Intelligence artificielle : une bonne nouvelle pour la société et la planète ?
Lors du Forum mondial Convergences, une table ronde avait pour sujet l’intelligence artificielle et ses conséquences sur la planète et sur la société.
L’usage de l’intelligence artificielle peut-il avoir un effet positif sur notre société et sur la planète ? C’était l’objet d’une table ronde organisée dans le cadre du Forum mondial Convergences qui se tenait le 17 septembre au Centquatre à Paris.
Les participants ont commencé par évoquer leurs craintes quant à la généralisation de l’usage de l’intelligence artificielle (IA). Fanny Serre est directrice générale de l’association Social builder qui œuvre pour que les femmes soient plus présentes dans les métiers du numérique. Elle rappelle que seulement 12 % des ingénieurs en intelligence artificielle sont des femmes : « Si les équipes ne sont pas diverses, si l’égalité n’est pas respectée, il sera difficile de savoir analyser et débusquer les biais sexistes produits par l’intelligence artificielle », considère-t-elle. Avec de tels biais, elle craint que l’IA soit un obstacle dans l’avancée vers l’égalité des genres.
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Elle cite l’exemple d’un chatbot créé par le service public de retour à l’emploi autrichien. Il était censé orienter les demandeurs d’emplois vers les offres d’emplois les plus alignées avec le profil des personnes. Un test a été effectué avec des profils similaires, mais de sexe différent. La femme a été orientée vers des domaines tels que la restauration, le tourisme ou la psychologie. L’homme, vers l’ingénierie industrielle, les affaires internationales ou l’informatique.
Un danger pour la transition écologique ?
Bettina Laville, présidente et fondatrice du Comité 21, un réseau d’acteurs engagés sur le développement durable, s’inquiète de l’impact environnemental de l’IA, qui viendrait saper les efforts du mouvement de décarbonation industrielle mondial en cours : « Si d’un autre côté, le nombre de serveurs informatiques et de fournisseurs de données explose, on ne va pas y arriver », considère-t-elle. Elle rappelle la nécessaire utilisation d’eau et de métaux rares pour pouvoir utiliser l’intelligence artificielle.
Augustin de la Brosse, docteur au CNRS en data science, estime de son côté qu’il existe un danger « d’être dépossédé de sa réflexion. J'ai peur que nous soyons asservis dans cette utilisation ».
La crainte de Frédéric Oru, fondateur de AI for better, concerne « la capacité qu’offre cette technologie pour manipuler les foules. C’est un vrai danger pour la démocratie avec des fake news faciles à créer et à diffuser. » AI for better accompagne les entreprises dans la prise en main de l’intelligence artificielle.
Quelques usages de l’IA pour la planète
En revanche, Frédéric Oru considère que si elle est bien utilisée, l’IA peut être utile à la transition écologique. Il cite des exemples d’application de la technologie par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) qui s'en sert pour simuler des crues, observer l’évolution des forêts ou recenser les différents impacts climatiques. Il estime qu’il faut avoir un usage utilitaire de l’intelligence artificielle et éviter « les usages énergivores et futiles de la technologie comme son utilisation pour créer des icônes personnalisées sur le dernier iPhone ».
L’IA, une formation constante nécessaire
Les participants sont également revenus sur la nécessaire formation à la technologie pour qu’elle soit profitable. Se basant sur le rapport du mathématicien et ancien député Cédric Villani de 2018, Bettina Laville considère que l’intelligence artificielle suppose « un immense effort de formation, et cela à tous les échelons de la société ». Au vu des changements sociétaux entrainés par la technologie, elle regrette qu’il n’y ait pas eu de grand débat national à son sujet. `
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Fanny Serre estime que ce nécessaire apprentissage peut être complexe pour certaines personnes : « Réapprendre à apprendre, c’est un challenge quand on a quitté les études il y a très longtemps et que l’on doit s’occuper d’une famille. Ce qui compte, ce sont les compétences cognitives et humaines, les soft skills qui nous permettent d’être agiles dans un environnement changeant ». L’association Social builder propose des formations qualifiantes à des femmes pour qu’elles puissent travailler dans le domaine de la tech.
Pour Frédéric Oru, « en matière d’intelligence artificielle, il y a chaque semaine une nouveauté. Il faut se tenir au courant constamment en jetant un outil pour prendre le suivant. Dans ce contexte, le schéma de formation habituel en entreprise ne marche plus. Il faut donner du temps et de l’argent pour que les personnes puissent tester les outils et les évaluer. »
Théo Nepipvoda