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Par Carenews INFO - Publié le 5 novembre 2019 - 16:10 - Mise à jour le 22 mars 2020 - 17:19
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J'ai testé : demander un produit d'épargne solidaire à ma banque

Alors que se tient la semaine de la finance solidaire du 4 au 11 novembre, on a voulu savoir si on pouvait devenir épargnant solidaire en parlant tout simplement à son banquier. Verdict : c’est compliqué.

Crédit photo : nicomenijes.
Crédit photo : nicomenijes.

Lundi, 10 heures du matin, dans les bureaux de la rédaction, rue Saint-Denis à Paris. Armée de mon identifiant client et d’une bonne dose de motivation, je me décide à composer le numéro de téléphone de ma banque en ligne. Cela fait plusieurs années que je m’interroge sur la manière dont est utilisé mon argent. La crise financière de 2008 a mis en lumière les fragilités du système économique mondial et les vices d’une finance mondiale déconnectée de l’économie réelle. À mon échelle de travailleuse – ni riche, ni pauvre – comment pouvais-je agir ?

Quitter la banque à papa

J’ai d’abord songé à quitter ma banque (celle de mes parents) il y a plusieurs années. Hélas, des échanges téléphoniques avec un conseiller peu chaleureux m’avaient dissuadée de poursuivre ma démarche d’inscription dans une banque étiquetée « solidaire ». 

Après une année passée au Brésil, pendant laquelle j’ai dépensé plus de 1000 euros en frais bancaires divers et variés, j’ai suivi les conseils d’une amie : j’ai ouvert un compte dans une banque en ligne. Une partie de moi (celle qui trie ses déchets, mange bio, fait du bénévolat, manifeste pour le climat et rédige des articles sur l’économie sociale et solidaire) est donc toujours restée frustrée de savoir que ses économies finançaient l’économie classique, donc les énergies fossiles, donc le tabac, donc l’armement, etc.

Un conseiller paumé

 

« Bonjour, je voudrais savoir si vous proposez des produits d’épargne solidaire »

 

Épargne Solidaire

Epargne dont l’encours ou les revenus sont destinés, pour tout ou partie, à financer des activités solidaires. L’épargnant solidaire choisit de placer son argent, non seulement en fonction de ce qu’il va lui rapporter, mais aussi en fonction de ce qu’il va rapporter à la société, en termes de plus-value sociale. 

D'après la définition de Finansol

Je me suis décidée à appeler ma banque en ligne pour demander comment épargner plus solidaire. Après quelques minutes d’attente, un conseiller décroche. Je lui demande : « Bonjour, je voudrais savoir si vous proposez des produits d’épargne solidaire ». Au bout du fil, le téléconseiller fait un blackout. « Que voulez-vous dire ? » « Je souhaite que mon argent serve à financer des associations, des entreprises sociales, des coopératives, des projets avec une finalité sociale et/ou environnementale ». « Ahhhh, mais on n’a pas ce genre de chose », me répond-il, décontenancé. « Notre moteur de recherche ne distingue pas les fonds en fonction du critère solidaire », ajoute-t-il. 

À ce stade de la conversation, je ne suis pas spécialement étonnée mais, un peu déçue. L’association Finansol, qui promeut la finance solidaire, ne soutient-elle pas que la plupart des banques proposent au moins un produit d’épargne solidaire ? Mon téléconseiller, faisant preuve de bonne volonté, effectue alors une recherche classique sur Internet.

Sur le site Bourse Direct, il détecte un onglet répertoriant les fonds solidaires. Grâce au code ISIN, il peut désormais vérifier si ma banque est partenaire avec l’un d’entre eux. Il finit par dégoter un fonds spécialisé dans l’insertion professionnelle. Mais pour y souscrire, ma banque appliquerait des frais d’entrée de 50 euros et me facturerait 165 euros par an au titre d’ « opérations spéciales »… Je fais remarquer au conseiller que c’est quand même un peu cher payé. Il m’enjoint alors à vérifier moi-même la disponibilité des fonds solidaires (40 sont recensés sur Bourse Direct) dans le moteur de recherche de mon espace client.

Un marché de niche

Je finis par me rendre à l’évidence : pour les (très) petits épargnants comme moi, être solidaire demande des efforts. Je fais part de mon expérience à Patrick Sapy, le directeur de Finansol. Son association organise la semaine de la finance solidaire du 4 au 11 novembre, pour convaincre le grand public de l'intérêt de ce mode de gestion alternatif. Il concède : « Je ne suis pas étonné. C’est un secteur avec un fort potentiel, qui se développe, mais les banques classiques continuent à privilégier les produits qui leur procurent des marges importantes. » 

Je lui demande s’il faut y voir un trait spécifique aux banques en ligne. Patrick Sapy me répond que non. « Certains établissements vont mettre en avant leurs produits solidaires, d’autres non. Cela dépend de la culture de la banque. » Dans le but d’infléchir cette culture, l’association Finansol, qui labellise des produits d’épargne solidaire, regroupe dans sa gouvernance aussi bien des établissements bancaires classiques, des gestionnaires d’actifs, que des financeurs solidaires et des associations bénéficiaires. Et il y a du travail pour infléchir les pratiques : l’épargne solidaire avoisinait les 13 milliards d’euros en 2018. Bien que celle-ci soit en progression (de 8,7 % par rapport à 2017), elle ne représente encore que 0,25 % du patrimoine financier des Français. Des épargnants bien nombreux, comme moi, à en rester tant bien que mal au bon vieux livret A.

Hélène Fargues 

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