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Par Carenews INFO - Publié le 8 décembre 2021 - 16:00 - Mise à jour le 8 décembre 2021 - 16:00 - Ecrit par : Lisa Domergue
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Journée mondiale du climat : Bastua Soimadoune, « militante pour l’écologie populaire »

À l’occasion de la Journée mondiale du climat, Carenews a rencontré Bastua Soimadoune. Elle défend une écologie loin des clichés et qui doit intégrer toute la population, notamment les quartiers populaires. Portrait.

Bastua Soimadoune est consultante RSE, journaliste et militante. Crédit photo : Bastua Soimadoune.
Bastua Soimadoune est consultante RSE, journaliste et militante. Crédit photo : Bastua Soimadoune.

 

À 28 ans, Bastua Soimadoune se décrit, sur ses réseaux sociaux, comme une « militante pour l’écologie populaire, sociale, solidaire et décoloniale ». Nous la retrouvons dans un café dans le XIe arrondissement de Paris. Consultante RSE à son compte, elle est également journaliste : 

Si je venais à faire des bilans carbone toute la journée cela ne me conviendrait pas. J’ai besoin de cette fibre sociale que je trouve dans le média dans lequel je travaille. C’est comme cela que j’ai réussi à trouver un équilibre. 

Consultante, journaliste, mais également militante. Un militantisme a plusieurs casquettes. 

Un militantisme initialement porté sur les questions sociales

Bastua Soimadoune est originaire de Mayotte, une île située dans l’archipel des Comores. C’est le département le plus pauvre de France, selon un article de l’Observatoire des inégalités publié en juin dernier. La proximité du département français avec les Comores explique un flux de personnes immigrées arrivant à Mayotte : « Souvent, les familles sont ramenées sur leur île d’origine, mais pas les enfants. » Il y a donc à Mayotte de nombreux enfants des rues. C’est pour cette cause que Bastua, à l’époque lycéenne, s’est engagée pour la première fois, aux côtés de la Croix-Rouge française. 

Après le baccalauréat, elle part en Métropole pour étudier la philosophie à Lyon. « Un choc » pour la jeune étudiante qui se retrouve confrontée à « une violence sociale » face aux écarts de richesse beaucoup plus forts que sur son île d’origine. En arrivant en France métropolitaine, son engagement se structure davantage sur les questions identitaires : « Je m’interrogeais sur le fait d’être noire. À Mayotte, j’étais noire parmi les noirs. En France c’était différent, tu deviens noire en minorité parmi les blancs. » 

« L’écologie était un concept de bourgeois qui me saoulait »

C’est quelques années plus tard que Bastua s'intéresse aux problématiques environnementales : 

Avant, l’écologie m’énervait. Je considérais cela comme un concept de bourgeois qui me saoulait.

Ce qui la dérangeait chez les « écolos », c’est, notamment, une attitude parfois « moralisatrice » qui « ne remet jamais en question le système lui-même »

C’est lors de son stage au sein du Partenariat Français pour l’Eau qu’elle prend conscience des effets des changements climatiques et de leur imbrication avec les problématiques sociales et sociétales qu’elle défend depuis déjà plusieurs années. Et pour cause, les premiers effets des changements climatiques et notamment la montée des eaux se font sentir en premier lieu sur les îles : « Les centimètres augmentent. Ce n’était plus possible de se dire que c’était un truc de bobo. Préserver l’environnement devenait un vrai sujet. »

Ne pas devenir une caricature de l’écolo

Bastua commence alors à s'intéresser à ces sujets en se promettant cependant de ne jamais devenir « extrémiste », ni « moralisatrice ». Elle considère en effet qu’elle est entrée dans le militantisme écologique par la porte des enjeux sociaux. 

C’est donc important pour elle de faire le pont entre les problématiques sociales et environnementales auquel cas « beaucoup de personnes ne s’y intéressent pas ». L’impact est plus important si tout le monde mange de la viande une à deux fois par semaine plutôt que « 50 vegans à fond dedans », résume-t-elle. 

Un pas dans la politique

Dans la construction de son engagement pour le climat, elle rejoint la Commission nationale quartiers populaires de EELV lorsqu’elle déménage en Île-de-France. L’objet de cette commission est de faire en sorte que les habitants des quartiers proposent « leurs propres réponses à leurs problématiques ». En d’autres termes, qu’ils participent aux prises de décisions.

Une expérience qui lui a permis de découvrir le fonctionnement des institutions politiques mais qu’elle décide de quitter quelques années plus tard. « J’ai dû faire beaucoup de plaidoyer en interne pour expliquer que le sujet des quartiers populaires est important. » Une énergie qu’elle a souhaité mettre dans des « actions plus directes ».

Lorsqu’on lui demande si cette expérience l’a écoeuré de la politique, elle répond sans hésiter qu’elle y croit encore : « C’est la politique qui a réellement le pouvoir. Il faut juste qu’on fonctionne autrement. »

L’importance d’une écologie populaire

Mais le militantisme de Bastua ne s’arrête pas avec EELV. Après son départ, elle s’engage dans de nombreuses associations et, entre autres, la Fresque du Climat, une association qui a mis en place des outils pédagogiques pour mieux comprendre les enjeux des changements climatiques. Elle y a animé certains ateliers avec la volonté de sensibiliser aux enjeux environnementaux des gens « comme elle », qui viennent des quartiers populaires.

Car la jeune militante pointe du doigt un problème structurel de la société : beaucoup de personnes et les « écolos » les premiers, entretiennent de nombreux préjugés quant au rapport des habitants des quartiers populaires avec les enjeux environnementaux, persuadés qu’ils « ne se sentent pas concernés par l’écologie ». « Est-ce qu’on a fait l’effort de parler aux habitants des quartiers populaires ou est-ce qu’on en a directement conclu que s’il n’utilise pas le hashtag “écolo”, c’est qu’il ne le sont pas ? », questionne-t-elle. 

Le système doit être représentatif

Bastua défend ainsi la nécessité d’un système réellement représentatif, loin des mots-valises tel que « justice climatique », qui n’ont plus aucun sens . Un système où les décisions seraient prises par et pour tous. À l’instar de la COP26, sommet international durant lequel « des grandes décisions pour notre avenir ont été prises sans nous ». Si Bastua est pessimiste quant à notre avenir proche, elle soulève des initiatives encourageantes démontrant que les choses peuvent changer. C’est le cas de la Convention citoyenne pour le climat, dont elle trouve le principe « génial » même s’il n’a pas rencontré le succès escompté : 

Cela a prouvé que l’environnement n’est pas une histoire d’experts ou d’élus, c’est une histoire d’accès à l’information. Cela nous a montré que l’on a pas besoin d’être dans un parti politique pour proposer des choses. Il faudrait seulement qu’on soit nombreux, qu’on s’organise, qu’on trouve un maximum d’informations et là, on pourrait faire un contre-pouvoir !

 

Lisa Domergue 

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