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Par Ipama - Publié le 11 décembre 2025 - 08:00 - Mise à jour le 11 décembre 2025 - 08:00
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Spectacles & Festivals en plein air et biodiversité : comment accorder nos violons pour mieux protéger la faune ?

Si la gestion sonore des événements se focalise traditionnellement sur le confort des spectateurs et la tranquillité des riverains, un nouvel enjeu émerge : la cohabitation avec la faune sauvage. Lors d'un récent webinaire, dans le cadre des “Perspectives Sonores”, organisé par AGI-SON et animé par Ipama, experts et organisateurs ont démontré que la prise en compte du vivant n'est pas une contrainte de plus, mais une opportunité de renouer le dialogue avec son territoire.

Entendre ce que la nature écoute

Organiser un concert en plein air, c'est souvent inviter la fête dans le salon de la faune sauvage. Pour réussir cette cohabitation, il faut d'abord changer de prisme. Comme l'a expliqué l'écologue Hortense Serret, l'animal n'entend pas comme l'humain.

Au-delà du volume sonore, c'est la modification de l'environnement acoustique qui pose question. Le son généré par l'activité humaine (l'anthropophonie) peut masquer les communications naturelles des animaux (la biophonie), essentielles pour trouver un partenaire ou défendre un territoire. C'est l'effet "cocktail" : comme nous dans une soirée bruyante, les espèces peinent à s'entendre.

Comprendre ces mécanismes permet de sortir d'une vision purement réglementaire pour adopter une approche sensible du vivant.

Le dialogue : la clé de voûte de l'acceptabilité

Loin d'être un frein, la prise en compte de la biodiversité est un puissant levier pour enrichir les relations avec les parties prenantes. Jean Perrissin, éco-conseiller, insiste : il ne s'agit pas d'opposer "nature contre culture", mais de trouver des zones de compromis.

Cette démarche invite à :

  • Connecter les métiers : Le directeur technique, dont la mission est de "couvrir" une zone en son, apprend à collaborer avec l'écologue qui cherche des zones de calme. Ce dialogue décloisonne les équipes.
  • Ancrer l'événement sur son territoire : Comme l'illustre l'expérience de We Love Green au Bois de Vincennes, travailler sur la faune implique d'échanger étroitement avec les gestionnaires d'espaces (Ville de Paris) ou des associations locales (LPO). Ces interactions renforcent la légitimité et l'intégration locale du festival.

 

we love
Festival We Love Green, au Bois de Vincennes © RBassenne-WeLoveGreen

 

Des solutions techniques au service de l'harmonie

Des solutions techniques au service de l'harmonie

La bonne nouvelle, c'est que les solutions existent et qu'elles sont souvent synonymes de montée en qualité technique.

  • L'art de l'anticipation : Réaliser un état des lieux écologique en amont permet d'adapter son plan de masse. Si une nidification est repérée, on déplace simplement une infrastructure logistique. C'est du bon sens et de la planification.
  • La précision technologique : Timothée Quellard du cabinet Ekodev rappelle l'efficacité des systèmes de sonorisation cardioïdes (une technologie qui projette le son vers l'avant en forme de cœur, épargnant l'arrière) . En "dirigeant" le son vers le public et en annulant l'énergie arrière, on peut réduire le bruit de 15 à 20 dB derrière la scène, créant ainsi une zone de calme immédiate pour la faune.
  • Les zones de repli : Créer des "zones refuges" au sein même du site - des bosquets balisés, interdits au public et non éclairés - offre à la faune des espaces de tranquillité pendant le spectacle.

 

zone refuge
“Zone Refuge” en faveur de la biodiversité, inaugurée à La Motte de Galaure dans le département de la Drôme

 

La To-Do List de l'organisateur engagé

Pour passer de la théorie à la pratique, voici les actions prioritaires identifiées lors du webinaire, à activer selon le calendrier de votre événement :

En amont (J-12 mois) :

  •  Commander un état écologique "Zéro" : Faites appel à une association locale (type LPO) pour connaître vos "colocataires" sauvages.
  • Vérifier le calendrier : Croisez vos dates avec les périodes sensibles (nidification, reproduction).

 

En préparation (J-3 mois) :

  • Adapter le plan de masse : Éloignez les scènes et les groupes électrogènes des zones sensibles identifiées.
  • Choisir le bon matériel : Demandez à vos prestataires des systèmes de diffusion directifs (subs cardioïdes) pour limiter le son à l'arrière des scènes.
  • Gérer la lumière : Prévoyez l'extinction des éclairages ("Blackout") dès la fin des concerts et évitez d'éclairer les cimes des arbres.

 

Le Jour J :

  • Baliser les zones refuges : Matérialisez physiquement les zones interdites au public et au staff pour laisser la faune tranquille.
  • Briefer les équipes : Sensibilisez techniciens et bénévoles au respect du silence dans les zones "backstage" proches de la nature.

Vers une fête plus consciente

En définitive, intégrer la faune dans l'équation sonore ne tue pas la fête, elle la rend plus consciente et respectueuse. C'est une démarche d'humilité, comme le résume Marie Sabot : "On est chez eux".

Cette attention portée au vivant permet aux organisateurs d'événements de raconter une nouvelle histoire, celle d'une culture qui sait vibrer sans perturber, et qui dialogue intelligemment avec son environnement.


Cet article s'appuie sur les échanges tenus lors du webinaire du Mois de la Gestion Sonore organisé par AGI-SON et animé par Ipama dans le cadre des perspectives sonores.

Cet article a été rédigé par Xavier Parenteau, co-fondateur d’Ipama.


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