Aller au contenu principal
Par Carenews PRO - Publié le 3 mars 2023 - 15:00 - Mise à jour le 9 mars 2023 - 15:35 - Ecrit par : Lisa Domergue
Recevoir les news Tous les articles de l'acteur

Entreprise à mission : comment bien préparer son évaluation externe par un OTI ?

Près de quatre ans après la promulgation de la loi PACTE, les premières entreprises ayant adopté la qualité d’entreprise à mission doivent réaliser leur évaluation externe par un organisme tiers indépendant (OTI). Témoignages croisés de Camif et du cabinet d’audit Groupe Y Nexia.

Crédit photo : iStock.
Crédit photo : iStock.

 

Récemment, le cap des 1 000 entreprises à mission a été dépassé ! Quatre ans après la promulgation de la loi PACTE qui introduit cette qualité juridique, il est désormais venu le temps des évaluations externes de ces entreprises pionnières. En effet, respectent-elles bien leurs objectifs environnementaux et sociaux fixés ? 

Celle de Camif, l’une des premières entreprises à avoir adopté la qualité d’entreprise à mission, a eu lieu en avril 2022. Cet audit externe a été réalisé par le Groupe Y. Leur point commun ? Elles sont toutes les deux basées à Niort en Nouvelle-Aquitaine. 

Qu’est-ce qu’une évaluation externe par un OTI ?

Depuis la promulgation de la loi PACTE, les entreprises peuvent donc attester juridiquement de leurs engagements en adoptant la qualité d’entreprise à mission. Danone, La Poste, Doctolib ou encore Camif… elles ont inscrit une raison d’être dans leurs statuts, accompagnée d’objectifs environnementaux et sociaux statutaires. Pour éviter le « mission washing », deux garde-fous ont été prévus par la loi : le comité de mission chargé du suivi en interne et l’évaluation externe par un OTI, un organisme tiers-indépendant pouvant donner lieu à une révocation de la qualité.

Camif, raison d’être et objectifs 

La raison d’être de Camif est de « proposer des produits et services pour la maison au bénéfice de l’Homme et de la planète. Mobiliser notre écosystème, collaborer et agir pour inventer de nouveaux modèles de consommation, de production et d’organisation. » 

Elle est accompagnée de cinq objectifs statutaires :

-Informer, sensibiliser et donner les moyens pour une consommation responsable

- Dynamiser l’emploi sur nos territoires et favoriser l’insertion

- Faire de l’économie circulaire notre standard

- Proposer les meilleurs produits possibles pour la santé

- Transformer l’entreprise et participer à la réinvention de nos filières

 

Le premier contrôle externe d’une société à mission est prévu 18 mois après pour les entreprises de plus de 50 salariés et 24 mois pour celles de moins de 50 salariés. « Il est impératif que l’évaluation se déroule avant cette deadline-là, même si le rapport peut être publié un peu après », explique Audrey Souquet, juriste chez le Groupe Y. Pour devenir OTI, l’organisme doit être conforme à la norme ISO 17029 et ensuite être accrédité par la COFRAC, le comité français d’accréditation.

Une évaluation externe en deux temps

Globalement, l’évaluation externe de Camif s’est déroulée sur deux semaines avec deux principaux temps : l’évaluation de la « cohérence d’ensemble » et la vérification des objectifs. 

Pour la première partie, le Groupe Y a pu s’appuyer sur une « grille décisionnelle » réalisée par la Communauté des Entreprises à Mission. L’objectif est d’évaluer « l'imbrication de la raison d'être avec les objectifs, la pertinence du sujet vis-à-vis du secteur d'activité, de l'implication du comité de mission et la diffusion de la mission sur l'entreprise », détaille Audrey Souquet. 

Dans un second temps, l’OTI a organisé des rencontres avec différents référents pour échanger sur les dispositifs mis en place dans le but d’atteindre les objectifs fixés, mais aussi étudier les indicateurs assignés à ces objectifs. 

