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Par Carenews INFO - Publié le 16 février 2024 - 16:40 - Mise à jour le 22 février 2024 - 11:42
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Le Dorothy : un café associatif pour créer du lien

Niché dans le 20e arrondissement de Paris, le Dorothy est un café associatif chrétien aux multiples facettes. Nous nous sommes invités dans ce lieu convivial autogéré par une cinquantaine de bénévoles, qui propose soutien administratif, ateliers manuels, conférences ou soirées en musique.

Le Dorothy est un tiers lieu chrétien autogéré au coeur du 20e. Crédits : Félicité Dussel
Le Dorothy est un tiers lieu chrétien autogéré au coeur du 20e. Crédits : Félicité Dussel

 

Au 85 bis de la rue de Ménilmontant, « Le Dorothy » gravé en lettres imposantes sur une devanture écarlate capte l’attention de plusieurs passants. Pourtant, difficile d’imaginer ce que cache l’étroite porte métallique de laquelle on ne perçoit qu’un couloir de pierres. 

Un « ovni politique », « un anarchisme chrétien », ce sont les termes qu’utilise Adrien, bénévole depuis deux ans, pour définir l’endroit. « Un lieu de rencontre entre des gens qui ne se parlent pas », explique plus sobrement Foucauld, l’un des fondateurs du Dorothy.  

Chevelure blonde coiffée en arrière et regard rieur, celui qui a pensé le concept il y a sept ans avec des amis rencontrés à Sciences po, le définit comme un espace de vie organisé autour de trois piliers : social, culturel et manuel. Quelle fantastique promesse…

 

L'entrée du Dorothy au 85 bis rue de Ménilmontant. Crédits : Gabriele Gottardo.

 

Un café animé par des chrétiens mais ouvert à tous

 

Une fois traversé le couloir sans fenêtres, une pièce lumineuse habillée de larges tables, de fauteuils et d’une bibliothèque bien fournie s'offre au visiteur. Dans le coin, un bar taillé dans du bois propose des boissons chaudes gratuites ; au mur, les bénévoles photographiés affichent des sourires immaculés. 

Dans un brouhaha joyeux, se mélangent ainsi Estelle, septuagénaire qui vient régulièrement « passer le temps », Félix, sans domicile fixe à la retraite qui cause avec tout le monde, ou Louis, Léo et Nicolas, jeunes journalistes du quartier sélectionnant les photos de leur prochain article.

 

Louis, Léo et Nicolas trois jeunes journalistes travaillent sur leur prochain article. Crédits : Félicité Dussel

 

Aucun signe catholique apparent. « Le Dorothy n’est pas un lieu chrétien, mais un lieu animé par des chrétiens et ouvert à tous », affirme Alexis, ancien chef scout et membre du conseil d’administration. D’ailleurs, si le diocèse est propriétaire des 450 mètres carrés de locaux, il n’a aucun droit de regard sur la gestion du café, nous assure-t-il. 

 

Un lieu global qui ne prend pas un seul aspect de l’être humain

 

Installé au bar avec un ami, Abubakar, musulman d’origine malienne, est un habitué. Il vient deux fois par semaine pour « profiter du café gratuit » et de l’aide apportée par l’association Autremonde dans ses démarches avec l’Anef (administration numérique des étrangers en France). 

« Ici on trouve de bonnes personnes qui nous guident, ça nous permet de retrouver notre dignité », résume-t-il. 

Aide administrative et juridique pour les sans papiers, cours de français, soutien scolaire pour les plus jeunes… : le Dorothy accueille dans ses locaux des associations qui viennent combler des besoins spécifiques au fil de la semaine (Autremonde, Le Carillon, Marthe et Marie...). Une mission sociale qui s’inspire de celle de Dorothy Day, journaliste et militante catholique américaine du siècle dernier. Le café a été baptisé en son honneur.  

 

« Retrouver de l’autonomie et de la confiance en soi par des savoir-faire »

 

« Pour saisir l’esprit du Dorothy, il faut mettre la main à la pâte ! » : Pascal, septuagénaire blagueur à la casquette verte et au tablier gris, nous convie à l’un de ses cours de bricolage. Comme tous les mardis soirs à 19h, l’atelier du fond accueille quiconque souhaite développer ses compétences manuelles. 

                                         Pascal le bricoleur, est l'unique salarié du Dorothy. Crédits : Gabriele Gottardo.

 

Une fois au complet, on entre dans le vif du sujet : « Vous savez faire la différence entre les matières et les matériaux ? », nous demande celui qui a animé des émissions de bricolage durant plusieurs années. Le cours consistera à apprendre comment percer ces différents éléments et avec quels outils. 

« Quand tu entendras ça le samedi matin, tu sauras que c’est une perceuse à percussion et pas une simple perceuse visseuse que ton voisin utilise », nous dit-il rieur. La blague prend. Le cours continue sur le même ton.

Au bout de trois heures de cours, cheville de fixation, perceuse visseuse et marteau perforateur font désormais partie du vocabulaire de chacun des participants. Malgré tout, il n’est pas question « de rendre les gens menuisiers, l’idée c’est de rassembler par la création », résume simplement Pascal.

Foucauld développe : « il y a un enjeu à réapprendre à faire nous-mêmes et à arrêter d’acheter de façon compulsive pour jeter quelques mois plus tard ». Les ateliers de menuiserie, mais aussi d’électricité ou de plomberie, qui ont lieu 2 fois par semaine à prix libres, sont ainsi présentés comme « une petite alternative au monde capitaliste dans lequel on vit ».

Créer par soi-même et apprendre aux gens à être autonomes c’est « retrouver une autonomie et de la confiance en soi par des savoirs faire ».

 

             Des ateliers manuels ont lieu le mardi et le samedi à prix libre. Crédits : Félicité Dussel.

 

Au sein des participants, on remarque toutefois un contraste avec les usagers du café présents un peu plus tôt. Une bonne partie sont des bénévoles du Dorothy. Félix ou Abubakar, eux, ne sont pas là.

 

Un espace propice à la réflexion ? 

 

Depuis l’atelier de menuiserie, on entend des voix s’animer. Par curiosité, nous nous rendons dans la salle principale qui s’est muée en salle de conférence, les fauteuils orientés vers un homme d’Eglise. 

 

  Le Dorothy anime des conférences mensuelles autour de sujets de société. Crédits : Félicité Dussel.

 

« Pourquoi cherche t-on à résoudre tous les maux de l’humanité ? », se questionne l’animateur. « Jésus lui-même n’a jamais cherché à résoudre les paradoxes de l’Empire romain de son époque ».

« Mais n’est-ce pas là justement le devoir de tout homme que d’aider ses confrères ? » demande un jeune participant à la mèche plaquée du premier rang. « Au fond, il faut surtout savoir accepter la part d’impuissance de nos luttes », lui répond le prêtre.

C’est le message que retiendra Félix, après nous avoir raconté les tensions entre Younès, Mohammed, Djelloul d’autres usagers du café et certains bénévoles. « Certaines personnes n’ont pas envie de s’intégrer et s’en prennent aux autres ». 

Face à ces maux, le Dorothy est porteur d’espoir mais ne fait pas de miracles.

 


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Félicité Dussel 

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