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Par Carenews INFO - Publié le 3 décembre 2025 - 12:24 - Mise à jour le 3 décembre 2025 - 14:44 - Ecrit par : Camille Dorival
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Motivations, bénévolat, emplois... Comment les jeunes s'engagent

Qu'est-ce qui motive les jeunes à s'engager pour des causes sociales et environnementales ? Et de quelle manière souhaitent-ils s'engager ? Une table ronde débattait de ces sujets dans le cadre de la 10e édition des Journées de l'économie autrement, organisées les 28 et 29 novembre à Dijon.

Les jeunes souhaitent voir les résultats concrets de leurs engagements. Crédit : Diamond Dogs / iStock
Les jeunes souhaitent voir les résultats concrets de leurs engagements. Crédit : Diamond Dogs / iStock

 

 

« Les jeunes ont envie d’agir concrètement, que les effets de leur engagement soient visibles », estime Clotilde Garnier, secrétaire nationale du Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC), association de jeunesse et d’éducation populaire en milieu rural. « Ils veulent par exemple participer à la création d’un événement auquel ils pourront assister. Pas gérer des dossiers de subventions ou remplir des tableaux Excel de comptabilité. »

La vingtenaire s’exprime dans le cadre d’une table ronde sur l’engagement des jeunes organisée lors des Journées de l’économie autrement, à Dijon, le 28 novembre dernier. Ce qui motive les jeunes à agir, selon elle ? Le sentiment d’utilité, le changement concret, la lutte contre les inégalités, le combat pour un avenir meilleur… Mais elle rappelle le passage, théorisé par le sociologue Jacques Ion, d’un engagement « timbre » à un engagement « post-it ». Le premier se distinguait par une adhésion très forte à une structure (parti politique, syndicat…), dans un cadre collectif, en vue d’un « grand soir » qui adviendrait un jour. Le deuxième, qui caractérise une partie de la jeunesse contemporaine, regroupe des formes d’engagement plus ponctuelles, pragmatiques et réversibles : on passe facilement de la défense d’une cause à l’autre, et d’une structure à l’autre, en fonction de ses envies du moment ou de la capacité de la structure à répondre aux aspirations de la jeunesse. « Il y a notamment un enjeu pour les jeunes à s’amuser, prendre du plaisir dans leurs engagements », souligne Clotilde Garnier, du MRJC.

 

Il y a un enjeu pour les jeunes à s’amuser, prendre du plaisir dans leurs engagements. »

Clotilde Garnier, secrétaire nationale du MRJC

 

Un engagement « post-it » de plus en plus présent chez les jeunes 

 

Comme l’expliquait à Carenews Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif, autrice d’un ouvrage sur l’engagement des jeunes, avec l’engagement post-it, « on ne s’engage pas pour un hypothétique grand soir, mais en ayant envie de voir les résultats concrets de son action. On s’engage toujours dans des structures, mais plus du tout de manière sacrificielle. Avec cet engagement post-it, ce n’est plus la structure qui définit l’individu, mais l’individu qui cherche à trouver sa place dans la structure et qui la définit. Si je milite pour la transition écologique à un endroit, mais que cela ne me convient plus, je peux décider de m’engager pour la même cause, mais ailleurs. »

 

Avec l’engagement post-it, « on ne s’engage pas pour un hypothétique grand soir, mais en ayant envie de voir les résultats concrets de son action. »

Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif, autrice de « S'engager. Comment les jeunes se mobilisent face aux crises ». 

 

Claire Thoury distingue toutefois, chez certains jeunes, une « nouvelle ère de l’engagement » : sur le modèle de Greta Thunberg, ces jeunes se mobilisent autour de grandes causes, comme le climat, l’égalité entre les genres ou la lutte contre la précarité pour voir le monde changer, mais avec le souhait que cela ait un effet immédiat. 

 

30 % des jeunes sont bénévoles dans des associations 

 

Aux associations, donc, de s’adapter à cette nouvelle donne. Ce qu’elles semblent parvenir à faire dans une certaine mesure, puisque 30 % des 15-30 ans déclarent donner de leur temps bénévolement pour une association au moins une fois par mois, selon le baromètre 2024 de la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (Djepva).

« Nous avons une jeunesse engagée bénévolement dans les associations, et une jeunesse qui dit non aux emplois destructeurs de l’environnement, comme l’a montré l’appel à « déserter » ces emplois lancé par des étudiants d’AgroParisTech en 2022, notamment », rappelle Manuella Pinto, vice-présidente de l’Union des employeurs de l’ESS (Udes).