Des outils communs pour l’évaluation

Camif étant l’une des premières entreprises à avoir adopté la qualité, Camif et le Groupe Y furent parmi les premiers à passer l’épreuve de l’audit externe. « On a ouvert le bal, on n’avait pas encore tous les outils qui ont pu être développés après », témoigne la juriste. C’est pourquoi ils ont décidé de faire un premier audit à blanc, l’occasion de tester les différents outils d’évaluation. 

L’audit repose sur un « mix » entre une méthodologie imposée par la loi PACTE et « ses décrets d’application », et des outils d’évaluation propres à l’OTI. Progressivement, de nouveaux outils ont été mis en place, comme un avis de la CNCC (Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes) publié en janvier 2022 : « Il nous a permis de revoir le degré de précision de nos outils. » La Communauté des Entreprises à Mission a également publié un guide destiné aux OTI et une grille d’évaluation.

Objectifs atteints, non atteints, ou impossibilité de conclure ?

Une fois l’évaluation réalisée, un rapport est remis par l’organisme certificateur. Objectif par objectif, l’OTI indique s’ils ont été « atteints », « non atteints » ou dans « l’impossibilité de conclure ». Mais ce rapport est « très binaire » : « Il est normé, réglementé, avec un arbre de décision pour conclure. Nous n’avons pas de liberté de plume. Cela peut être frustrant parfois parce qu'il suffit qu'un seul objectif opérationnel ne soit pas atteint pour être en impossibilité de conclure pour l'objectif statutaire », nuance toutefois Audrey Souquet.  

C’est pourquoi le temps de restitution entre l’OTI et l’entreprise est précieux et permet d’émettre des recommandations, comme l’explique Kelly Tinchon, manager de la mission de Camif : « Le Groupe Y nous a par exemple conseillé de réduire nos indicateurs pour le prochain audit afin que l’on puisse aller plus dans le détail et mieux définir leur méthodologie de calcul. »

Dans le cas ou l’évaluation externe n’est pas concluante, l’OTI peut-il révoquer la qualité d’entreprise à mission ? « Ce n’est pas de notre ressort, mais celui de toute partie intéressée qui veut aller devant le tribunal de commerce déposer une requête estimant que la société n’a pas à avoir la qualité. Le rapport peut être un outil pour argumenter en cette faveur-là », précise la juriste du Groupe Y.

Une coconstruction entre l’OTI et le comité de mission

Conclusion émise par le Groupe Y pour Camif : « Ce fût le premier dossier important et un très bon élève » : 

C’était structuré avec un comité de mission qui préexistait même à la mission. On pouvait aussi voir le degré de maturité de l'entreprise sur ces sujets qui les font évoluer dans le bon sens. Ils avaient une feuille de route très structurée, avec en tête les objectifs statutaires déclinés en objectifs opérationnels.

Le comité de mission, interne à l’entreprise, a donc un rôle clé dans le suivi et l’atteinte des objectifs. Autre enjeu : coconstruire l’évaluation externe avec l’OTI comme le souligne Audrey Souquet : « Il y avait une véritable relation de confiance et d'échanges. »  

Les conseils de Camif et du Groupe Y pour bien réussir son évaluation externe

- Pour Kelly Tinchon de Camif, il est constructif de réaliser un premier audit à blanc pour « structurer le modèle de mission sous les critères de son comité de mission et de son auditeur. »

- Audrey Souquet du Groupe Y conseille de planifier et d'échanger un maximum en amont de l’audit : « Cela aide à se structurer et bien comprendre les enjeux d'une telle vérification, tout en calibrant les ambitions de l’entreprise. »

- Pour la juriste du cabinet d’audit, il ne faut pas avoir des objectifs trop ambitieux ou trop flous : « La société peut être très vertueuse et échouer à un point près sur un indicateur. »

 

Lisa Domergue 

Fermer

Cliquez pour vous inscrire à nos Newsletters

La quotidienne
L'hebdo entreprise, fondation, partenaire
L'hebdo association
L'hebdo grand public

Fermer