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Par Carenews INFO - Publié le 15 octobre 2019 - 16:00 - Mise à jour le 3 février 2020 - 11:52
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Chemins d'avenirs, du mentorat pour les jeunes issus de la ruralité

L’association Chemins d’avenirs est la première structure en France à proposer à des collégiens, des lycéens et des étudiants issus de la ruralité de bénéficier de l’accompagnement d’un parrain issu d'un autre territoire. Et ce indépendamment de leurs résultats scolaires et de critères sociaux.

Chemins d'avenirs, du mentorat pour les jeunes issus de la ruralité
Chemins d'avenirs, du mentorat pour les jeunes issus de la ruralité

À l’origine de Chemins d’avenirs, il y a Salomé Berlioux. Hypokhâgne au lycée Fénelon à Paris, master Affaires publiques à Sciences Po, stage à l’Elysée, master à la Sorbonne et Normale Sup’, jusqu’à devenir conseillère et plume de Jean-Marc Ayrault… Le parcours de cette femme de 30 ans a de quoi en faire rêver plus d’un. Mais Salomé Berlioux aime à rappeler les obstacles qu'elle a rencontrés sur son chemin. Fille de comédiens et élevée par un beau-père infirmier et ostéopathe, elle grandit à Neure, dans l’Allier, un hameau d’une centaine d’habitants. Adolescente, elle ne s’imaginait pas du tout intégrer une grande école. Mais avec le temps, Salomé Berlioux a développé une conviction : au-delà des déterminismes sociaux existent des déterminismes géographiques. À classe sociale équivalente, un jeune issu des zones rurales ne bénéficiera pas des mêmes opportunités qu’un jeune urbain.

Dans le manifeste « Les Invisibles de la République », Salomé Berlioux détaille la mécanique complexe des inégalités territoriales que subissent ces millions de jeunes Français. Dans les campagnes ou les petites villes périphériques, moins dotées en infrastructures et en opportunités, il est souvent plus compliqué d’accéder à l’information permettant de s’orienter scolairement et professionnellement. Il y a aussi la question de l’autocensure : trop de jeunes issus de ces territoires ne s’autorisent pas à poursuivre des études qui leur correspondent, notamment lorsqu’elles se trouvent dans de grandes métropoles. Enfin, les jeunes des périphéries ne maîtrisent pas toujours les codes leur permettant de trouver leur voie. Par exemple, savoir qu’effectuer des stages, s’engager dans une association ou voyager constituent des atouts valorisables lors d'entretiens ou pour rechercher un emploi. 

Des filleuls sélectionnés sur leur détermination

En 2016, Salomé Berlioux a donc décidé de créer Chemins d'avenirs. L’association, en plein développement, met en relation des parrains — actifs de 25 à 65 ans désireux de faire bénéficier de leur expérience — et des collégiens, lycéens ou étudiants motivés pour être accompagnés dans leur orientation. Initialement centrée sur l’académie de Clermont-Ferrand et une centaine de filleuls, l’association formera 1000 duos de jeunes et de parrains dans 7 académies pour l’année scolaire en cours. Les actifs leur consacrent deux heures par mois à distance, pendant 18 mois. 

Les jeunes sont avant tout choisis pour leur détermination, l’objectif n’étant pas de les pousser vers de longues études à tout prix : « Chemins d'avenirs n’est pas une initiative élitiste. Nous travaillons à révéler le potentiel de nos filleuls : certains veulent reprendre la ferme de leurs parents, et d’autres devenir diplomates. Je préfère le terme d’aspiration à celui d’ambition », nous explique Salomé Berlioux, convaincue que cette jeunesse recèle d’immenses potentialités qui n’attendent que d’être révélées. 

France Bleu relate ainsi le parcours d’Angèle, 19 ans, originaire de Bourbon-l'Archambault dans l'Allier, qui a été accompagnée par Laurence, une marraine de l’association. « On a pu travailler sur ce que j'aimais vraiment, sur ce que je voulais faire, et surtout recentrer mes choix », raconte l’étudiante. Grâce aux conseils de Laurence, Angèle a intégré une classe préparatoire à l'Estaca, une prestigieuse école d'ingénieurs spécialisée en transports et en aéronautique. De son côté, Laurence s’est aussi épanouie en tant que mentor : « Grâce à Angèle, je me sens utile », confie-t-elle. Et puis on ressent en ce moment beaucoup la fracture sociale, avec le mouvement des gilets jaunes. Cette fracture sociale est terrible. Avec des actions comme celle de l’association, on peut essayer de remettre de la cohésion sociale dans le pays. » 

Vers une réponse politique

Ce projet, qui repose essentiellement sur l’engagement bénévole de ses parrains et de ses marraines est-il amené à essaimer partout en France ? Pour l’instant, grâce au bouche-à-oreille entre bénévoles et à la médiatisation de l’association, 700 candidatures spontannées de parrains ont été reçues l’année dernière. « Notre projet répond à un véritable enjeu de reconstruction du lien social et de reconnexion des territoires, qui dépasse la seule question de l’égalité des chances », explique Salomé Berlioux. En complément du mentorat, l’association a développé des programmes : coaching sur la confiance en soi, entraînement à la prise de parole en public, aides à la mobilité, soutien spécifique aux filles, accès à des offres de stages, sorties culturelles, etc. 

D’ici à 2024, l’association espère être présente dans tous les territoires ruraux, pouvoir compter sur un modèle économique solide et, surtout, susciter une réponse politique au plus haut niveau. Et c’est en bonne voie : le ministre de l’éducation nationale Jean-Michel Blanquer a missionné Salomé Berlioux pour réfléchir sur « l’orientation et l’égalité des chances dans les zones rurales et les petites villes » et rendre ses conclusions début 2020. Pour elle, il est temps que l’État se saisisse de la question, en partenariat avec les associations, les entreprises et tous les acteurs concernés. Elle l’assure, déterminée : « Je ne serai satisfaite que quand il y aura un dispositif à la hauteur de l’enjeu »

Hélène Fargues 

Cet article a été réalisé dans le cadre de la « France des solutions », en partenariat avec l’association Reporters d’Espoirs. 

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