Mais s’ils sont bénévoles dans des associations et souhaitent de moins en moins travailler pour des entreprises prédatrices de la nature, les jeunes font-ils pour autant la démarche d’aller travailler dans des organisations de l’ESS ? « Force est de constater que non, admet Manuella Pinto. Plus de 20 % de nos salariés ont plus de 55 ans, et nous avons besoin d’une relève générationnelle. »

 

L'enjeu d'attirer des jeunes pour travailler dans l'ESS

 

Pour attirer davantage les jeunes, les employeurs de l’ESS s’efforcent de travailler sur l’attractivité de leurs métiers, mais aussi de se faire davantage connaître des jeunes, en les accueillant pour des stages de découverte en entreprise ou des contrats en alternance. L’Udes travaille aussi sur les nombreux a priori que peuvent avoir les jeunes sur l’ESS : « Nous tachons de leur démontrer qu’on peut avoir un déroulé de carrière dans l’ESS, qu’on n’est pas forcément moins bien payé qu’ailleurs, que nous veillons à une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle, etc. », énumère Manuella Pinto.

En novembre 2021, l'organisation patronale de l’ESS a ainsi lancé l’Appel des employeurs engagés, pour inviter les entreprises de l'ESS à renforcer leurs pratiques managériales, à améliorer la qualité des emplois qu’ils proposent, à questionner leur responsabilité sociale et écologique, et à s’engager sur les questions sociales et environnementales au-delà des obligations réglementaires. « Tous les deux ans, nous menons une enquête sur un certain nombre de critères, pour voir comment nous progressons dans la branche », souligne Manuella Pinto.

 

Laisser de la place aux jeunes 

 

Joséphine Delpeyrat, déléguée générale d’Animafac, réseau qui regroupe plus de 4000 associations étudiantes, insiste aussi sur l’importance de laisser de la place aux jeunes dans les instances de gouvernance des associations : « C’est un peu terrifiant d’être la ou le seul jeune dans un conseil d’administration, raconte-t-elle pour l’avoir elle-même vécu. Il faut que les aînés tendent la main aux jeunes, en leur laissant plus de place, mais aussi en leur proposant par exemple un mentorat informel, par lequel un bénévole plus expérimenté pourrait l’accompagner dans ses premiers pas dans cette instance. »

« Il faut aussi réfléchir aux débouchés politiques que permet l’engagement », note Timothée Duverger, responsable de la chaire Terr’ESS à Sciences Po Bordeaux. « Car attention, prévient-il. Beaucoup de jeunes sont prêts à s’engager pour soutenir des formes d’autoritarisme, comme le montre le succès actuel de Jordan Bardella. Il faut que nous propositions d’autres issues que celle-là. »  

 

Beaucoup de jeunes sont prêts à s’engager pour soutenir des formes d’autoritarisme, comme le montre le succès actuel de Jordan Bardella. Il faut que nous propositions d’autres issues que celle-là. »  

Timothée Duverger, responsable de la chaire Terr’ESS à Sciences-Po Bordeaux.

 

Lui incite les étudiants de ses masters spécialisés sur l’ESS à s’engager à travers un projet coopératif. « Nos étudiants doivent obligatoirement participer à la société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Acc’ESS, qui propose diverses prestations de conseil et d’expertise aux acteurs de l’ESS, explique-t-il. Ils gèrent la Scic en toute autonomie, avec un mode de fonctionnement de type sociocratique, des cercles de décisions, des élections sans candidat. Je m’en mêle le moins possible, pour qu’ils soient responsables de ce qu’ils font et développent leur capacité d’agir. »

À quoi sert l’engagement de ses étudiants, selon Timothée Duverger ? « Il est porteur de progression pour chacun de nos étudiants. Il crée des dynamiques de solidarité et de confiance réciproque, mais est aussi source d’estime de soi. »

 

Les Journées de l'économie autrement

Les Journées de l'économie autrement (JEA) sont organisées chaque année à Dijon par le magazine Alternatives Économiques.

Créées en 2016, cet événement a pour objectif de mettre en valeur la contribution de l’économie sociale et solidaire, tout particulièrement de ses formes les plus innovantes, à la transformation de l’économie et de la société. Il propose chaque année, sur deux jours, une cinquantaine de rencontres (tables rondes, ateliers, visites culturelles, etc.) autour de sujets de société. La participation est gratuite. 

Pour en savoir plus : https://journeeseconomieautrement.fr

 

Camille Dorival 

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