5 dates qui ont marqué le mentorat

Qu’est-ce que le mentorat ? 

Le mentorat est un dispositif visant à lutter contre le déterminisme social et les inégalités sociales, économiques, territoriales ou scolaires. Défini par l’Union européenne, il ne doit pas être confondu avec du sponsoring ou du tutorat, comme le rappelle Ericka Cogne, directrice générale de Télémaque :

[Le mentorat est] une relation interpersonnelle, bénévole, sur le moyen-long terme (au moins six mois), entre un jeune et un mentor, encadrée par une structure professionnelle. 

Le mentorat a toujours existé

Créée en 2005, Télémaque est l’une des associations qui ont fait du mentorat un véritable outil pour favoriser l’égalité des chances. Elle tire son nom du fils d’Ulysse qui a grandi et s’est développé grâce au soutien d’un sage conseiller : Mentor. Tiré de la mythologie grecque, le nom de l’association montre bien que le mentorat est « vieux comme le monde », considère Benjamin Blavier, coprésident de l’association Article 1. « Si on regarde les grandes figures de réussite, elles sont très nombreuses à pouvoir raconter une histoire de mentorat. »

Été 2005 : le mentorat en entreprise s’organise

Si le mentorat ne date pas d’hier, le cofondateur d’Article 1 identifie cependant « deux éléments fondateurs » qui ont permis au mentorat et aux associations qui le portent de se structurer : 

• Début des années 2000 lorsque Sciences Po et l’ESSEC se sont saisies de la question de l’ouverture sociale dans l’enseignement supérieur. En 2002, l’ESSEC lançait par exemple le dispositif « Une grande école, pourquoi pas moi ? » pour accompagner les lycéens dans leur orientation.
• La création de la Charte de la diversité en 2004. Initiée par l’Institut Montaigne lors de la publication de son rapport « Les oubliés de l’égalité des chances », elle vise à embarquer les entreprises signataires dans la promotion de l’égalité des chances dans l’accès à l’emploi. « C’est la première fois que les entreprises ont rompu avec une situation de déni sur les discriminations et qu’elles ont décidé de faire quelque chose pour les jeunes des quartiers », précise-t-il. 

Benjamin Blavier date ainsi l’essor du mentorat en entreprise durant l’été 2005. À la veille des révoltes des banlieues, « tout le monde sentait bien qu’il y avait un moment de tension ».

C’est comme cela que sont nés les dispositifs de mentorat. Les entreprises ont pris conscience qu’elles pouvaient faire quelque chose et apporter à ces jeunes des éléments de réseaux, d’informations ou encore de confiance en soi que l’école ne pouvait pas apporter.

17 mai 2018 : les associations interpellent le président 

Il faudra attendre quelques années avant que les associations de mentorat se rassemblent pour porter leur voix. Parrainage, tutorat, bénévolat… jusqu’ici, chaque structure avait son « vocable ». Le 17 mai 2018, neuf structures – dont Article 1 – décident d’écrire une lettre au président de la République. Il s’agit de la première prise de parole collective sur ce sujet. Dans cette lettre, elles ont appelé le gouvernement à mettre en œuvre « une grande initiative autour du mentorat » : 

Notre expérience de terrain nous démontre quotidiennement la force de cette action. Il y a pour autant des conditions à la réussite des relations de mentorat : il faut y être invité, il faut y être formé, il faut y être employé selon ses talents et aspirations, il faut également être suivi et accompagné. Surtout, pour massifier le mentorat (seule façon de pouvoir réellement peser pour réduire les inégalités), il nous faut créer les conditions systémiques de reconnaissance des compétences développées par le mentorat : que ce soit au lycée, à l’université, dans le monde professionnel. (...) Vous pouvez lui donner un élan et une ampleur qui contribuera à transformer la culture de notre pays tout en contribuant au développement des territoires qui en ont le plus besoin.

Septembre 2019 : création du Collectif Mentorat

Pour porter davantage leurs valeurs et revendications, huit associations décident de s’unir et de créer, en septembre 2019, le Collectif Mentorat. L’objectif ? Développer cet outil et mener une action de plaidoyer pour qu’il soit au cœur des politiques publiques. Trois ans plus tard, le collectif compte 64 associations, aussi bien dans le domaine de l’orientation, de l’insertion professionnelle, de l’entrepreneuriat, de l’accompagnement scolaire ou de l’ouverture socio-culturelle. 

Mars 2021 : lancement d’« 1 jeune, 1 mentor »

Les pouvoirs publics interpellés, le collectif créé, il s’agissait désormais de mettre en œuvre une véritable politique publique pour dynamiser ce dispositif. Poussé par les associations de terrain, le gouvernement annonce ainsi le lancement, le 1er mars 2021, d’« 1 jeune, 1 mentor ». Soutenu par l’Éducation nationale et le ministère du Travail, notamment Thibaut Guilluy, à l’époque Haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, ce dispositif prévoit 30 millions d’euros pour passer de 25 000 binômes accompagnés à 100 000 en 2021 – et le double d’ici la fin de l’année scolaire 2023. Toujours dans une volonté de développer le mentorat, une plateforme pour mettre en relation des mentors et des jeunes a été lancée deux mois plus tard.

Pour le coprésident d’Article 1, ceci est la preuve de la force du collectif : 

C’est intéressant pour le monde de l’ESS. On a réussi à porter notre message lorsque nous nous sommes mis en collectif. Lorsque nous y allions chacun dans notre coin, cela ne marchait pas et lorsque nous avons parlé d’une seule voix, les pouvoir publics se sont dits qu’il se passait quelque chose.

Lisa Domergue