L’investissement à impact en France : de quoi parle-t-on ?
Les investisseurs, même les plus traditionnels, cherchent de plus en plus à intégrer des critères sociaux et environnementaux dans leurs activités financières. C’est dans ce contexte que les notions d’investissement et de fonds à impact émergent. Si ces termes sont utilisés dans le langage courant pour caractériser des investisseurs en quête d’impact, leurs champs d’action et leurs définitions restent encore sujets à débat. Décryptage.
Qu’est-ce que l’investissement à impact ?
Perspectives historiques
Le terme d’investissement à impact (« impact investing ») vient des États-Unis et a été utilisé pour la première fois en 2007 lors d’un évènement organisé par la Fondation Rockefeller. Le mouvement se structure par la suite en 2008 autour de la création du Global Impact Investing Network (GIIN) dont la mission est de développer le secteur au niveau international.
Définition et grands principes
L’investissement à impact est défini par le GIIN comme un investissement « réalisé avec l’intention de générer un retour positif, ayant un impact social et environnemental mesurable, tout en assurant un rendement financier ».
Ainsi, on considère comme investissement à impact l’utilisation de tous types d’outils financiers répondant à ces critères :
- L’intentionnalité : la recherche explicite d’un impact social ou environnemental positif ;
- L’additionnalité : l’engagement et la contribution (financière ou extra-financière) de l’investisseur permettant à l’entreprise bénéficiaire des fonds de maximiser son impact social ou environnemental ;
- La mesurabilité : la mesure de l’impact reposant sur la mise en place d’objectifs sociaux ou environnementaux, un suivi des résultats et un processus continu d’évaluation.
Généralement, l’investissement à impact se traduit par des investissements à moyen ou long terme.
Si ces grands principes font consensus dans la communauté des acteurs de l’investissement à impact en France, les types d’investissement et les outils financiers y appartenant ainsi que la mesure de l’impact social font toujours débat et constituent un enjeu important du secteur.
L’investissement à impact en chiffres
Aujourd’hui, le secteur de l’investissement à impact est davantage présent dans le continent nord-américain, les États-Unis et le Canada gérant à eux deux 58 % des actifs mondiaux (GIIN, Sizing the Impact Investing Market, 2019).
En revanche, le secteur s’impose au sein des marchés européens, notamment en France où le contexte est de plus en plus favorable au développement de l’investissement à impact.
Le secteur de l’investissement à impact en France représente 4 366 millions d’euros d’encours avec un taux de croissance de 9 % en 2019. Cette même année, ce sont 1 885 millions d’euros qui ont été investis dont 457 millions ont été dirigé vers la France et l’Europe et 1 428 millions vers les pays en voie de développement (Impact Invest Lab, État des lieux du marché français de l’investissement à impact, 2020).
L’investissement à impact : pour qui et par qui ?
Les structures financées
Les structures financées par les investisseurs à impact sont des organisations générant un fort impact social ou environnemental et dont la recherche de celui-ci est un objectif prioritaire, au cœur de la stratégie de la structure.
Ainsi, si en France la Loi relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) de juillet 2014 donne une dimension spécifique à l’investissement à impact, les organisations pouvant en bénéficier ne se limitent pas aux entreprises de l’ESS. En effet, certains investisseurs ou fonds à impact social acceptent également des entreprises commerciales hors statut ESS.
Les outils et les acteurs de l’investissement à impact
Dans les faits, les investissements à impact peuvent prendre la forme d’apports en fonds propres (investissements au capital, fonds associatifs, etc.) ou en dette (obligations, contrats à impact social (CIS), crowdlending, etc.).
Ces outils financiers sont gérés à 49 % par des investisseurs entièrement dédiés à l’impact (fonds à impact), mais également par des sociétés de gestion généralistes, des banques privées ou publiques, des fondations, des plateformes de crowdfunding, etc. (iiLab, 2020).
Parmi les investisseurs à impact en France, on peut retrouver notamment Amundi Asset Management, Mirova, Raise, Esfin Gestion, BNP Paribas Asset Management ou Inco.
Finansol, l’iiLab (fusion en cours entre ces organismes) et Novethic (filiale du Groupe Caisse des Dépôts) sont également des acteurs clés en tant qu’experts de la finance éthique.
Les fonds à impact
En parallèle de l’essor de l’investissement à impact en France et dans le monde, des fonds d’investissement entièrement dédiés à l'impact ont vu le jour et se sont développés.
Ces fonds à impact ont pour objet d’investir les liquidités de leurs clients (entreprises, banques, organismes publics, etc.) dans des projets à fort impact social ou environnemental, suivant les principes de l’investissement à impact.
Cette rapide croissance du secteur a rendu plus difficile la lisibilité des différents fonds à impact pour les porteurs de projets. Toutefois, certains facteurs permettent aux structures souhaitant se faire financer de s’orienter vers certains types de fonds :
- La maturité du projet : trouver son fonds à impact dépend du stade de maturité de son projet. Que l’on soit en période de levée de fonds, pour l’amorçage ou le changement d’échelle, les acteurs ne seront pas toujours les mêmes.
- Le secteur d’activité : si certains fonds sont généralistes, d’autres se spécialisent et accompagnent souvent les entrepreneurs en apportant une expertise sectorielle et en ouvrant leur réseau.
- Autres : ticket moyen d’investissement, statut, etc.
Les enjeux de l’investissement à impact aujourd’hui
Une définition qui fait encore débat
L’un des défis majeurs de l’investissement à impact aujourd’hui est l’absence de consensus sur son champ d’application. En effet, certains acteurs comme le GIIN ou Novethic incluent dans l’investissement à impact les investissements socialement responsables (ISR) ou solidaires ainsi que des investissements vers des entreprises cotées en bourse. À l’inverse, des acteurs comme Raise Impact différencient bien ces types d’investissements.
Ainsi, pour une meilleure lisibilité, ce secteur émergeant qu’est l’investissement à impact a encore besoin de clarifier et d’uniformiser ses grands principes et ses pratiques.
La mesure et l’évaluation continue de l’impact social
Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de référentiel commun pour la mesure de l’impact social ou environnemental dans le secteur de l’investissement à impact.
Nombre de fonds à impact ou d’investisseurs développent leurs propres indicateurs d’évaluation, ce qui provoque un risque important d’impact washing, le plus grand enjeu du secteur d’après les investisseurs à impact (GIIN, 2020 Annual Impact Investor Survey, 2020). Il existe donc un fort enjeu d’échange et de montée en compétence du secteur sur les méthodes et les indicateurs d’évaluation de l’impact social.
Pour aller plus loin
>> Découvrez l’état des lieux du marché français de l’investissement à impact réalisé par l’iiLab >> Découvrez la liste des fonds à impact recensés par Paris Impact Investing >> Découvrez l’annuaire de la Commission à Impact de France Invest >> Découvrez l’article de CareNews présentant le Top 10 des fonds à impact
>> Pour en savoir plus sur le financement des entreprises de l’ESS, découvrez l’onglet de l’Avise, Se faire financer