Noël discount : l’envers de la stratégie commerciale de Temu

Nouvel acteur chinois du hard discount en ligne arrivé cette année en France, Temu promet une avalanche de bonnes affaires pour les fêtes. Avec un slogan audacieux, « shop like a billionaire », l'application porte la promesse de pouvoir tout acheter, des vêtements à l'électroménager. Mais que se cache-t-il derrière l’ascension fulgurante de l’application qui s’est hissée devant Shein et AliExpress en quelques semaines seulement ? 

Le « boucher des prix » chinois 

Lancée aux États-Unis en 2022 et désormais implantée dans 48 pays, l’application qui appartient au groupe chinois PDD Holdings fait un ravage partout où elle débarque. 

Son secret ? Des prix extrêmement bas et, par conséquent, ultra-compétitifs, en particulier dans un contexte d’inflation où nombre de Français ont du mal à boucler le mois. 

« Je pourrais acheter de la qualité, mais quand on est à découvert le 12 de chaque mois, on ne cherche pas à comprendre ce qu'il y a derrière le petit prix. On est en mode survie », peut-on lire dans l’avis client laissé par Emma, qui a pu bénéficier de 100 € de bons d’achat grâce aux codes promo d’une amie. Car oui, Temu, ce sont aussi des offres promotionnelles tous azimuts allant parfois jusqu’à 90 % de réduction.

Au-delà des prix cassés, Temu se distingue par ses politiques d'expédition avantageuses, offrant la gratuité des envois pour les commandes dépassant une certaine valeur et des délais de livraison largement réduits comparés à son concurrent AliExpress (5 à 14 jours ouvrés contre 10 à 60).

Des techniques commerciales controversées 

L’explication derrière ces prix imbattables ? Différentes techniques commerciales douteuses. Tout d’abord, c’est sa stratégie « Team Up, Price Down », d’où la plateforme tire son nom (Temu), avec l’idée selon laquelle plus un produit se voit commandé, plus son prix diminue. Le discounter chinois est aussi un adepte du « dumping », consistant à vendre à perte pour déséquilibrer la concurrence. Finalement, Temu va jusqu’à proposer la gratuité de certains produits aux utilisateurs en échange de la promotion de l’application sur les réseaux sociaux. 

Autre stratégie importante, le contournement des circuits de livraison traditionnels. En mettant directement en lien les acheteurs avec des fabricants chinois sur sa plateforme, Temu supprime les intermédiaires et, en conséquence, ses coûts de distribution.

Une guerre marketing 

Pour attirer les consommateurs, Temu mise sur une stratégie marketing ultra-agressive, avec un budget publicitaire colossal. Selon We Demain, la société investit près de 500 millions d'euros chaque trimestre dans ses campagnes.

Ces investissements marketing lui assurent un référencement Google en béton armé, garantissant à la plateforme d’arriver en tête des propositions pour chaque requête en rapport avec les produits qu'elle propose.

Plus globalement, la stratégie de Temu repose sur la création d'une urgence psychologique chez les consommateurs. Des messages tels que « quantités limitées, déstockage » ponctuent la page d'accueil, accompagnés de compteurs à rebours pour des « ventes flash » ou des frais d'envoi gratuits. Selon Ilfynn Lagarde, expert en psychologie du marketing, interrogée par France Info, cette stratégie exploite la peur de passer à côté d'une opportunité, générant un sentiment d'urgence et favorisant la consommation compulsive.

Et ça ne s’arrête pas là. Après le paiement, Temu utilise les données personnelles de ses consommateurs pour inonder les boîtes mails et les téléphones de promotions, allant de messages félicitant de l’obtention d’une offre à un euro à des incitations agressives à l'achat, révèle une enquête de Ouest France.

Le vrai coût de ses bonnes affaires 

Tout comme Shein, le modèle consumériste de ce nouveau géant de l'e-commerce entraîne d'importantes conséquences environnementales. Manon Richert, responsable communication pour l’association Zero Waste France, citée par Grazia, dénonce « une publicité très agressive dont la démarche va à l’encontre de toute sobriété, qui est pourtant nécessaire face à l’urgence environnementale ». Avec plus de 1,6 million de cyber visiteurs quotidiens rien qu’en France, d’après Médiamétrie, Temu inonde les marchés occidentaux de produits en provenance directe de Chine, engendrant des expéditions aux lourdes émissions carbone. 

Côté durabilité, Temu pèche, puisque ses produits, souvent en plastique, dérivé du pétrole, se retrouvent à la poubelle en un temps record. En cause, leur mauvaise qualité, parmi les griefs les plus cités sur Trustpilot, où 36 % des avis comportent « 1 étoile » (note la plus basse). « J'ai cédé à l'attractivité de leur site, mais c'était une erreur. Les articles sont de mauvaise qualité. Les photos sont trompeuses. C'est une leçon. Je ne céderai plus aux mirages », écrit ainsi Françoise. Thierry, lui, déplore que sa montre connectée payée 20 euros se soit cassée « en moins d’une semaine ». Bref, les failles sont telles que les économies réalisées par l’acheteur apparaissent finalement illusoires.

En somme, en évitant Temu et ses compères (Shein, Wish, etc.) dans vos achats de Noël, vous pouvez privilégier des alternatives plus durables et respectueuses de l'environnement. Le greenwashing de Temu qui prône un « engagement permanent » pour l’environnement par le biais de son action Trees for the Future consistant à « planter des arbres dans toute l’Afrique » ne dupera personne.

Félicité Dussel