Intérêt général : l’urgence d’Agir ensemble !
À l’occasion de son conseil d’orientation et de son assemblée Générale, Le RAMEAU prend la parole au moment de rendre des comptes sur les résultats 2023 de ses travaux de recherche empirique, et surtout de valider les orientations stratégiques en cohérence avec son Projet « Yposchesi 2050 ». Plus que jamais, il semble indispensable de faire la « Promesse » à notre jeunesse de notre capacité collective à piloter l’intérêt général et à réussir les transitions… au plus près des Territoires qui incarnent « l’intérêt général à portée de main ».

L’étude d’impact des alliances d’intérêt général réalisée entre 2018 et 2022 l’a prouvé : la question n’est plus « faut-il faire alliance ? », mais « comment faire alliance ? ». Ni les discours, ni les lois et les normes ne peuvent répondre à cette exigence aujourd’hui bien comprise de tous. Les alliances ne s’imposent pas ; elles se co-construisent !
À 7 ans de l’échéance de l’Agenda 2030, il est (encore) possible de faire de nos défis communs l’opportunité d’un nouveau contrat de confiance. Alors, ne tardons pas, Agissons ensemble dès aujourd’hui… pour inventer les modes opératoires cohérents avec la réalité de terrain, et non à partir d’imaginaires fantasmés, et pour beaucoup déjà largement dépassés !
Si nous doutons collectivement de notre capacité à réussir les transitions, c’est que nous ne regardons pas au bon endroit. Nous continuons à regarder « vers le haut », alors que c’est « vers le bas » qu’il faut constater le changement : l’arbre ne pousse pas par le sommet, mais par ses racines…
C’est donc à partir des Territoires qu’il faut regarder objectivement notre capacité à piloter une transformation systémique de tous les modèles. C’est indispensable à la réussite de la métamorphose incarnée par le cap et le cadre en « Commun(s) » que constitue l’Agenda 2030 pour toutes les démocraties du monde.
Avant de pouvoir affirmer fermement que nous avons la capacité en France de conduire cette mutation, il a fallu au RAMEAU déconstruire en 2023 la vision systémique que notre laboratoire de recherche empirique avait patiemment mis 17 ans à co-construire avec une diversité de partenaires représentatifs de notre écosystème national et territorial.
Le chemin parcouru en 2023 a été difficile, mais instructif et inspirant. Il nous a permis durant les 4 saisons de l’année de (re)poser les fondamentaux pour permettre à chacun de se positionner face à son propre écosystème et à sa propre temporalité… autrement dit « ancrée » et « incarnée » dans son propre Territoire.
Les 4 saisons de 2023

Fort de ce temps de relecture de 17 ans de recherche empirique, nous pouvons aujourd’hui affirmer avec confiance que nous disposons déjà des nouveaux modèles de gestion de l’intérêt général. Il nous suffit de pouvoir… mais surtout de vouloir les voir, et d’en accepter les règles du jeu qui nous invitent avant tout à sortir des règles du « je » !
Comme pour le chemin du médicament, il ne suffit pas d’avoir la « preuve de concept » et le principe actif dans son éprouvette pour être en mesure de déployer un traitement efficace. Il convient d’abord de vérifier l’efficacité thérapeutique de la solution, d’en qualifier la faisabilité technique à plus grande échelle… et de vérifier son innocuité. C’est ce qu’a fait le Fonds ODD 17 en 2023, après trois ans d’investissement dans l’innovation et l’ingénierie territoriale du « premier kilomètre des besoins ».
Mais pour comprendre la profondeur de la démonstration, il faut rappeler qu’elle est issue d’une décennie de recherche empirique sur les différentes composantes de l’équation. C’est en effet en 2013 - sur la base des résultats du 1er plan quinquennal de l’Observatoire des partenariats - que Le RAMEAU a alors pu mettre une 1re pierre sur chacune des quatre dynamiques observées sur les mutations de l’intérêt général en France :
- Côté institutionnel : Le lancement des travaux interministériels sur l’engagement des actifs, levier stratégique de tout modèle socio-économique d’intérêt général, à la demande de la ministre Valérie FOURNEYRON,
- Côté Collectivités territoriales : Les premières conclusions du groupe de travail initié avec l’Association des Régions de France sur l’émergence d’un mouvement de « co-construction territoriale », sous la présidence de Marie-Guite DUFFAY,
- Côté économique : Le rapport sur « l’Entreprise Responsable » dans le cadre des Assises de l’Entrepreneuriat, lancées sous l’égide du Président de la République, sur l’urgence de (ré)concilier économie et intérêt général,
- Côté associatif : Le rapport de Terra Nova « Démocratie et Société Civile », sous la présidence de Daniel LEBEGUE, sur la place des acteurs de l’engagement dans la co-construction des politiques publiques.
