Staying Alive : une application vitale en cas d'urgence cardiaque
Chaque année en France, 50 000 arrêts cardiaques surviennent, mais moins de 10 % des victimes survivent. Un taux qui reste stable depuis deux décennies en raison d’un temps d’intervention des secours trop élevé. Pour accroître les chances de survie, l'application Staying Alive mobilise des citoyens volontaires situés à proximité de la victime afin de prodiguer au plus vite les premiers secours.
10 % de chance de survie en moins : voilà l'impact de chaque minute qui passe en cas d'arrêt cardiaque. En principe, il n’y a que quatre minutes pour agir. Pourtant, en France, les secours mettent en moyenne 13 minutes à intervenir. « En matière d’arrêt cardiaque, l’ennemi numéro 1 à combattre c’est le temps », résume Paul Dardel, médecin urgentiste de formation et cofondateur de l’application Staying Alive.
Pour tenter de répondre à ce problème, deux développeurs ont eu l’idée de faire intervenir des tiers, géographiquement proches de la victime, pour réduire au maximum le temps de sa prise en charge et augmenter ses chances de survie.
Créée en 2010, Staying Alive devait initialement cartographier les défibrillateurs présents en France, pour permettre aux bénévoles inscrits sur l’application ou aux témoins d’un arrêt cardiaque de localiser et récupérer l’équipement en attendant l’arrivée des secours. Une initiative née d'un constat simple : malgré un décret autorisant l'utilisation des défibrillateurs par tous en 2007, « aucune campagne officielle n'a informé le grand public sur cette possibilité », dénonce Paul Dardel. Le fondateur de l'application avait ainsi voulu mettre à disposition de tous un outil qui permette à chacun d’identifier et de localiser ces défibrillateurs.
Citoyens sauveteurs : « acteurs des premières minutes de l’urgence vitale »
En 2017 le concept devient plus ambitieux : l’application transforme les bénévoles de Staying Alive en « acteurs solidaires et engagés des premières minutes de l’urgence vitale qu’est l’arrêt cardiaque ». En signant un partenariat avec la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris, les services de secours peuvent désormais « déclencher » des citoyens volontaires, formés ou non, lorsqu’ils reçoivent un appel au 18 ou 112 pour arrêt cardiaque.
Initié à Paris, le service a été diffusé plus largement en France. Sept ans plus tard, les citoyens sauveteurs forment une communauté d’environ 330 000 bénévoles et couvrent 85 départements. « C’est à peu près une intervention toutes les 20 minutes, soit environ 20 000 interventions des citoyens sauveteurs en 2023 », précise Paul Dardel.
Ces bénévoles se sont vu reconnaître un statut spécifique, celui de « collaborateur occasionnel du service public ». Ce statut leur permet d’être assurés par l’État dans le cas où un incident surviendrait au cours de leur intervention.
Pour être citoyen sauveteur, il n’est pas indispensable d'être formé aux premiers secours. « Lorsque les services de secours alertent les citoyens sauveteurs, l’algorithme décide d’envoyer le volontaire directement vers la victime pour qu’il réalise un massage cardiaque s’il y est formé. S’il n’y est pas formé, l’algorithme le dirigera vers un défibrillateur pour l’amener vers la victime », explique le fondateur de Staying Alive. « Pour chaque intervention, plusieurs bénévoles sont sollicités », affirme Paul Dardel. L’algorithme identifie la formation, la distance, la compétence du citoyen sauveteur pour faire ses choix.
Un taux de survie doublé
Difficile d’évaluer exactement le nombre de personnes que l’application a sauvées depuis 2010. Toutefois, en 2020, une étude menée à partir des données compilées par les pompiers, a permis de mesurer que le taux de survie d’une personne victime d’un arrêt cardiaque est doublé en cas d’intervention d’un citoyen sauveteur. À Paris c’est encore plus prometteur : le taux de survie, qui est de 15 % en moyenne, grimpe à 35 % avec l’intervention d’un volontaire. La proximité des bénévoles, qui sont généralement situés entre 250 mètres et 2 kilomètres de la victime, fait gagner un temps considérable dans cette course contre la montre.
Un problème de taille persiste néanmoins : les Français sont encore trop peu nombreux à être formés aux premiers secours (moins de 30 %) et beaucoup ne connaissent pas l’existence de ce système d’alerte. La vraie solution, selon Paul Dardel, est de former massivement la population. Il y a selon lui, un enjeu de communication : « à la télé on parle de sécurité routière, de vaccination, mais jamais d’arrêt cardiaque ».
Staying Alive constitue donc une réponse citoyenne et engagée pour la lutte contre l’arrêt cardiaque. Chaque mois, 5 000 à 6 000 nouveaux citoyens sauveteurs rejoignent la plateforme.
Félicité Dussel