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Par Carenews INFO - Publié le 5 décembre 2019 - 17:45 - Mise à jour le 5 décembre 2019 - 18:03
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Réforme du mécénat : qui sont les « Pélicans » ?

Depuis quelque jours, de drôles d’oiseaux font beaucoup de bruit sur la twittosphère. Il s’agit des « Pélicans », un « mouvement de dirigeants associatifs contre la réforme du mécénat ». Son porte-parole Boris Walbaum, également co-fondateur de l’association Article 1, nous explique les raisons de cette colère.

Capture d'écran du logo des Pélicans, mouvement de dirigeants associatifs contre la réforme du mécénat.
Capture d'écran du logo des Pélicans, mouvement de dirigeants associatifs contre la réforme du mécénat.

Quelle est la genèse de votre mouvement ?

Il est spontané. Nous avions pensé le lancer en juillet quand nous avons eu vent de la réforme du mécénat [elle prévoit une baisse du taux de la réduction d’impôt au titre du mécénat d’entreprise de 60 % à 40 % pour la fraction de dons supérieure à deux millions d’euros annuels, NDLR]. Celle-ci a ensuite disparu puis est réapparue sournoisement en septembre. Dans la mesure où les têtes de réseau se sont mobilisées, nous les avons laissées agir. Face au blocage actuel, il nous a paru important que les dirigeants associatifs prennent la parole directement.

Pourquoi le symbole du pélican ?

C’est un clin d’œil au mouvement des Pigeons, des entrepreneurs qui s’étaient mobilisés en 2012 sur la fiscalité des plus-values. Nous voulions un volatile qui fasse écho à ce mouvement, à la différence près que nous nous mobilisons pour des causes, et non pour des plus-values. Le pélican est l’un des symboles de l’altruisme [le pélican était au Moyen Âge un symbole d’abnégation, étant réputé capable de nourrir ses jeunes de son propre sang en cas de disette, NDLR].

Quelles sont vos craintes vis-à-vis de la réforme du mécénat ?

Elle met à risque 400 millions d’euros de dons, c’est-à-dire 25 % des dons déclarés des entreprises. Pour les associations, c’est 10 000 emplois en jeu et donc des impacts considérables sur nos actions menées auprès de ceux qui ont besoin d’aide. Dans le même temps, on constate que, depuis 2005, les associations ont perdu 10 milliards d’euros de subventions. Les dons des particuliers ont également subi une baisse importante de 210 millions d'euros, notamment du fait de décisions fiscales du gouvernement. Quelle est la solution si on nous coupe et les subventions et le mécénat ? Devenir des entreprises ? Disparaître ? C’est un très mauvais calcul pour l'État, car avec un euro public, on mobilise 5 euros au total pour l’intérêt général. Je ne connais pas beaucoup d’investissement plus rentable !

Le gouvernement estime que, dans la mesure où les entreprises bénéficient d’une baisse de l’impôt sur les sociétés, elles ne devraient pas réduire leur mécénat... Les entreprises vous ont-elles déjà fait part de leur intention de baisser leurs dons ?

Ce n’est pas vrai. Si les entreprises sont moins incitées fiscalement, elles donneront moins. On l’a bien vu avec la transformation de l’ISF en IFI, qui correspond à une baisse d’impôt : les dons ont baissé de 58 %. On s’attendait à un report sur les dons via l’impôt sur le revenu. Et bien pas du tout ! C’est ce qu’on se tue à dire : réduire l’incitation aux dons des riches, cela contribue… à les enrichir, car ils donnent moins. Ce sera pareil pour les grandes entreprises donatrices. Nous faire croire que les entreprises vont donner plus parce qu’on baisse leurs impôts, c’est méconnaître la façon dont elles fonctionnent.

Pourquoi enclencher cette mobilisation maintenant, alors que le processus législatif est déjà bien entamé ?

Ce n’est pas notre métier de faire du lobbying, on se mobilise quand c’est possible. Nous avons d’abord relayé la tribune de France générosités, mais en voyant l’absence de retour du gouvernement, nous avons voulu faire quelque chose. On s’y est mis jeudi dernier et en cinq jours, nous avons recruté quatre-vingt dix pélicans, dont de grands noms, et fait parler de nous dans les médias. Il n’est jamais trop tard pour intervenir. Même quand certaines réformes sont votées ou des décrets pris, on revient en arrière lorsque cela bloque sur le terrain.

Faut-il réformer le mécénat ?

Oui, il faut réformer le mécénat, notamment pour veiller à ce qu’il finance bien l’intérêt général. Et nous sommes également favorables à l’encadrement du mécénat de compétences comme le propose le gouvernement dans la même loi. Mais dans sa formulation, la réforme actuelle discrédite les grandes entreprises donatrices. Elle sème le doute sur leurs intentions. Elle discrédite même le fait qu’elles donnent vraiment. On a pu ainsi parler d’une « rente fiscale du mécénat captée par les grandes entreprises », ce qui est hallucinant.

Les grandes entreprises donatrices ont pourtant beaucoup aidé le secteur associatif à s’améliorer, car elles sont très exigeantes. Alors que le mécénat des entreprises se développait, on l’a stigmatisé. C’est une faute politique, car au-delà, ça met mal l’idée même du don.  

Propos recueillis par Hélène Fargues 

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