3 bonnes pratiques pour être le parfait mécène
Dans un contexte socio-économique qui se durcit, les associations ont toujours plus besoin des acteurs du mécénat pour agir en faveur de l'intérêt général. Les pratiques se multiplient, les relations associations-mécènes évoluent et font l’objet de nombreuses discussions. Quelles sont les priorités à garder en tête en tant que mécène pour amplifier l’impact positif exercé sur la société ? Optimy en a discuté avec 8 experts du secteur, voici ce que l’on retient.
Lors des panels de discussion organisés durant le Social Impact Club d’Optimy le 19 avril 2023 à Paris, Optimy a convié des personnalités issues du monde du mécénat et des associations pour discuter de la posture à adopter ainsi que des outils de soutien dont disposent les acteurs du mécénat et de la philanthropie aujourd’hui. Voici une synthèse complète des réflexions qui ont animé les échanges, articulée autour de trois bonnes pratiques.
1 - Repenser sa posture : du mécène « pourvoyeur de fonds » au mécène « accompagnateur »
Longtemps et encore majoritairement cantonné à l’octroi de soutiens financiers, le mécénat fait depuis quelques années peau neuve. On assiste au développement de partenariats pluriannuels, combinant mécénat de compétences et contribution financière par exemple, avec des mécènes partenaires qui agissent « comme des ambassadeurs auprès d’autres potentiels financeurs et/ou partenaires clés », selon Mathilde Boulay, de L’Ascenseur.
De plus en plus de mécènes se positionnent désormais aux côtés des associations non plus uniquement comme « mécènes « pourvoyeurs de fonds », mais vraiment comme partenaires accompagnateurs d’un bout chemin plus ou moins long avec l’association », explique Isabelle Hoyaux de ScaleChanger.
Ainsi, dans la mesure du possible, les mécènes sont encouragés à se questionner sur le type de soutien qu’ils peuvent et veulent apporter pour amplifier leur impact. En s’octroyant ce temps, et en mettant en place un accompagnement solide, « les mécènes se donneront non seulement l’occasion d’avoir plus d’impact évidemment, mais aussi de pouvoir raconter des initiatives et des histoires qui auront une magnitude bien plus importante. »
À titre d’exemple, la Fondation Transdev et la Fondation MNH œuvrent toutes les deux à la promotion des initiatives des associations qu’elles soutiennent. Reportages photo, organisation d’événements rassembleurs, infographies reprenant les résultats clés, etc. Ces différents contenus permettent de mettre en valeur des temps forts des projets sur les réseaux sociaux, tout en accroissant la visibilité tant de l’association que de la fondation mécène.
La nécessité de questionner et d’adopter cette attitude d’accompagnateur doit également être pensée dans une perspective d’élargissement du champ des associations soutenues et de la manière dont on part à leur recherche.
Trop souvent encore aujourd’hui, les acteurs qui obtiennent du soutien sont ceux qui ont les codes, qui connaissent le langage, qui savent où trouver l’information. Il y a donc un vrai travail à faire pour aller chercher les associations qui bossent bien, qui maîtrisent leurs projets et les bénéficiaires, mais qui n’ont pas le bon vocable employé. Il est donc question de penser le jargon, le type de données qu’il faut remplir dans les appels à projet, le type de projets que l’on veut aller soutenir et à quel point on veut bien se donner le temps. »
William Renaut, Mécénat & Co
En tant que fondations mécènes, les Fondations Transdev et MNH ont expliqué comment leurs approches s’inscrivent dans cette volonté d’accompagnement dès la phase de sourcing des associations et projets à soutenir. Alliant rencontres sur le terrain, soutien au développement de l’argumentaire, ou encore établissement d’un processus de sélection et d’instruction phasé, reposant sur des critères objectifs, la volonté de ces structures, en plus de renforcer leurs liens avec les partenaires associatifs, est de mettre en place un processus inclusif, efficace et bénéfique pour toutes les parties prenantes.
Attention, questionner et adopter cette posture de mécène accompagnateur ne veut pas pour autant dire nier le besoin primaire auquel font face toutes les associations, à savoir : le besoin de disposer de liquidités. Il ne faut pas oublier que « l’argent reste le nerf de la guerre pour les associations. Toutes les solutions d’accompagnement devraient s’inscrire en complémentarité d’un accompagnement financier et non pas venir le remplacer », précise Mathilde Boulay.
