Aller au contenu principal
Par Carenews INFO - Publié le 18 février 2022 - 17:00 - Mise à jour le 25 février 2022 - 10:28 - Ecrit par : Lisa Domergue
Recevoir les news Tous les articles de l'acteur

Présidentielle 2022 : Peut-on contenir l’abstention chez les jeunes ?

Crise de la représentation, désintéressement, lassitude… nombreux sont les symptômes qui pourraient faire craindre un fort taux d’abstention chez les jeunes lors de l’élection présidentielle 2022. À moins de deux mois du premier tour, des initiatives telles qu’Elyze pourraient-elles changer la donne ?

Présidentielle 2022 : Peut-on contenir l’abstention chez les jeunes ? Crédit photo : iStock.
Présidentielle 2022 : Peut-on contenir l’abstention chez les jeunes ? Crédit photo : iStock.

 

Difficile d’être passé à côté des opérations de communication des Jeunes avec Macron et Jeunes & Jadot le 14 février dernier à l’occasion de la Saint-Valentin. Les deux mouvements ont créé des profils sur les applications de rencontre avec des messages tels que « Viens matcher avec la démocratie » ou encore « Adopte un vert ». Mais que valent réellement ces « coups de communication » ? Pour Pascal Perrineau, politologue et professeur à Sciences-Po, « cela ne suffit pas pour que les jeunes aillent voter. Ils ne sont pas idiots, ils savent très bien que tout cela est du théâtre. »

Pourtant, après les taux d’abstention « vertigineux » des précédentes élections régionales et départementales, atteignant plus de 80 % chez les 18-34 ans, l’heure est à la reconquête d’une population électorale délaissée, incomprise et parfois oubliée. « Il y a plusieurs symptômes qui montrent que cela ne sera pas facile de les faire revenir en masse vers les urnes », constate-t-il. 

Les jeunes ne se sentent pas représentés

Diplômé d’une école de journalisme, Titouan fait régulièrement le choix de ne pas voter aux élections. La principale raison, un décalage trop important entre les élus politiques et « nous ». « J’ai l’impression que nous assistons à un jeu de chaises musicales et qu’aucun d’eux ne pensent à la population. » Pour lui, la politique ne devrait d’ailleurs pas être un métier.

Titouan fait partie de ces huit Français sur dix qui estiment que les élites politiques, économiques et médiatiques « ont des intérêts fondamentalement différents de ceux de la grande majorité de la population », comme l’a rapporté une étude menée par l’Ipsos publiée en avril 2020. Cette crise de la représentativité, selon laquelle la classe politique censée représenter les citoyens est déconnectée de toutes les réalités, ne date pas d’hier. Pour Pascal Perrineau, il faut repenser le système politique dans son intégralité :

Il manque de jeunes dans les grands appareils politiques. Lorsqu’il y en a, ils sont déjà devenus des professionnels de la politique. Les autres jeunes ne se retrouvent que très peu dans ce type de profils.

« Moins de buzz plus de propositions »

À ce symptôme, Pascal Perrineau ajoute l’hypothèse d’un désintéressement des jeunes quant aux sujets abordés dans les débats, qu’ils regardent « comme un spectacle lointain ». Immigration, délinquance, pouvoir d’achat ou encore transmission du patrimoine… Ces sujets « ne les interpellent pas ». Une étude menée par Harris interactive pour Challenges auprès de Français âgés de 16 à 25 ans a d’ailleurs démontré que la santé (36 %), l’emploi (33 %) et l’égalité femmes-hommes (30 %) étaient les trois thématiques qu’ils souhaitaient  voir émerger, suivies de la lutte contre les inégalités (27 %). L’environnement arrivant étonnement en huitième position.

Pourtant, le manque d’écologie et d’environnement dans les débats actuels est décrié par de nombreux jeunes. Lors d’une conférence organisée par Sciences Po, le journaliste Ali Baddou a demandé aux participants, majoritairement des étudiants : « Parle-t-on assez d’écologie dans cette campagne ? ». La réponse est unanime : « Non ». Un constat que déplore également Mickaël, jeune illustrateur de 27 ans qui, pour la première fois, n’ira pas voter en avril : 

Je ne me retrouve pas dans les programmes. Je sais que je fais partie de la société, que mon vote peut être utile, mais cette société n’est pas active sur les thématiques qui me concernent.

Même constat pour Titouan, qui préférerait voir les thématiques de l’écologie, la santé et la gestion de la pandémie au centre des débats plutôt que les « buzzs » sur d’autres candidats. « On ne se concentre pas assez sur les véritables problèmes ».

Quid du vote blanc ? 

Pour le jeune journaliste, une chose pourrait le faire revenir aux urnes, la prise en compte du vote blanc. Un moyen pour les jeunes « d’exprimer leur insatisfaction », comme l’a défendu l’économiste Julia Cagé lors de la conférence de Sciences Po. D’autres aimeraient voir mis en place le vote à jugement majoritaire. Ce mode de scrutin, utilisé lors de la Primaire Populaire qui a porté Christiane Taubira à l’élection présidentielle, permet aux citoyens d’attribuer une mention allant de « très bien » à « passable » pour chaque candidat.

Cette remise en question du système électoral, Pascal Perrineau l’observe également : « Il y a l’idée qu’il pourrait y avoir d’autres modes de consultations démocratiques : la démocratie directe, référendaire ou encore participative qui pourraient se substituer à la démocratie élective. »

Pourtant, il faudra faire sans pour l’élection présidentielle de 2022. Pour contenir l’abstention et (re)donner envie aux jeunes de voter, de nombreuses initiatives ont vu le jour. 

Elyze, l’appli pour connecter les jeunes à l’élection

Dès sa sortie, ce « Tinder de la présidentielle » a fait le buzz avec 1,2 million de téléchargements en moins de deux semaines. Elyze fait « matcher » des propositions de candidats avec l’utilisateur. Elle a rapidement été sous le feu des critiques, notamment sur la question de la gestion des données personnelles. N'ayant sûrement pas envisagé un tel succès, les deux jeunes cofondateurs ont rapidement fait preuve de bonne foi en laissant l'application en open-source et en assurant que toutes les données des utilisateurs seraient supprimées. 

Malgré les réserves de certains, Pascal Perrineau voit d’un bon œil ces initiatives : « Tout ce qui se présente sous une forme un peu ludique, et amène les jeunes à construire leur opinion va dans le bon sens. »

Lutter contre les mal-inscriptions

Des associations se sont également positionnées sur le créneau des mal-inscriptions. On compterait pas moins de sept millions de « mal-inscrits » en France, dont près de la moitié (43 %) des 25-29 ans. Pour lutter contre l'un de ces facteurs d’abstention, l’association Tous Élus a lancé une campagne d’inscription sur les listes électorales, « Tous Inscrits ». Grâce à une plateforme, l’association souhaite accompagner les moins de 30 ans à s’inscrire sur les listes électorales. 

« Repenser l’éducation citoyenne »

Outre ses mesures court-termistes « qui cherchent à aider les jeunes à se repérer lors d’un grand événement politique », Pascal Perrineau prévient : « Faire revenir les jeunes à la politique sera un combat de longue halène. » Pour lui, la lutte contre l’abstention passera par l’éducation citoyenne en habituant, par exemple, dès le plus jeune âge les Français à des pratiques démocratiques. 

 

Lisa Domergue 

Fermer

Cliquez pour vous inscrire à nos Newsletters

La quotidienne
L'hebdo entreprise, fondation, partenaire
L'hebdo association
L'hebdo grand public

Fermer