Rencontre auteur avec le dessinateur Rémi Morel à Saint-Pierre
Le 28 février 2018, pour la première fois, la maison d’arrêt de Saint-Pierre reçoit un auteur dans le cadre des rencontres écrivains organisées par l’association Lire pour en Sortir, pour échanger autour de son métier avec les personnes détenues. Rémi Morel, dessinateur, a commencé à créer sa première bande dessinée autour de l’âge de 18 ans. Après dix années de labeur il publie sa première bande-dessinée sous le nom d’Indrani. Sans attendre, voici le ressenti détaillé de l’artiste sur cette rencontre, qui s’est terminée par une séance de dédicaces.
Retour sur une première expérience marquante :
« Lorsqu’Anna Mellul, chargée de projets de l’association Lire pour en Sortir, m’a proposé de participer à une rencontre auteur lors du festival Cyclone Bd - qui s’est tenu en décembre 2017, autour de mon album BD « Indrani » - j’étais loin d’imaginer que le public à qui j’allais avoir à faire serait composé exclusivement de personnes détenues masculines.
Deux mois après, me voilà face au mur de la maison d’arrêt de Saint-Pierre. Après tout c’est un public comme un autre.
Durant notre rendez-vous précédent cette rencontre, je fis la connaissance de deux autres membres de l’équipe, Johanna, bénévole au sein de cette association et Geneviève, coordinatrice culturelle. Toutes deux m’expliquèrent le déroulement de cette rencontre mais aussi leurs attentes vis à vis de moi en tant qu’artiste. Et c’est ainsi, au détour d’une discussion, que j’appris que c’était la première fois qu’une rencontre auteur était organisée dans cet établissement.
Je n’étais pas particulièrement stressé ce jour-là, même si j’appréhende toujours un peu ce genre de rencontre car on ne sait jamais vraiment comment cela va se dérouler. Autant vous dire que je sentais peser sur mes épaules le poids de dame pression. Mais qu’à cela ne tienne, il y a bien une première fois à tout ! Et puis je ne pouvais plus faire machine arrière maintenant.
L’heure fatidique était enfin venue, ça allait être le moment de vérité. Je m’engouffrais à chaque pas un peu plus à l’intérieur de la prison, tel un détenu que l’on transférait dans sa nouvelle cellule. Après un protocole des plus strictes et une entrée au compte-goutte de mon public, l’échange allait pouvoir commencer.
Voilà, j’y étais, impossible pour moi à présent de m’évader.
Après quelques minutes de présentation et être entré dans le vif du sujet, cette rencontre s’est étonnement avérée être agréable, à tel point que par moment j’oubliais même que nous nous trouvions dans une prison. J’avais face à moi un groupe réceptif. Même si l’album visait en premier lieu un public plus jeune, ils ont quand même joué le jeu. Les sujets et questions étaient vastes et variés. L’ambiance fut joviale et bonne enfant. Deux heures qui se sont finalement écoulées très vite en compagnie d’un groupe respectueux et des plus curieux.
Sûrement l’une de mes rencontres auteur les plus fructueuses et intéressantes jusqu’à présent. Ce n’est sûrement pas le cas partout, mais il ne faut pas croire tout ce qu’on entend ici et là sur les personnes détenues, tous ne sont pas à mettre dans le même panier.
Une expérience à vivre qui permettra surtout de vous faire votre propre opinion sur ces personnes qui, au final, sont comme vous et moi. »