Les près de 600 épiceries solidaires du réseau ANDES proposent ainsi des espaces de respiration et un tremplin à plus de 210 000 personnes chaque année.
Nous faisons toutefois face à une équation de plus en plus insoluble : la baisse des dons en quantité et en qualité, la hausse spectaculaire des prix d’achats et la stagnation des subventions mettent à mal l'équilibre budgétaire de nos structures de proximité : 38% d’entre elles ont dû réduire les quantités et/ou la qualité des denrées proposées à leurs bénéficiaires. Et ce alors que les besoins explosent, comme en témoigne le développement rapide des épiceries solidaires : ANDES a passé en 2022 le cap des 500 épiceries, atteindra 600 structures fin 2023 et 700 en 2024, soit plus de 300 000 personnes accompagnées chaque année, le tout fédéré dans un réseau regroupant 10000 bénévoles et salariés. Cette évolution appelle mécaniquement un financement structurel de long terme à l’échelle des besoins. Dans ce contexte difficile, nous saluons les moyens supplémentaires déployés par l’Etat pour faire face à cette situation exceptionnelle, notamment dans le cadre du programme Mieux Manger Pour Tous. Celui-ci offre non seulement une bouffée d’oxygène aux épiceries solidaires, mais nous permet également d’approfondir notre engagement en matière d’alimentation durable. Néanmoins, cette dotation reste insuffisante pour revenir à une qualité d’accueil et d’accompagnement dans les épiceries solidaires équivalente à celle de 2019. Les besoins de notre réseau s’élèvent à 5 millions d’euros pour garantir un accompagnement de qualité aux 210 000 bénéficiaires actuels, dans 94 départements (Hexagone et Outre-Mer).
Nous appelons à notre tour à toutes les générosités, pour permettre aux épiceries solidaires de continuer à garantir une alimentation digne et durable, ainsi qu'un accompagnement social de qualité pour l’ensemble de nos bénéficiaires. Votre soutien peut faire la différence. Pour nous aider, contactez-nous ou rendez-vous sur la page Hello Asso de notre association. Merci de votre précieuse contribution !
Yann Auger, directeur général d'ANDES
