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Par Fondation Raoul Follereau - Publié le 7 juillet 2021 - 12:51 - Mise à jour le 7 juillet 2021 - 16:56
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La lèpre fait toujours des ravages à Madagascar

Le projet de recherche PEOPLE entre dans sa troisième phase d’exécution. Il prouve que la lèpre se transmet toujours.

Initiée en janvier 2019, le projet PEOPLE est un essai clinique multicentrique financé par l’Union Européenne qui vise à évaluer la faisabilité et les modalités d’application d’un traitement préventif. Cette méthode, appelée chimio-prophylaxie, permettrait de rompre la chaîne de transmission de la lèpre en administrant à l’entourage du malade de la Rifampicine, le traitement contre la lèpre. Le projet est mené en parallèle à Madagascar et aux Comores pour une durée de 4 ans. L’étude à Madagascar est diligentée par la Fondation Raoul Follereau en partenariat avec le ministère de la Santé malgache avec l’appui du laboratoire du Centre d’Infectiologie Charles Mérieux. Le docteur Bertrand Cauchoix, médecin de la Fondation Raoul Follereau et représentant à Madagascar, est en charge de l’étude avec l’appui de quatre co-chercheurs malgaches, dont Stéphanie Ramboarina. Le projet a quatre bras d’études : un bras de contrôle sans intervention, un bras avec traitement des personnes vivant dans le domicile du malade, un avec traitement aux personnes vivant à 100 mètres et un bras avec traitement dans un périmètre de 100 m seulement des personnes présentant des anticorps spécifiques contre la lèpre. Dans un premier temps, dans une phase dite année 1 achevée en décembre 2020, les équipes ont dépisté en porte-à-porte 20 000 habitants du district de Miandrivazo, une zone rurale peu accessible. En année 2, le traitement a été instauré en fonction des 4 bras d’étude.

L’importance du dépistage de masse

« Le projet a confirmé l’efficacité d’un dépistage actif de masse en porte à porte dans le cas où le système de soin est faible », selon le Stéphanie Ramboarina, à Madagascar, « l’expertise en dermatologie et léprologie reste limitée dans certaines zones peu accessibles au système de santé. »

La première phase du projet a révélé une très forte prévalence de la lèpre dans la région avec 73 cas dépistés sur 20 000 personnes. « Nous avons une prévalence de 36,5 personnes pour 10 000 habitants. Or, le seuil d’élimination selon l’OMS est de 1 cas pour 10 000 habitants. On voit donc que, malgré l’annonce OMS de l’atteinte du seuil d’élimination au début des années 2000, la lèpre reste un problème majeur et les vrais chiffres sont différents dès l’instant où on dépiste massivement. », souligne Stéphanie.

La deuxième année, les équipes ont réalisé un autre dépistage sur les mêmes personnes. « Nous avons découvert 7 nouveaux cas. Ces deux premières années ont mis en évidence un foyer infectieux brûlant mais aussi et surtout en année 1 un réservoir de cas non dépistés depuis des années. Ils représentent un réservoir de malades qui n’avaient pas accès aux soins. La lèpre est présente à bas bruit, se développe lentement et continue de se transmettre. Le rôle de la prophylaxie est de protéger les contacts sociaux et du domicile en leur donnant une dose de Rifampicine » Dans ces recherches, une attention toute particulière est portée sur l’exploration de nouveaux moyens de dépistage. « Nous avons encore beaucoup à apprendre sur le diagnostic de la lèpre », souligne Stéphanie Ramboarina.

Être utile aux malades

À Madagascar, près de 2000 nouveaux cas de lèpre sont dépistés chaque année. Il est l’un des 10 pays les plus touchés en raison de la grande pauvreté et du manque d’accès aux soins. Aux yeux du docteur Cauchoix, quels que soit les résultats de l’étude, le plus important est « d’être utile aux malades. Grâce à cette études, nous dépistons en masse toutes les dermatoses, nous les traitons et réalisons de a sensibilisation à l’hygiène. »

Le projet est positif pour Madagascar et le Programme National lèpre du Ministère de la Santé y est étroitement associé avec la Fondation Raoul Follereau. C’est une première pour Madagascar d’accueillir un projet d’une telle envergure avec des financements européens et l’appui de la Fondation Raoul Follereau. Mais l’intervention est lourde est difficile au niveau logistique et financier. « Pour moi, c’est un véritable plaidoyer à la lèpre à Madagascar, même pour les décideurs et les hautes autorités de santé du pays. Il est important de montrer que la lèpre doit rester une préoccupation nationale. Nous tenterons de continuer à réaliser un dépistage actif avec le suivi des patients et le diagnostic dans d’autres régions endémiques de Madagascar. Il faut trouver des réservoirs et sensibiliser à la lèpre si nous voulons contrôler la maladie », explique Stéphanie Ramboarina.

Dans le projet PEOPLE, un volet anthropologique est intégré dans l’approche du patient. « Dans la composante de recherche et de diagnostic clinique, la fondation Raoul Follereau porte un aspect social et médical fort. Il faut toujours mettre l’intérêt du patient en premier dans l’aspect recherche, dépistage et traitement. Nous avons une approche intégrée pour avancer dans la lutte contre la lèpre et plus généralement sur les maladies dermatologiques. Par ce biais, nous éduquons les populations dans une démarche de soins et d’hygiène. Nous sommes très bien accueillis par les populations et nous travaillons en étroite relation avec le district sanitaire qui s’implique également. De ce projet ressortent également des améliorations dans la formations des personnels de santé impliqués. » 

Un plaidoyer pour Madagascar

En 2006, l’OMS a déclaré que le seuil d’élimination de la lèpre avait été atteint à Madagascar. Ceci a entrainé une confusion avec éradication ; l’élimination étant un concept arbitraire signifiant qu’avec moins de 1 cas pour 10 000 habitants. La lèpre n’était plus un problème majeur. Mais les chiffres sont basés sur du dépistage passif. Or, les populations pauvres des zones rurales reculées ont peu accès au système de santé et ne se font pas dépister.

Les premiers résultats du projet PEOPLE confirment que la lèpre n’est pas éliminée à Madagascar. « Il y a une nécessité de contrôle de la maladie et c’est ce que nous tentons de faire. Parallèlement, nous rédigeons des articles scientifiques sur le sujet afin d’être visibles dans le monde scientifique et de faire un plaidoyer pour Madagascar. Nous pourrons ainsi postuler à d’autres financements pour continuer nos recherches », espère Stéphanie Ramboarina.

La pandémie Covid-19 a entraîné des difficultés majeures puisque de nombreuses régions sont encore fermées, les systèmes de santé sont saturés, l’approvisionnement en médicament a été perturbé et les missions de terrain retardées. « J’ai aussi le devoir de protéger les équipes ainsi que les populations encore préservées du Covid-19, car la santé doit être perçue dans sa globalité », conclut le docteur Cauchoix.

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