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Par Carenews INFO - Publié le 22 octobre 2024 - 09:00 - Mise à jour le 22 octobre 2024 - 09:00
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« Le sport doit faire sa part dans la transition écologique », entretien avec Julien Pierre (Fair Play for Planet)

Il y a quatre ans, Julien Pierre, ancien joueur de rugby international, a fondé Fair Play for Planet, un label écoresponsable pour évaluer la démarche écologique et sociale des acteurs sportifs.

Julien Pierre a fondé le label Fair Play for Planet en 2020. Crédit : Marie Monteil.
Julien Pierre a fondé le label Fair Play for Planet en 2020. Crédit : Marie Monteil.

 

Après sa carrière de rugbyman – il a notamment été sélectionné en équipe de France –, Julien Pierre a obtenu un master en responsabilité sociétale des entreprises (RSE). En novembre 2020, il a fondé Fair Play for Planet, un label qui évalue la démarche de transition écologique et sociale des clubs, structures et événements sportifs. Son entreprise de cinq salariés est agréée entreprise solidaire d’utilité sociale (Esus). Entretien avec un optimiste qui veut que le monde du sport s’engage.

 

  • Après un été animé par les Jeux olympiques et paralympiques de Paris, qui se réclamaient écologiques et inclusifs, c’est la reprise des compétitions sportives. Constatez-vous une dynamique en faveur de la transition écologique et sociale dans le monde du sport ?

 

Il n’y a pas eu un « effet JO » concernant le nombre de candidatures à notre label, mais la dynamique est lancée. Les Jeux de Paris 2024 ont participé à la prise de conscience collective. Il y aura un héritage derrière et nous voulons nous inscrire dans cet héritage. Les Jeux olympiques d’hiver des Alpes 2030 sont un objectif pour nous. Le sport ne sera plus le même : il sera durable, désirable. Je suis optimiste.

 

Les Jeux de Paris 2024 ont participé à la prise de conscience collective.

 

  • C’est avec cet espoir que vous avez fondé le label Fair Play for Planet ?

 

En tant que joueur, j’étais déjà très engagé sur les sujets environnementaux. J’ai grandi dans un parc animalier dont mon grand-père était le directeur. Pendant ma carrière sportive, en 2013, j’ai créé Play for Nature, une fondation pour la protection de l’environnement et des espèces menacées. C’était mon jardin secret, j’en parlais très peu – peut-être que je ne me sentais pas légitime. Quand j’ai arrêté de jouer au rugby, en 2018, j’ai voulu lier sport et environnement. Le sport est très engagé sur les sujets sociétaux, il a une place prépondérante et une voix qui porte dans la société. Il est très ancré dans tous les territoires. Il doit faire sa part dans la transition écologique, il doit s’engager.

 

  • Comment le sport peut-il montrer l’exemple ?

 

Le sport n’est pas le secteur qui a le plus d’impact sur le réchauffement climatique mais c’est un secteur d’influence extrêmement puissant donc il doit s’engager. Si demain, les sportifs, les clubs, les instances prennent ces sujets à bras le corps, nous allons influencer des millions de personnes. Le sport professionnel a son devoir d’exemplarité et le sport amateur a son rôle pédagogique de sensibilisation. C’est pour ça qu’il faut jouer sur les deux leviers pour mener une vraie transition. Montrer l’exemple, éduquer les jeunes, et cela va faire boule de neige. Je rêve que, demain, un sportif choisisse son club ou son événement non pas pour le classement ou l’aspect financier mais pour sa démarche éco-responsable.

 

Si demain, les sportifs, les clubs, les instances prennent ces sujets à bras le corps, nous allons influencer des millions de personnes.

 

  • Il existe déjà de nombreuses certifications écoresponsables. Le label Fair Play for Planet apporte quoi de plus ?

 

Quand j’ai arrêté ma carrière sportive, en 2018, pendant deux ans, j’étais en charge de la politique RSE de la Section paloise. J’ai pu tester beaucoup de choses. En parallèle, j’ai repris mes études à la Toulouse Business School, dans un master de RSE. Mon mémoire portait sur la création d’un label environnemental pour les organisations sportives. J’ai pu voir ce qu’il était possible de faire dans un club et pourquoi le monde du sport ne s’était pas approprié les outils de mesures d’impact, les certifications, les normes etc. En fait, ce n’était pas adapté, tout simplement. Plein d’outils existent mais ils sont spécifiques à une discipline. Nous, nous essayons de créer un outil qui soit universellement applicable au monde du sport, à tous les niveaux, pour les établissements, les événements, les clubs amateurs et professionnels.

