[POINTS CLÉS] L'interview de Benjamin Bellegy, directeur de WINGS

Un impératif : s’organiser partout pour avoir une parole collective

Au niveau mondial c’est  WINGS, créé en 2000 par un groupe de fondations et de centres de fondations, qui joue le rôle de réseau et de plateforme globale pour renforcer le secteur de la philanthropie dans le monde. Cette association regroupe aujourd’hui 203 membres dans 60 pays. Ses membres sont soit des réseaux soit des structures qui appuient le secteur de la philanthropie au niveau national, régional ou sur des thématiques spécifiques. WINGS les aide à être mieux équipées dans leurs différents axes de travail. Elle n’apporte pas seulement des services à ses réseaux et ses associations, mais aussi travaille avec eux comme un catalyseur pour impulser des changement dans le secteur de la philanthropie. Elle aussi veut augmenter les ressources existantes et les rendre plus efficaces.

WINGS travaille sur trois axes : 

• Aider les acteurs à promouvoir des pratiques qui sont à même d’apporter un changement systémique, plus structurel, dans la société pour aller au-delà d’un rôle de filet de sécurité
• Jouer un rôle de plaidoyer au niveau des gouvernements ou des organisations multilatérales pour essayer de créer au niveau mondial un environnement légal, qui permet à la philanthropie de jouer pleinement son rôle. En effet, dans de nombreux pays et régions dans le monde, il existe des contraintes, des restrictions parfois démesurées avec un environnement qui ne favorise pas la création de fondations ni l’expression de la société civile
• transformer le secteur de la philanthropie, pour disposer d’une infrastructure, d’un écosystème d’acteurs indispensable pour stimuler et soutenir le secteur, tels les réseaux, les plateformes de dons, les structures qui peuvent faciliter le plaidoyer.

Cette organisation supra nationale joue à plein son rôle de rassembleur, de développeur. Elle popularise la notion de philanthropie et montre comment elle peut s’organiser dans tous les pays pour mener des actions au profit de tous et répondre aux besoins de la population. Elle permet la rencontre d’organisations assure des formations, apporte une aide à la structuration et propose nombre de publications pour aider à la connaissance et reconnaissance de la philanthropie. 

L’interview montre comment après s’être développé aux États-Unis et en Europe, WINGS participe à mettre en avant les nouvelles formes de philanthropie en Amérique du sud, en Afrique et en Asie qui sont en plein développement.

Si l’action structurelle est importante, l’approche sectorielle permet des regroupements sur de thématiques sociales ou environnementales qui concerne toutes les populations. 

Par exemple l’action sur le climat. L’initiative a démarré au Royaume-Uni avec ACF puis fut reprise dans d’autres pays d’Europe avec le soutien de Philea. La France est l’un des pays européens qui a lancé une coalition des fondations pour le climat.  La Fondation Carasso  au sein du Centre Français des Fondations a lancé l’adhésion au projet par un manifeste déjà signé par près de 170 fondations françaises. WINGS a décidé de soutenir ce travail et de le porter au niveau international. Pour que les acteurs philanthropiques embrassent les enjeux du 21^e siècle, il faut qu’ils intègrent la question du climat dans leur travail, dans leur stratégie, dans leurs opérations, quelles que soient leurs missions propres. Cela permet aux fondations de jouer leur rôle vis-à-vis des générations futures tout en adoptant des approches plus holistiques qui augmenteront leur impact sur leur cœur de mission (éducation, culture, santé, ou autre). 

D'autres actions sectorielles sont décrites comme la préservation des libertés civiles, la circulation des fonds pour soutenir les acteurs locaux…

Le secteur philanthropique paradoxalement — alors qu’il représente des montants très importants — ne s’était jamais organisé au niveau mondial pour avoir une voix collective et promouvoir ses propres intérêts. Même si on manque de données, on sait que les fondations ont des dotations qui représentent au minimum de 1 500 milliards de dollars (selon le rapport Harvard HSBC de 2018). Si l’on prend ce secteur sous l’angle d’une industrie, c’est peut-être la seule industrie de cette dimension-là qui ne s’est jamais organisée collectivement au niveau global. WINGS a donc commencé à jouer ce rôle, mais il faut du temps à la plupart des fondations pour comprendre qu’il est très important d’investir dans ces actions collectives. C’est pour cela que paradoxalement pour fonctionner et se développer, il est nécessaire pour WINGS de chercher des fonds provenant d’institutions internationales comme l’Europe. 

Cette contrainte est bien connue dans notre pays où il y a toujours des difficultés à trouver suffisamment de fonds pour des actions structurantes pour le milieu. Des fondations et associations financent les collectifs comme : France générosités, le Centre Français des fondations, l’Admical, notamment mais elles ne sont pas assez nombreuses. La culture du travail en commun sur des objectifs partagés demande du temps et de la persuasion. 

Cette interview détaille bien le long chemin à parcourir pour favoriser le développement de la philanthropie partout dans le monde. Cela sera pour beaucoup de lecteur la découverte des multiples actions menées au niveau international par la volonté d’hommes et de femmes qui croient au rôle essentiel de la société civile et au renforcement de ses structures.