Réaliser une évaluation d’impact en tant que structure mécène tous les cinq à dix ans peut aider à prendre du recul sur la posture d’accompagnement adoptée et les résultats obtenus. Ce diagnostic stratégique réalisé via des entretiens avec les personnes en interne et avec l’écosystème permettra de « faire ressortir les enjeux clés de la fondation et les pistes d’amélioration pour augmenter son impact pour la prochaine mandature », commente Octavie Baculard de KIMSO.
2 - Mettre l’impact au cœur de sa stratégie de mécénat
Sans grande surprise, le processus de définition de sa posture en tant que mécène doit partir des besoins du tissu associatif et des bénéficiaires finaux à soutenir. D’une part, pour que la volonté d’accompagner ne devienne pas une surcharge pour les associations, comme cela peut parfois s’avérer être le cas dans le cadre de mécénat de compétences. D’autre part, parce qu’en partant des besoins d’un secteur, la fondation mécène pourra « questionner sa mission sociale et définir son rôle : qu’est-ce que l’on veut faire avec notre fondation ? Quel besoin social veut-on adresser ? », ajoute Octavie Baculard.
On retient donc qu’il faut vraiment « creuser les besoins pour écrire le bon cahier des charges, trouver les bons experts, penser le bon type d’accompagnement », remarque Virginie Commelin, Fondation Entreprendre.
En plus de dialoguer avec les associations elles-mêmes, les mécènes peuvent collaborer avec des experts les accompagnant dans le déploiement de leurs missions ou dans l’évaluation de leur impact social, pour bien comprendre les besoins du terrain, ainsi que les problématiques propres à certaines causes, voire à une organisation. L’approche collective de l’évaluation, par secteur, pourra à termes profiter à plusieurs structures, comme ce fut le cas avec le programme ACT’iCE. Cette approche est particulièrement pertinente, car, en plus d’aider à identifier les besoins, elle permet à terme d’utiliser l’évaluation comme un matériel de plaidoyer et un outil pour toucher de nouveaux mécènes.
Une autre piste intéressante pour bien identifier les besoins ayant été évoquée, et encore trop peu explorée à ce jour, est le financement de la recherche dans le monde associatif.
Les associations viennent répondre à des problèmes systémiques qui touchent vraiment à des sujets sociétaux et structurels. Pour bien les comprendre, les associations doivent aussi être accompagnées par des chercheurs. »
Mathilde Boulay, L'Ascenseur
Enfin, bien qu’aujourd’hui « l'implication des bénéficiaires dans les processus de construction des programmes reste une pratique encore trop peu explorée, elle n’en est pas pour autant moins importante », poursuit William Renaut, Mécénat&co.
3 - Accepter la part de risque et établir des relations de confiance dès le départ
Se positionner en accompagnateur, en partant des besoins identifiés au sein du tissu associatif, revient souvent à être confronté au renoncement de résultats immédiats ou sur un laps de temps court.
Les associations prennent des risques au quotidien pour déployer au mieux leurs actions, pour tenter des projets sans couverture totale niveau budget, etc.
Pour que cela fonctionne bien, il faut que la structure soit entourée de partenaires qui arrivent à comprendre cette réalité de leur quotidien et qui sont prêts à faire un bout de chemin ensemble malgré tout. »
Isabelle Hoyaux, ScaleChanger
Ce n’est pas encore suffisamment conscientisé côté mécènes, or c’est ce qui permettra aux associations d’adopter une posture plus ambitieuse finalement.
D'où l’importance de « bâtir une relation de confiance avec les associations, pour qu’elles n'aient pas peur d’être transparentes. Sinon, au final, les financeur/accompagnateur seront perdants, étant donné qu’ils ne pourront pas évaluer leurs programmes correctement », confirme Virginie Commelin.
À ce sujet, le soutien à l’évaluation de l’impact social des projets peut agir comme un levier venant renforcer les relations de confiance entre mécènes et associations.
Il ne s’agit pas d’agir « dans une logique de contrôle où l’on distribue des notes, il s’agit d’accompagner pour améliorer les choses, voire recalibrer les objectifs, les bénéficiaires, etc. », soutient Laureen Sarfati, Fondation MNH.
Cela peut se produire en mettant en place des formations collectives à l’évaluation pour aider les associations à monter en compétences, en finançant l’évaluation, ou en réalisant des mesures d’impact avec des cabinets d’experts.
Cette démarche d’évaluation apporte beaucoup dans la manière dont les associations pensent les activités, sur le comment elles font, mais surtout à s’interroger sur le pourquoi elles le font, ce qui est essentiel pour des équipes à la recherche de sens. »
Laurent Fialon, Pro Bono Lab
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