Dis Flavie : c'est quoi l'arrondi ?
L’arrondi appartient au domaine du micro-don. Il s’agit, lors d’une dépense, de proposer au consommateur d’arrondir à l’euro supérieur. La différence est reversée à des associations partenaires de l’opération. C’est l’équivalent virtualisé des tirelires placées sur les comptoirs et près des caisses. Un don minime, facile et qu’on ne sent pas passer.
La bonne idée, c’est que le donneur n’a aucun effort à faire, le don lui est suggéré et on automatise le processus d’encaissement. Une goutte d’eau dans l’océan ? Pas tant que ça, l’arrondi estime sa récolte entre 5 à 10 millions par an !
Initié dans les supermarchés, on le retrouve aujourd’hui dans divers domaines : services bancaires, bulletin de salaires, achats en ligne…
Pour prendre un exemple concret, l’arrondi est une méthode employé par les banques pour proposer à leurs clients un moyen d’épargner sans s’en rendre compte. Depuis quelques temps, cet arrondi est utilisé à des fins philanthropiques avec différentes options. LCL propose par exemple : « Vous pouvez choisir de verser tout ou partie de vos arrondis à l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque. De plus, si vous décidez de personnaliser votre carte bancaire aux couleurs de l’association, LCL reverse l’intégralité de la commission de personnalisation à cette association ! » La banque propose également un récapitulatif annuel pour ouvrir les droits à la réduction fiscale.
L’arrondi intègre le processus global de ce que l’on appelle la générosité embarquée. Les gros avantages de cette formes de dons sont l’accumulation de dons qui paraissent anodins et la facilité pour le donateur. L’idée est vraiment brillante. On peut, comme toujours, y trouver quelques limites. Celle que j’y vois, qui sont des freins plus que des contraintes, sont un effet d’étouffement si l’arrondi devient omniprésent dans notre quotidien et la déresponsabilisation du don.
L’arrondi peut avoir un effet « déculpabilisant » et détourner l’attention des donateurs et des mécènes d’autres opérations. De plus, le donateur est dirigé vers les organisations partenaires sans réflexion de sa part sur son engagement. La limite qui peut exister serait en quelque sorte que la forme du don cache la cause qu’il soutient.
Flavie Deprez
Des questions sur le mécénat, le monde associatif ou la philanthropie ? Toutes les semaines retrouvez les réponses de Flavie DEPREZ :
28 ans, un parcours universitaire varié - Sciences Po Lille (administration publique), Paris-Dauphine (option politique et culture), Master’s program of Cultural and Creative Industries au King’s College à Londres ... Une expérience professionnelle multiple en fundraising (Children’s Discovery Center à Londres, Lille 3000) et en politique culturelle au sein du Secrétariat général du Ministère de la culture et de la communication (chargée de mission de valorisation du patrimoine immatériel culturel) ... Flavie a remporté l’Oscar du Mécénat Culturel Jacques Rigaud de l’Admical en 2012 avec l’entreprise Doublet, dont elle était la responsable du mécénat.
Experte, elle accompagne aujourd'hui en tant que consultante indépendante les différents acteurs concernés dans des partenariats de mécénat aux enjeux croisés.