Nous avons créé ce référentiel avec l’Ademe. Ce sont 18 thèmes, 350 critères, sous forme d’un questionnaire. Une fois que nous avons analysé cette première évaluation, nous venons faire un diagnostic sur site pour voir si cela correspond. Selon la note obtenue, nous attribuons ou non le label [d’une à trois étoiles, NDLR]. Nous faisons un état des lieux global : les points forts, les points faibles et des pistes d’amélioration pour aller plus loin.

 

  • Quels acteurs sportifs sont labellisés par Fair Play for Planet ?

 

La Section paloise [son dernier club en carrière, de 2015 à 2018, NDLR] a été le premier club à s’engager. Mon premier objectif était de ne pas m’enfermer dans le monde du rugby. L’enjeu, c’était de parler à tous les sports et tous les niveaux. Nous avons réussi à le faire. Je pense que tout le monde doit prendre sa part, que les bonnes idées se partagent. Ce qui se fait dans un club de ski à Chamonix peut être dupliqué dans un club de rugby à Plabennec, de handball à Angers ou de hockey sur glace à Lille.

Aucune structure n’a obtenu trois étoiles dans le cadre de notre label, deux seulement ont deux étoiles et toutes les autres une étoile. Nous, nous sommes un label de progrès. L’idée, c’est qu’au prochain classement, en 2025, plus de structures obtiennent deux étoiles et que certaines aillent jusqu’à trois étoiles.

Il y a un enjeu d’image. Comme tous les acteurs, le monde sportif va devoir montrer patte blanche sur ce qu’il fait en matière d’environnement. Des clubs ont signé des partenariats parce qu’ils étaient engagés avec nous, par exemple le club de rugby de Brive avec Veolia. Aux Sables d’Olonne et à Chamonix, le label a permis à des équipes amatrices de trouver des bénévoles, qui étaient davantage prêts à s’investir pour un club qui impliqué dans une démarche écologique et sociale.

Par ailleurs, Fair Play for Planet vient de contractualiser avec l’ensemble de la Ligue Magnus, qui rassemble douze clubs de hockey sur glace. C’est le partenaire-titre, Synerglace, qui a souhaité donner du sens à son partenariat avec la ligue, en demandant à tous les clubs d’engager une démarche RSE et en finançant leur labellisation. De la même manière, de plus en plus de partenaires mettent les critères RSE dans leurs conditions de partenariat.

 

Comme tous les acteurs, le monde sportif va devoir montrer patte blanche sur ce qu’il fait en matière d’environnement.

 

  • Après quatre ans d’existence, quels sont les objectifs de votre entreprise agréée Esus ?

 

Les sujets sont longs à mûrir mais c’est clairement en train de bouger. Nous voyons toutes les graines que nous avons semées. Nous avons réussi à faire bouger les lignes. Quand nous nous sommes lancés, nous avons créé quelque chose qui n’existait pas, donc ce n’était pas évident. Aujourd’hui, nous sommes une équipe de cinq personnes.

L’agrément Esus est important parce qu’il correspond à ce que nous voulons défendre. Nous nous sommes longtemps posé la question du choix entre société à mission ou entreprise de l’ESS. Nous défendons un modèle durable, écoresponsable et c’était important de pouvoir appliquer ces valeurs à l’entreprise. Dans nos statuts, il y a un comité d’éthique, un comité consultatif avec des salariés que nous réunissons une fois par an, des obligations d’équité de salaires… C’est important d’inscrire cela dans le marbre pour que cela corresponde à ce que nous voulons faire.

En tout, nous avoisinons les 60-70 structures labellisées et en cours de labellisation. L’objectif est une centaine d’ici la fin de l’année 2024 ou le début d’année 2025. Nous commençons à travailler avec des collectivités qui engagent l’ensemble des clubs de leur territoire. Nous sommes également en discussion avec des marques qui veulent engager 10, 20, 30 clubs : des équipementiers, des mutuelles, des assurances... Il y a quelques années, les partenaires finançaient une action ou une autre. Maintenant, ils mettent leur nom, mais veulent que la RSE soit mesurée.

Nous avançons, nous arrivons à convaincre des marques. Nous sommes identifiés comme un acteur de référence de cette transformation du sport en accompagnant les acteurs du sport dans la transition, en valorisant cette transition avec le label, en amenant des indicateurs pour les partenaires financiers. Je suis fier de ce que nous avons réussi à créer.

 

Propos recueillis par Thibault Le Besne 

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