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Par Carenews PRO - Publié le 28 juin 2018 - 10:22 - Mise à jour le 3 juillet 2018 - 14:24
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[MÉCÉNAT CULTUREL] Église & Mécénat : Paris dit amen au mécénat (seconde partie)

Bernard Hasquenoph, fondateur de Louvre pour tous, signe pour carenews.com une rubrique mensuelle. À travers des chroniques étudiant quelques cas de mécénat culturel, Bernard Hasquenoph retrace l'historique des relations entre de grandes marques, souvent du luxe, et les institutions culturelles françaises. Croisant les problématiques de la philanthropie, du marketing, de l'image, du financement, du parrainage... ses récits sont au coeur d'une spécificité bien française, celle du mécénat culturel traditionnel, devenu nécessaire et omniprésent, parfois sans le dire, dans les musées, établissements publics, opéras, théâtres... La seconde partie de cette chronique s'intéresse aux relations entre la Ville de Paris et le diocèse de Paris pour financer des chantiers de restauration aux coûts gigantesques.

[MÉCÉNAT CULTUREL] Église & Mécénat : Paris dit amen au mécénat (seconde partie)
[MÉCÉNAT CULTUREL] Église & Mécénat : Paris dit amen au mécénat (seconde partie)

 

Un mécénat encore timide en France

« En France, les entreprises sont très prudentes en ce qui concerne la religion. Elles ne souhaitent pas être accusées de privilégier tel ou tel culte, même en ce qui concerne la restauration du patrimoine », indique Philippe de Cuverville, homme d’affaires reconverti économe du diocèse de Paris. La laïcité à la française, frein au mécénat ? On l’avait déjà vu avec le musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme. Et l’opération « Le plus grand Musée de France », lancée en 2013 par la Sauvegarde de l’Art Français pour la restauration d’œuvres d'art conservées dans des églises en partenariat avec des grandes écoles, est née de ce constat. Ce serait même vrai pour des monuments aussi emblématiques que les cathédrales dont l’entretien revient à l’État. Si plusieurs bénéficient de soutiens privés grâce à des sociétés d’Amis, de banques parfois avec une prédilection pour les vitraux, ce n’est jamais pour le gros oeuvre. Face à cette réalité, les responsables de Notre-Dame de Paris qui nécessite 60 millions d’euros de travaux (urgents) sur dix ans dont un tiers dépendra du mécénat selon un accord-cadre inédit signé en 2017 avec le ministère de la Culture, se sont tournés vers les États-Unis, y envoyant des émissaires et créant une fondation spécifique.

 

Partenariat entre le diocèse et la Ville de Paris pour sauvegarder le patrimoine architectural religieux C’est le diocèse de Paris qui a initié le mouvement, structurant la recherche d’argent complémentaire face à une municipalité incapable d’entretenir correctement les 85 églises sur 96 lieux de culte à sa charge, avec 130 orgues et 40 000 œuvres d’art. Non pas qu’aucun chantier ne soit mené, mais « malgré d’importants efforts, les moyens financiers apportés par la Ville de Paris demeurent très insuffisants », note avec diplomatie la Fondation Avenir du Patrimoine à Paris (FAPP) créée en 2014 pour fédérer les énergies et collecter des fonds privés. Là où Anne Hidalgo annonce un plan de sauvegarde de 20 églises pour 80 millions d’euros (2015-2020), auxquels s’ajoutent 11 millions de l’État, un professionnel avisé évalue leurs besoins au quintuple. Gauche et droite s’étant succédé à l’Hôtel-de-Ville se rejettent la responsabilité d’un état de dégradation tel que la Ville a été contrainte d’intervenir en urgence plusieurs fois pour chutes de pierre et que des fresques risquent la disparition. Car contrairement à ce que l’on croit, la loi de 1905 n’oblige pas le propriétaire à entreprendre des travaux mais engage seulement sa responsabilité en cas d’accident. À l'invective et aux jérémiades, l’Église préfère le pragmatisme, acceptant sans état d'âme le recours aux bâches publicitaires et travaillant de concert avec la Ville qui s'est également doté d'un fonds dédié à la recherche de mécénat. Ainsi, début 2018, Paris a signé une convention avec la Banque Transatlantique pour secourir les verrières de l’église Saint-Philippe-du-Roule qui, très dégradée, va enfin bénéficier de travaux par la ville pour 8 millions d'euros. De son côté, la FAPP en a déjà récolté 4 sur 30 projets, offrant comme contrepartie des visites privées des édifices. N’y a-t-il pas un risque de désengagement public ? Robert Leblanc, président de la fondation et PDG d’AON France, ne le croit pas : « Ce que nous faisons s’ajoute à ce que porte la Ville ; loin de dissuader ses responsables d’assumer leur mission, notre engagement à leurs côtés les encourage ». Laurence Fouqueray, cheffe du département des édifices cultuels et historiques à la Mairie de Paris ne dit pas autre chose : « En regard de la charge infinie, toutes les énergies sont nécessaires. » Lancée dans un projet d'envergure, l’église Saint-Germain-des-Prés a servi de modèle. Depuis 2011, épaulés par des bénévoles, autre force de l’Église avec la culture du don, son curé en charge multiplie les initiatives pour réunir les 5,2 millions d'euros nécessaires à la restauration des décors intérieurs déjà bien engagée, la Ville assumant les travaux préalables (800 000 euros) : urne ultra visible, dons en ligne, démarchage de proximité, site internet, soutien de personnalités, fonds de dotation en France et aux États-Unis, dîners de bienfaisance, vente caritative chez Christie’s, adoption nominative d’étoiles de la voûte… De même, la Madeleine promettait un « certificat d’ange gardien » à qui donnerait pour la restauration de statues. L’Église teste et innove. À Saint-Pierre de Montmartre très fréquentée par les touristes, une borne de paiement sans contact a été installée, pour des dons de 3 euros. D’autres pourraient voir le jour. Fin 2017, la FAPP a passé un cap, embauchant Gabrielle de la Boulaye, diplômée du Certificat français du fundraising de l’ESSEC. Mission de cette ex-administratrice d’orchestres : coordonner la recherche de mécénat pour une douzaine d’églises, en accompagnement du programme de la Ville de Paris. Celle-ci insiste sur la dimension culturelle de ce patrimoine : « Ce sont des éléments artistiques qui appartiennent à tous, et pas qu’aux catholiques ». Le mécénat ne supportant pas la dilution, elle concentre ses efforts sur des projets spécifiques : le pronaos de la Madeleine, les clocher et horloge de Saint-Louis-en-l’Île ou les vitraux de Saint-Merry parmi lesquels, beau symbole, la Verrière des donateurs.

 

Lire la première partie : Église et mécénat, l'appel du don.

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