À quoi servirait la création d’un Défenseur de l’environnement ?
Une proposition de loi socialiste, qui devait être débattue ce jeudi 9 février à l’Assemblée nationale, vise la création d’un Défenseur de l’environnement, sur le modèle du Défenseur des droits.
L’environnement pourrait avoir une entité pour le défendre. Ce jeudi 9 février, le groupe socialiste de l’Assemblée nationale a profité de sa « niche parlementaire », pour soumettre au débat un certain nombre de propositions de loi. Parmi elles, la proposition de loi constitutionnelle qui vise la création d’un Défenseur de l’environnement. Le texte prévoit sa mention au sein de la Constitution pour l’ancrer. Cette proposition émane de la Convention citoyenne pour le climat et prend pour modèle le Défenseur des droits créé lors de la révision constitutionnelle de 2008.
Le rapporteur du texte est Gérard Leseul, député de la 5e circonscription de Seine-Maritime. Finalement, le temps a manqué pour débattre de cette proposition de loi dans l'hémicycle.
Évaluer les politiques environnementales
Cette nouvelle autorité administrative indépendante aurait un certain nombre de rôles. Tout d’abord, celui d’éclairer sur l’environnement en évaluant des politiques relatives. « Il rend public, à ce titre et lorsqu’il l’estime nécessaire, des avis sur les projets et les propositions de loi ainsi que sur les évaluations qui les accompagnent avant leur discussion au Parlement », précise le texte des socialistes. Le Défenseur des droits serait accompagné de plusieurs vice-présidents, chargés d’une ou plusieurs limites planétaires.
Autre rôle, celui de garant du droit et de son application. Si le texte est adopté, les citoyens pourront saisir le Défenseur des droits. « Il peut être saisi, dans les conditions prévues par la loi organique, par toute personne estimant que la préservation de l’environnement est menacée. Il peut se saisir d’office », prévoit le texte. L’organe orientera les requérants vers les institutions compétentes et fera figure de guichet unique pour les contentieux environnementaux. Cet organe pourrait disposer d’un pouvoir de sanction.
Comment cette proposition est-elle accueillie par les associations environnementales ?
Les associations environnementales se montrent mitigées quant à une telle proposition de loi. Joseph D’halluin, membre du conseil fédéral des Amis de la Terre, considère que « Ce n’est pas vraiment le cœur de nos sujets en ce moment. Ce n'est pas un enjeu prioritaire ». Pour lui, « Des institutions qui ont plus ou moins le même rôle existent déjà. En réalité, le système actuel ne semble pas dysfonctionnel, il est juste insuffisamment doté. » Il fait également part d’une inquiétude à propos de la place des associations environnementales qui jouent un rôle essentiel dans la défense du droit de l’environnement. Quel rôle joueraient-elles alors ?
Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous, trouve qu’il « s’agirait d’une avancée symbolique forte ». Mais pas à n’importe quel prix. « Il faut une autorité qui soit indépendante des gouvernements, ou même des acteurs économiques. Sinon, cela ne peut pas marcher », tempère Jérémie Suissa. Autre point d’attention : « Il faut que ce Défenseur de l’environnement soit en capacité de mobiliser la justice, et de pouvoir faire respecter le droit. »
« Un risque de concentrer toute l'attention »
Le texte prévoit que le Défenseur de l’environnement soit nommé pour six ans par le président de la République. Joseph D’halluin pointe le risque de dépendance :
Ce défenseur, nommé par président, aurait un risque de concentrer toute l’attention sur lui tout en étant potentiellement un allié du gouvernement. Au contraire, il faut surtout démultiplier ce rôle au lieu de le concentrer dans la main d’une personne. »
Reste encore à faire adopter ce texte constitutionnel par les chambres législatives. Sur ce point, les deux militants s’accordent... Très peu de chances qu’il soit pour l'instant adopté.
Théo Nepipvoda