Les orchestres à l'école en Guyane
Depuis 2023, le dispositif Orchestre à l’École est présent dans la totalité* des départements français et chaque territoire a ses différents projets et spécificités. Cap sur la Guyane et ses orchestres !
La vie des orchestres en Guyane
Créer et faire vivre un orchestre à l’école nécessite de l’investissement et de la motivation. À Saint-Laurent-du-Maroni, Anne Verger a participé à la création d’un orchestre dans son collège en 2021. Aujourd’hui dans leur troisième année de pratique, cette dernière revient sur la création. Soutenue par son établissement, cette professeure d’éducation musicale a obtenu le prêt de locaux pour répéter avec l’orchestre de la part de la municipalité. Les cours sont dispensés par des professeur.es d’instruments rémunérés grâce à l’association Les Lianes Musicales que cette dernière préside.
Un projet ambitieux qui, au-delà de la recherche de financements et d’organisation, s’est confronté à certaines réalités sociales : « Les difficultés résident dans les habitats des élèves qui parfois ne permettent pas d'avoir des instruments à la maison (habitat informel ou pas sécurisé) » explique Anne Verger quant au stockage des instruments à l’école et non chez les enfants. Ces précautions n’empêchent cependant pas le projet d’être une vraie réussite.
« Les enfants en redemandent et sont heureux de partager en concert avec le public. Ils sont aussi contents de jouer du répertoire qu'ils n'ont pas l'habitude d'entendre. Beaucoup en parlent autour d'eux et sont fiers de jouer d'un instrument. »
Anne Verger, professeure d’éducation musicale.
Des élèves qui, après trois ans d’apprentissage de la musique en collectif, deux heures par semaine, sont toujours aussi enthousiastes et se verront prochainement embarqués dans de très beaux projets !
Des événements ambitieux
Il y a des rentrées plus marquantes que d’autres. Pour entamer leur dernière année d’orchestre à l’école, Anne Verger a réservé à ses élèves une belle surprise : la venue de la députée de Guyane Christiane Taubira.
Les élèves ont pu en septembre dernier montrer leurs progrès devant une ancienne Garde des Sceaux conquise.
« Ce fut un moment très heureux avec un réel partage. Elle a pris le temps d'écouter l'orchestre, de regarder chaque musicien jouer, de poser des questions et de s'intéresser au projet. »
Anne Verger, professeure d’éducation musicale
Et ce n’est pas fini ! Les élèves de Saint-Laurent-du-Maroni se préparent en ce moment même pour un voyage en métropole en mars prochain où ils auront l’occasion de rencontrer les élèves de La Tremblade (17).
Un beau voyage qui donne d’autres idées à leur professeure : « Nous avons le projet de jouer avec un artiste guyanais vivant sur le sol métropolitain ; nous avons aussi les projets de concert commun avec Cayenne. Et pourquoi pas, ouvrir une classe en lycée, pour ceux qui doivent quitter le collège à la fin de l'année. »
Une approche différente de la lutherie
À Saint-Laurent-du-Maroni comme à Cayenne, une difficulté se retrouve : l’entretien des instruments. Avec un climat bien différent de la métropole, les matériaux bougent et se dégradent plus facilement : « les instruments souffrent beaucoup des conditions météorologiques » confirme Anne Verger.
En 2023, Orchestre à l’École a donc prévu le déplacement de luthiers sur le territoire et réfléchi à d’autres moyens de fournir les orchestres en instrument dans une optique durable. Pour cela, l’association a collaboré avec l’entreprise de reconditionnement d’instruments Zic Ethic – tout juste créé en Mayenne (53) - pour développer l’orchestre collège Auxence Contout de Cayenne. Plusieurs paramétrages ont été étudiés : livrer des instruments composés de matériaux résistants au climat et tous les accessoires nécessaires à son bon fonctionnement sur le long terme. « Nous souhaitions proposer une solution clé en main au porteur de projet du collège guyanais. Nous avons donc ajouté aux instruments reconditionnés les accessoires (pupitres, becs, baguettes, accessoires pour l'entretien, etc.) » explique ainsi Antoine Dekerautem, fondateur de Zic Ethic.
« Le climat est évidemment un facteur important qui impacte l'usure d'un instrument. Nous avons dans un premier temps sélectionné les instruments en prenant en compte cela. Nous avons ensuite travaillé avec les artisans réparateurs partenaires de Zic Ethic pour que les choix des matériaux utilisés pour le reconditionnement soient en cohérence avec un climat équatorial (pour les tampons par exemple). »
Antoine Dekerautem, fondateur de Zic Ethic
Des solutions, des astuces, qui ouvrent forcément la réflexion sur l’installation de nouvelles pratiques de consommation en métropole et encore plus dans les DROM-COM : « il semble compliqué pour un porteur de projet guyanais d'accéder à des instruments déjà présents sur le territoire (qu'ils soient neufs ou d'occasion). Ainsi, puisqu'il faut composer avec les frais d'importation, le choix du reconditionné permet de réduire le budget dédié aux instruments tout en garantissant du matériel propice au développement musical des élèves. » conclut Antoine.
*excepté le Territoire de Belfort