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Par Carenews INFO - Publié le 26 mars 2024 - 16:42 - Mise à jour le 27 mars 2024 - 11:14 - Ecrit par : Camille Dorival
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Claude Alphandéry, grande figure de l'ESS, nous a quittés

Claude Alphandéry, ancien président de France active, du CNIAE et du Labo de l'ESS, est décédé le 25 mars à l'âge de 101 ans, après une vie de combat contre les injustices. 

Claude Alphandéry lors de la fête organisée pour ses 100 ans. Crédit : Le Labo de l'ESS.
Claude Alphandéry lors de la fête organisée pour ses 100 ans. Crédit : Le Labo de l'ESS.

 

 

Claude Alphandéry est décédé ce lundi 25 mars à l'âge de 101 ans. Ancien résistant, il était aussi une figure emblématique de l'économie sociale et solidaire (ESS). Il avait notamment fondé France active et Le Labo de l'ESS, et présidé le Conseil national de l'insertion par l'activité économique. 

 

Résistant et haut fonctionnaire 

 

Claude Alphandéry est né le 27 novembre 1922 à Paris. Encore adolescent au début de la Seconde guerre mondiale, il rejoint rapidement les rangs de la Résistance, alors qu'il étudie au lycée du Parc, à Lyon. Il entre dans la clandestinité pendant l'hiver 1942-1943. Il devient lieutenant-colonel dans les Forces françaises de l'intérieur et chef des Mouvements unis de la Résistance Drôme-Ardèche, puis président du comité départemental de libération de la Drôme. 

À la Libération, Claude Alphandéry est médaillé de la Résistance, avec Croix de guerre. Il poursuit ensuite des études à l’Ecole nationale d’administration (ENA), puis rejoint le « Service des études économiques et financières », qui œuvre pour la croissance économique moderne de la France. 

Il devient expert économique à l'Organisation des Nations-Unies (ONU) à New York et milite au Parti communiste français, avec lequel il prendra ses distances en 1956. 

En 1960, Claude Alphandéry participe à la fondation de la Banque de construction et des travaux publics, qu'il préside entre 1964 et 1980. Il rejoint la Caisse des dépôts et consignations (CDC) en 1973. 

En 1976, il adhère au Parti socialiste, où il est proche de Michel Rocard et où il s'implique dans la lutte contre le chômage et l'exclusion. 

 

Un militant de l'ESS

 

Au début des années 1980, Claude Alphandéry conduit pour la CDC une mission sur le développement local et la lutte contre les exclusions. Cela l'amène à créer et à présider l'association France active, réseau de finance solidaire, en 1988. La structure finance la création d'emplois via des prêts à des demandeurs d'emploi ayant un projet entrepreneurial et aux structures de l'ESS. 

A la demande de Jean-Pierre Soisson, alors ministre du Travail, Claude Alphandéry s'intéresse aux associations et entreprises d’insertion. En 1991, il est nommé président du Conseil national de l'insertion par l'activité économique (CNIAE). Ce conseil est placé auprès du Premier ministre pour conseiller le gouvernement sur sa politique de soutien aux structures d’insertion. 

En 2006, il est l'initiateur, avec Edmond Maire, ancien secrétaire général de la CFDT, d'un Manifeste pour l'économie solidaire. 

En 2010, à 88 ans, il contribue à lancer les Etats généraux de l'ESS, qui rassembleront plus de 5 000 personnes à Paris en 2011. Cet événement donnera naissance au Labo de l’ESS, think tank de l'économie sociale et solidaire, qu'il fonde et qu'il présidera pendant quatre ans. 

 

De nombreux hommages

 

Le Labo de l'ESS, dont l'actuel président, Hugues Sibille, était un grand ami de Claude Alphandéry, a immédiatement réagi à l'annonce de son décès :

« Impossible de rester indifférent en faisant la rencontre de Claude Alphandéry. Au-delà de ses réussites professionnelles et politiques, c’était un homme charmant et drôle, toujours curieux et ouvert à la découverte. Malgré son grand âge, Claude était toujours en phase avec son temps, et a continué jusqu’à la fin à anticiper et imaginer des changements positifs pour notre société. Il avait une formidable capacité à fédérer les personnes qu’il rencontrait autour des sujets qui lui tenaient à cœur. Et après avoir parcouru un siècle, et alors qu’il s’inquiétait pour le monde et la tournure qu’il prenait, il restait fondamentalement optimiste, et gardait une profonde croyance dans la capacité de progression de l’humain. »

