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Par Carenews PRO - Publié le 31 mars 2022 - 12:00 - Mise à jour le 31 mars 2022 - 13:05 - Ecrit par : Christina Diego
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Didier Fusillier (La Villette) : « Une même politique culturelle, lisse, uniforme serait illusoire »

Rencontre avec Didier Fusillier, président de l'établissement public du Parc et de la Grande Halle de la Villette. Un entretien pour évoquer la place de la culture dans les débats de la campagne présidentielle.

Didier Fusillier répond à nos questions sur la place de la culture dans la présidentielle. Crédit : Nicolas Krief
Didier Fusillier répond à nos questions sur la place de la culture dans la présidentielle. Crédit : Nicolas Krief

 

  • La culture n’est pas sur le devant de la scène en cette campagne électorale. Étonnant ? 

 

C'est le cas dans toutes les campagnes électorales. Je ne trouve pas qu'elle soit vraiment absente. Le fait de dire qu’elle est absente, d'ailleurs, fait parler d’elle. Il y a donc un fort intérêt dans la presse pour le sujet. Rappelons-nous que pendant la Covid-19, la culture était souvent au centre des débats.

Je trouve que des initiatives sont prises pour parler de la culture. Certains candidat.e.s ont des propositions très concrètes, d’un côté nous avons la défense du patrimoine et de l’autre l’innovation. C’est très classique comme prise en compte de la culture, mais les thèmes sont posés. 

 

  • Quels sont les enjeux ? 

La particularité en France, c'est le fait que les financements soient croisés. À l'époque de Malraux, c'était l'État régalien qui s’occupait de la culture. Dans Les Maisons de la culture de l’époque, l'État voulait être présent en province. Les grandes villes accueillaient les spectacles venus de Paris.

Aujourd'hui, une même politique culturelle, lisse, uniforme, partout, serait illusoire. Avec les Micro-Folies, par exemple, nous avons fait l’inverse. Des artistes qui ne sont pas à Paris peuvent présenter leurs œuvres dans les territoires, voire à l’international. L'objectif est d’avoir une ligne forte, présente dans les communes, pour qu’elles aient leurs propres actions et proposent des choses nouvelles, dans leurs territoires, connectés à d’autres. 

La culture s'exprime où on vit. Actuellement, nous assistons à une explosion de la culture partout, sur les réseaux, sur internet, les plateformes, la question de la Metaverse va se poser… Après, nous avons déjà vécu ce genre d’évolution technologique. Je me souviens, il y a six ans, on parlait de la révolution des lunettes 3D, et au final, elle n’a pas eu lieu. 

Ce qui me semble important, c'est la permanence d'une culture accessible à toutes et tous, près de chez soi. Nous avons besoin d’une culture de proximité, de structures qui économiquement puissent accueillir 1 000 personnes ou moins, et pas forcément 5 000 personnes. C’est essentiel pour de jeunes rappeurs, par exemple, qu’ils puissent proposer leur art où ils veulent. 

 

  • De quoi a besoin le monde culturel ? 

 

Bien entendu, il est important de parler et de défendre le budget pour le monde culturel. La ministre a su protéger les artistes pendant la crise sanitaire, et aussi développer des structures, des théâtres ont été rénovés grâce à l’Etat. 

Nous avons besoin aussi de nous retrouver dans le vivre ensemble et revenir à l'échelle de son quartier. Ce sont des enjeux plus pragmatiques. La culture, par ses contenus, donne accès au bonheur, suscite l’émerveillement. Elle doit avoir à cœur de donner envie d’aller plus loin que l'œuvre que l’on voit. C’est très important notamment au niveau des collèges, des lycées ou dans les écoles. Et la médiation me paraît être une approche essentielle.

C’est bien beau de dire que tout le monde peut aller au musée, mais concrètement comment fait-on pour rendre accessibles les œuvres ? Le problème n'est pas tant de passer la porte d’un musée ou d’aller au théâtre, mais d’avoir des personnes qui donnent les clés de la compréhension des œuvres. C'est très important. La médiation peut déclencher des choses. Cette médiation existe déjà, à travers les artistes. 

Je pense qu’il est nécessaire d’avoir un grand plan de médiation global, dans les villes et les villages. C’est un énorme chantier.

 

  • Un mot sur le mécénat culturel. Où en est-on aujourd’hui ? 

Le mécénat culturel est essentiel. Cela permet l’irruption d’un projet artistique dans l’entreprise mécène. 

Souvent, ce sont des artistes, des designers ou cuisiniers qui amènent une certaine fraîcheur pour le personnel de l’entreprise. J’ai déjà vu des dirigeants organiser une soirée spéciale avec leurs salariés pour leur présenter des œuvres artistiques. Cela peut déclencher chez le personnel une magie, une envie de revenir plus tard, avec leurs proches découvrir d’autres projets artistiques.

C’est vraiment ce mélange du monde rationnel et artistique qui est intéressant. C’est la mission de la culture, ce mélange entre l'extraordinaire et l'ordinaire. 

En France, nous sommes très cloisonnés avec le domaine de la danse, la peinture, la musique. Dans les pays anglophones, c’est plus mélangé, ils appellent cela le living art.

Aujourd'hui, nous sommes dans un monde de mélange, de mobilité. Il faut à tout prix permettre le choc d'être confronté à quelque chose que l’on ne connaît pas. Sans savoir ce que cela va déclencher en soi. C’est très important pour se sentir bien dans le monde où l’on vit.

 

Christina Diego 

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