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Par Carenews INFO - Publié le 11 septembre 2024 - 12:30 - Mise à jour le 11 septembre 2024 - 14:30 - Ecrit par : Théo Nepipvoda
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Duralex repris par ses salariés : un coup d’accélérateur pour le mouvement coopératif ?

Le tribunal de commerce d’Orléans a validé l’offre de reprise en Scop du fabricant de vaisselle en verre. Cet exemple emblématique peut-il inciter les pouvoirs publics à soutenir davantage la dynamique coopérative ?

Duralex, le fabricant historique de verres de cantines. Crédit : Hamka Fitra, iStock.
Duralex, le fabricant historique de verres de cantines. Crédit : Hamka Fitra, iStock.

 

La reprise de l’entreprise Duralex par ses salariés a entrainé un engouement sans commune mesure de la presse pour le modèle coopératif. Pas surprenant : l'entreprise fabricante de vaisselle a une place particulière dans le cœur des Français. Elle est en effet à l’origine des verres de cantine dont le numéro inscrit au fond devenait un âge imaginaire que s’attribuaient les écoliers.  

Depuis la fin des années 1990, le site manufacturier implanté en périphérie d’Orléans a vu se succéder de multiples repreneurs. Las d’un nouveau redressement judiciaire prononcé en avril, les salariés ont proposé de reprendre l’entreprise en société coopérative de production (Scop). Le 26 juillet, le tribunal de commerce d’Orléans a finalement retenu cette offre de reprise qui prévoit le maintien de l’ensemble des postes, écartant deux autres offres. 

Un grand défi pour l’entreprise, qui a vu son chiffre d’affaires diminuer entre 2022 et 2023 et qui va devoir réassainir les comptes, cela sans avoir effectué de casse sociale.

 

 Une reprise d’envergure  

 

L’entreprise devient donc une coopérative. Au moins 140 salariés sur les 228 ont acquis une ou plusieurs parts sociales de l’entreprise et sont devenus des sociétaires. Le principe d'une Scop est que les salariés sont les associés majoritaires de l’entreprise : ils détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Chacun dispose d’une voix quel que soit le capital investi. Fin 2023, on comptait 2 697 Scop en France. 

Maintenant que les lumières sont braquées sur l’aventure, Duralex peut être la preuve de la pertinence du modèle coopératif notamment pour l’industrie. D’autant plus qu’il est très rare qu’une reprise en Scop concerne une entreprise de cette taille. Les reprises se concentrent davantage sur les entreprises de 10 à 50 salariés. 

 

Quelles sont les chances de réussite de Duralex ? 

 

Et ce pari a des chances de réussir. Thibault Mirabel, directeur de la recherche pour Equalis Capital, a observé dans sa thèse que les reprises en Scop ont une durée de vie nettement plus longue que les reprises en entreprises conventionnelles. Plus généralement, en 2023, les société coopératives auraient un taux de pérennité supérieur à l’ensemble des entreprises françaises : 79 contre 61 % selon la Confédération générale des Scop (CG Scop). 

Thibault Mirabel, également vice-président de Capital Collectif, explique que le domaine d’activité dans lequel Duralex évolue est plus propice à la réussite du modèle coopératif que d’autres car « il s’agit d’industrie légère qui nécessite moins d’intensité capitalistique que l’industrie lourde ». Or, selon ses travaux, plus un secteur nécessite des capitaux, moins il est susceptible de voir se créer des Scop car ces dernières connaissent des difficultés à lever des capitaux.  

 

« La reprise de Duralex est un cas emblématique qui n'est pas représentatif du mouvement des Scop » 

 

Par ailleurs, pour Thibault Mirabel, « l’histoire de Duralex renforce dans les imaginaires l’idée que les coopératives naissent surtout lors des reprises, qu’elles sont la voie de la dernière chance. Or, la reprise du Duralex est un cas emblématique qui n'est pas représentatif du mouvement des Scop ». En 2023, seules 8 % de l’ensemble des Scop sont le fruit d’une reprise d’entreprise en difficulté et 13 % d’entreprise saine. En revanche, 61 % sont des créations ex-nihilo. 

« Le profil type des coopératives est le suivant : elles sont situées plutôt dans des zones urbaines, les équipes sont plus petites et elles agissent dans le secteur des services », précise Thibault Mirabel. 

 

Les leçons au sujet du financement de l’ESS 

 

À l’inverse d’autres projets coopératifs comme Railcoop qui voulait ouvrir des lignes ferroviaires en France et qui a été placé en liquidation judiciaire, Duralex a bénéficié du soutien important des pouvoirs publics. Orléans Métropole a proposé de racheter le site de l’entreprise, ce qui représente une injection de plus de cinq millions d’euros dans l’entreprise. La région Centre-Val de Loire a également soutenu le projet avec la mise en place d’un fonds de garantie avec la Banque publique d’investissement. Ces soutiens publics ont été indispensables pour permettre le prêt des montants nécessaires par les banques. Ils démontrent la pertinence d’un appui à ce type de projets. 

Là encore, ce cas n’est pas représentatif de l’ensemble du mouvement Scop. Pour Timothée Duverger, ingénieur de recherche à Sciences Po Bordeaux et responsable de la Chaire Territoires de l’ESS, « les outils de financement du mouvement des Scop se révèlent aujourd’hui insuffisants. Abondés essentiellement par les cotisations de ses membres, ils ne permettent pas de répondre à des besoins croissants », écrit-il dans un billet d’opinion au sujet de Duralex publié sur le site d’Alternatives économiques. De nombreux acteurs de l’ESS alertent régulièrement les pouvoirs publics pour les inciter à mettre en place des outils spécifiques de financement. 

 

Théo Nepipvoda

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