Sur les conseils de Jacques DERMAGNE qui m’avait suggéré en 2010 : « sur la question de l’intérêt général, ne commencez pas par les institutions, et attendez le juste temps », nous lancions alors en 2014, avec Hubert ALLIER, alors Conseiller au CESE, et Daniel LEBEGUE, un travail en profondeur sur les mutations de l’intérêt général. Les avis étaient alors divergents : pour les uns « il aurait fallu le faire depuis dix ans ! », et pour les autres « il faudra dix ans pour le faire ! ». Pour ceux qui ont alors accepté de s’engager dans la démarche proposée, le principe était clair : nous donner le temps nécessaire pour être en mesure de proposer une solution solide, hors des réponses partisanes, et fondée sur la capacité à donner à chacun sa juste place. C’est ainsi que dès novembre 2015, nous avons pu publier le rapport « Intérêt général : nouveaux enjeux, nouvelles alliances, nouvelle gouvernance ». A quelques semaines de la signature par l’Etat de l’Agenda 2030 des Objectifs de Développement Durable, aux côtés des 192 autres Nations, ce rapport donnait à voir les trois leviers d’activation de l’intérêt général pour qu’il garantisse la cohérence des actions, mais aussi la cohésion des acteurs. Dès la première session de travail en 2014, Jean-Paul BAILLY nous avait donné ses convictions : « c’est sur les Territoires que nous serons en mesure de recréer la confiance suffisante ». Deux ans plus tard, Claude ALPHANDERY en donnait sa propre interprétation à la deuxième « Rencontre des pionniers des alliances en Territoires » : « Face aux enjeux de ce début du XXIe siècle, il me semble que la co-construction est le maquis d’aujourd’hui ! ».
À quelques jours de fêter le 10e anniversaire des 350 catalyseurs territoriaux, le 2 juillet prochain, lors de la 10e Rencontre des pionniers des alliances en Territoire, je voudrais redire ma conviction et mon engagement dans le combat qui est celui du RAMEAU depuis 2006 : inventer ensemble ce qu’aucun de nous ne saurait faire seul ! Le « Pari de la confiance » me semble plus que jamais d’actualité dans ce contexte de doutes et d’inquiétudes légitimes face à l’ampleur des transformations que nous devons conduire.
Après tout ce chemin, il me semble que trois raisons nous invitent à Agir ensemble au plus près des réalités de terrain et des engagement qui incarnent « l’ODD 17 en pratiques » :
- une meilleure gestion de nos communs à un moment où nous sommes confrontés à un « effet ciseau » entre l’accroissement de nos fragilités individuelles et collectives et la raréfaction des ressources pour y répondre,
- un apprentissage d’une méthode de co-construction du bien commun rendant possible l’émergence de solutions innovantes qui permettent de réduire les fragilités tout en faisant émerger de nouveaux moteurs socio-économiques durables,
- une (re)découverte de notre Lien commun ; celui qui nous unit grâce à nos différences, et qui permet de dépasser le simple « vivre ensemble » pour « faire Société ».
Ces trois défis sont en résonnance avec les impacts de performance, d’innovation et de confiance qui ont été qualifiés, mesurés et illustrés dans les études de l’Observatoire des partenariats. Avec le précieux soutien de l’Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts, nous avons pu mettre ces résultats en débat avec les acteurs académiques pour en tirer des enseignements en « Commun(s), tant pour la recherche que pour l’enseignement.
Alors oui, regarder « vers le haut » nous inquiète, mais si nous regardions « vers le bas », nous verrions alors la patiente et déterminante gestation de solutions nouvelles expérimentés par les Territoires, forts de leurs spécificités propres ! Et si nous apprenions à voir le foisonnement des initiatives qui individuellement ne font pas tout, mais qui assemblées ensemble font Sens ? Et si nous faisions confiance à notre capacité d’engagement individuel et collectif pour faire émerger ensemble ce qu’aucun de nous ne pourrait imaginer seul ? Et si les Territoires devenaient dans nos esprits une « forêt qui pousse » plutôt que la « source des fragilités » ? Et si, fidèle à notre histoire et à notre capacité de résilience, nous nous faisions confiance ? Et si…
Vous l’aurez compris, face à l’adversité devant nous, Le RAMEAU refusera toujours de se résigner ! Jean d’ORMESSON nous a écrit « Mieux vaut allumer une petite lanterne que maudire l’obscurité ». Quelle que soit la noirceur du tunnel, vous trouverez toujours auprès de nous une « petite lanterne » pour partager le « Pari de la confiance ».
Je vous souhaite une bonne lecture de notre rapport d’activité 2023 qui en ce jour du 27 juin 2024 prend plus que jamais sens sur le partage de 18 ans de travail en proximité avec les Territoires pour faire (re)connaitre la valeur inestimable du « faire alliance ». Elle est au cœur de notre capacité à réussir ensemble les défis incarnés par l’Agenda 2030 des Nations Unies en proximité de nos vies quotidiennes. Répondre à la diversité de nos fragilités trouve écho plus que jamais au plus profond de chacun de nos Territoires !
Avec mon profond remerciement pour toutes celles et tous ceux qui nous ont fait confiance, et plus encore celles et ceux qui accepteront le défi d’Agir ensemble au service de l’intérêt général. Notre ambition est claire : faire tout ce qui est possible afin qu’en 2050 les jeunes d’aujourd’hui soient fiers de pouvoir dire à leurs enfants : « Ce fut difficile, mais c’est ensemble AVEC la génération qui nous a précédé que nous avons su inventer les conditions d’un XXIe plus fraternel, équitable et durable, dont nous sommes particulièrement fiers de vous transmettre aujourd’hui les clés ». Et si ce n’était pas un rêve, mais une prémonition ?
Bon courage à chacune et chacun d’entre vous devant la Responsabilité qui est la nôtre dans le contexte actuel.
Charles-Benoît HEIDSIECK
Président-Fondateur du RAMEAU