Jérôme Saddier, président d'ESS France, a également réagi sur LinkedIn

« Résistant, engagé, solidaire… Claude était tout cela et bien d’autres choses. Initiateur ou parrain de bien des causes dans le monde de l'ESS, il a conduit de nombreuses personnes à inscrire leurs pas dans les siens (..). C’est une grande perte évidemment, mais avec un tel héritage, il y a de quoi entretenir une belle flamme. »

Pierre-René Lemas, actuel président de France Active et ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, lui a également rendu hommage

« Claude a su nous ouvrir les yeux sur la multitude d’initiatives solidaires que portent nos territoires. Il nous a convaincu que toutes ces réussites pouvaient contribuer à transformer notre société, à nous engager dans une transition véritablement juste et durable. Continuer à agir contre la fatalité, se battre pour l’inclusion, construire une société à la fois solidaire et écologique, c’est le meilleur hommage que nous puissions lui rendre. »

Quant à Maxime Baduel, délégué ministériel à l'ESS, il souligne que Claude Alphandéry fait partie de « ces piliers de l’histoire française »

« De l’esprit de coopération des maquis à ses engagements en faveur de l’insertion et de la finance solidaire, Claude est un bâtisseur d’innovations justes, liant toujours les enjeux de cohésion sociale aux dynamiques d’emplois et d’activités. C'est un homme de tous les combats, de tous les liens. Il incarne un siècle d’engagement, de justice et de "faire" autant que "vivre" ensemble. »

 

Un dernier appel à agir 

 

Le 4 mars dernier, déjà hospitalisé, Claude Alphandéry lançait un nouvel appel à agir face à la barbarie, publié dans le Nouvel Obs et que nous reproduisons ici : 

 

« Mes amis,

Au début de cette année, nous avons signé, avec Edgar Morin et avec vous toutes et tous, ce bel Appel à la Paix et à donner toute sa place à notre humanité face aux immenses risques de régression vers la barbarie que nous commençons à nouveau de constater dans le monde, en Europe et dans notre propre pays.

Aujourd’hui, alors qu’hospitalisé mes forces déclinent, je viens vous demander de prendre l’engagement de tout faire, partout ou vous êtes avec les moyens qui sont les vôtres, pour empêcher une nouvelle nuit noire de l’humanité.

C’est l’ancien résistant que je suis qui vous parle. Que ce soit en Ukraine, en Palestine et en Israël aujourd’hui, que ce soit demain lors des élections américaines et européennes, et après-demain lors des élections françaises, partout, l’arrivée au pouvoir de régimes autoritaires et populistes sont une menace vitale pour l’Etat de droit, pour les libertés publiques, pour la paix, et nous entraînent vers une nouvelle nuit tragique contre laquelle j’ai tant lutté.

Mon tout dernier appel, avec les forces qui me restent, c’est de vous inciter à tout mettre en œuvre pour que ce qui a motivé ma vie, le combat contre le fascisme, contre la barbarie et pour les droits humains, soit à nouveau mobilisé dans une grande alliance humaniste des forces de vie.

Agissez comme si vous ne pouviez pas échouer. »

 

Merci à Claude Alphandéry pour son amour pour l'humanité, pour sa capacité à rassembler et à rester résolument optimiste. 

Comme l'écrit si bien Le Labo de l'ESS : « Aujourd’hui, Claude nous a quittés, mais son esprit d’engagement persistera. C’est à nous tous qu’il a passé le flambeau. Car malgré les doutes, malgré les impatiences, nous devons persévérer. Restons optimistes, restons solidaires, restons engagés. De son vivant, Claude avait la conviction que les évènements de société qui nous inquiètent doivent être source d’une mobilisation toujours plus forte. Continuons donc à nous mobiliser, à l’image de Claude, qui a dédié sa vie à sa cause. Continuons à nous battre sans relâche, et sans jamais baisser les bras. Retrouvons-nous autour d’objectifs communs pour aller plus loin ensemble. Incarnons l’espoir et l’action collective. »

 

Camille Dorival 

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