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Par Carenews INFO - Publié le 19 octobre 2017 - 09:41 - Mise à jour le 30 octobre 2017 - 13:30
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[RÉFUGIÉS] Lauriane Clément, "Écrire liberté, À l’école des enfants migrants"

C’est l’histoire d’Osama qui a inspiré le choix du titre Écrire liberté (lemieux éditeur, 21 août 2017), témoin de l’exécution d’un homme, dans les rues de Damas, qui avait osé écrire « Liberté » sur les murs. Osama fait partie des élèves aux histoires difficiles en classe UPE2A (Unités Pédagogiques pour Élèves Allophones Arrivants) que la journaliste Lauriane Clément a suivis pendant une année scolaire avant de livrer ce livre d’utilité publique.

[RÉFUGIÉS] Lauriane Clément, "Écrire liberté, À l’école des enfants migrants"
[RÉFUGIÉS] Lauriane Clément, "Écrire liberté, À l’école des enfants migrants"

 

 

Une véritable immersion dans le quotidien des élèves migrants

 

Lauriane Clément est journaliste d’enquête et bénévole de la Croix-Rouge et a décidé de livrer les arcanes de ce monde où misères et espoirs se mêlent en pratiquant l’immersion totale. En effet, le lectorat est totalement immergé, avec la journaliste, dans le quotidien des établissements scolaires. Il y vit les bonheurs et les difficultés des migrants qui ont eu la chance de devenir des élèves en France. Il arpente les couloirs et on vit en salle 316 du lycée Bergson avec la journaliste. « Bienvenue dans la vie de jeunes migrants scolarisés », comme il est écrit dans le livre. Il y apprend que l’éducation est un droit fondamental pourtant souvent inaccessible aux migrants. C’est un reportage de qualité au cœur de la réalité qui met sur le devant de la scène ceux qui sont souvent laissés pour compte. Ainsi, le sommaire est rythmé par les mois de l’année scolaire et il est possible de lire des extraits de travaux faits en classe comme si le lecteur était véritablement avec les élèves. Il est même placé dans la position du confident, lorsque plusieurs récits d’exil et de vies brisées sont narrés. L’émotion est palpable à la lecture de « ces morceaux de vie arrêtés en plein vol », comme l’écrit L. Clément. Mais l’essentiel du livre réside toutefois dans la mise en valeur documentaire des classes d’accueil UPE2A.

 

« L’année en classe d’accueil est un sas pour s’adapter à une nouvelle vie, à une nouvelle culture, à un nouveau pays »

 

Motivés, enthousiastes, attentifs et très désireux d’apprendre, les élèves migrants sont conscients de la chance qu’ils ont d’être à l’école. Cela en fait des jeunes capables de grandes choses. Mais le défi des professeurs est ambitieux : mettre en valeur leur culture d’origine et, simultanément, les adapter à la France ; combiner leurs rêves et une orientation raisonnable car le système est rude. « Avant, j’étais convaincue que nous étions des leviers d’espoirs, mais aujourd’hui je pense plutôt que nous sommes des briseurs de rêves », déclare même dans le livre Maria-Esther d’Anjou, coordinatrice administrative du Casnav de Paris. L’espoir renaît dans ce livre lorsque Nazir, qui est arrivé sans connaître un mot de français, est autorisé à passer en classe ordinaire de Première S. « Ce que j’ai connu dans ma vie, peu de personnes l’ont traversé, je peux y arriver », déclarait-il au début de l’aventure française. Les UPE2A, malheureusement peu connues de la population, sont un lieu où les jeunes migrants sont écoutés et considérés. Et le livre de Lauriane Clément leur rend un bel hommage.

 

 

Un livre bien documenté : des références bibliographiques et des chiffres

 

Outre les histoires émouvantes d’Osama, de Nazir, de Mohona, de Lisa et de tant d’autres, l’ouvrage met l’accent sur une grande documentation officielle et chiffrée. On parle des acteurs officiels et des associations principales : le Casnav (antenne du rectorat qui gère les classes d’accueil), France Terre d’Asile, Unicef, l’Adjie (Accompagnement et défense des jeunes isolés étrangers), Des jeunes et des lettres, Demie (Dispositif d’évaluation des mineurs isolés étrangers, tenu par la Croix Rouge), RESF (Réseau éducation sans frontières, Médecin du monde, Cimade, Centre Minkowska, Le Secours populaire… Lauriane Clément a elle-même fait plusieurs lectures pour parvenir à un livre de qualité comme l’est Écrire liberté : La Classe au bout du voyage, Le quotidien de jeunes migrants raconté par leur professeur, de Nadine Croguennec-Galland ou encore Les mineurs isolés étrangers en France d’Angélina Étiemble. Concernant les chiffres, l’auteure prend soin d’ajouter une annexe finale sur la situation des enfants migrants dans le monde et sur l’accueil en France, avant d’en revenir à un épilogue plus émouvant et humain qui fait un retour sur les élèves rencontrés : « Vie et destins : que sont-ils devenus ? ».

 

 

Les professeures, héroïnes du quotidien

 

Lauriane Clément ne se contente pas de parler seulement des élèves migrants, elle tire aussi le portrait des professeures qu’elle a suivies. Sandrine Kilani est décrite comme une héroïne discrète, qui s’engage sans limite pour aider les élèves à trouver leur place dans la société française, et qui mobilise tout son courage pour tout apprendre à des jeunes qui n’ont jamais tenu un stylo de leur vie. Beaucoup, comme elles, sont confrontés à l’opinion négative des autres professeurs à propos des classes d’accueil, à leur peur que celles-ci baissent le niveau et le taux de réussite de l’établissement et aux remarques du type « du coup, on va en faire quoi d’eux ? ». Cette lutte contre la dévalorisation des jeunes allophones est le combat quotidien des professeurs comme Sandrine qui font leur œuvre de colibri, pour reprendre la parabole de Pierre Rahbi. L’école inclusive se doit de les aider à avoir une image appréciée d’eux-mêmes, quand la société les rejette. Les UPE2A peuvent devenir un véritable atout pour l’établissement si elles y sont bien intégrées : elles remotivent les professeurs en leur donnant un but humain, elles apportent une richesse culturelle et sociale, et amènent des élèves reconnaissants et sérieux.

 

La parole à Lauriane Clément

 

L’auteure a accordé quelques mots à Carenews en guise de bilan sur son ouvrage : « je voulais saluer les professeur-e-s et personnels éducatifs qui donnent toute leur énergie pour ces classes, qui existent depuis les années 1970 bien qu'elles soient peu connues. Cela fonctionne ! C’est fou de voir ces jeunes se transformer, gagner en confiance et prendre leur envol au fil des années. Grâce à l'école, ils réussissent à s'intégrer dans notre société et donc à acquérir une certaine liberté, d'où le titre de mon livre. Cela donne une image toute autre de l'immigration, bien plus positive je l'espère ! »

 

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Semaine thématique réalisée avec le soutien de la Fondation Sanofi Espoir.

 

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