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Par Carenews INFO - Publié le 30 septembre 2021 - 12:00 - Mise à jour le 30 septembre 2021 - 18:33
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Interview de l’association MaMaMa par Olivia Grégoire

Nouveau format éditorial chez Carenews, une personnalité – une actrice ou un acteur de l’engagement – prendra la rédaction en chef du média le temps d’une journée. Nous avons demandé à Olivia Grégoire, secrétaire d’État à l’économie sociale, solidaire et responsable (ESSR) d’inaugurer ce nouveau format. Voici son interview de Magali Bragard de l’association MaMaMa.

Olivia Grégoire en visite chez l'association MaMaMa. Crédit : Hamilton de Oliveira
Olivia Grégoire en visite chez l'association MaMaMa. Crédit : Hamilton de Oliveira

 

  • Votre association est née pendant la crise pour répondre à l’urgence. Comment ça s’est passé concrètement ?

Marguerite et moi, nous étions bénévoles pour l’AP-HP dès le début du premier confinement, dans la cellule Covidom. Nous y avons rencontré Aïcha, médecin pédiatre pour Covidom et Marielle, bénévole pour La Croix-Rouge française.

Toutes les quatre, face à la crise qui touchait durement les plus fragiles, les nourrissons et les femmes seules en particulier, nous avons décidé concrètement et de commencer à collecter et distribuer des biens de première nécessité, adaptés aux besoins spécifiques de chaque bébé et de chaque femme, avec des colis sur mesure. Dès les premiers jours, nous avons été submergées de demandes et nous avons créé l’association MaMaMa le 6 mai. Tout est allé vite ensuite et depuis, nous avons distribué des colis à plus de 12 000 femmes et bébés, dans toute l’Île-de-France, grâce à une centaine de bénévoles, dans trois points de distribution (Saint-Denis, Paris et Eaubonne), avec deux centres de collecte (Meudon et Neuilly) et en partenariat avec plus de 70 PMI, centres de santé et plus de 40 associations de terrain. Jamais nous n’aurions imaginé que cela prendrait une telle ampleur !

D’une certaine façon, c’est une triste réussite, qui prouve que la précarité féminine et infantile est immense et que les réponses ne sont pas à la hauteur du phénomène. Des spécialistes estiment qu’il y a plus de 50 000 nourrissons nécessitant une aide alimentaire d’urgence en Île-de-France. C’est un chiffre effrayant mais c’est aussi ce qui nous pousse à agir de toutes nos forces dans cette lutte depuis 16 mois. 

 

  • Parmi les activités que vous proposez, quelle est celle dont vous êtes les plus fiers ? Pourquoi ?

En commençant les distributions, nous avons découvert que les femmes et les mères isolées en grande difficulté n’étaient pas des exceptions mais qu’elles représentaient la majorité des personnes en situation d’urgence alimentaire. Leur part a encore augmenté pendant cette crise sanitaire et les bénéficiaires d’aide alimentaire sont maintenant à 70 % des femmes.

Nous avons aussi découvert que l’aide alimentaire des nourrissons était un angle mort de la lutte contre la précarité et que de très nombreux bébés étaient en situation de malnutrition en Île-de-France. Nous sommes très fières d’agir contre cette précarité spécifique très silencieuse et invisible. Et nous sommes encore plus fières d’essayer de le faire en offrant plus qu’un colis standardisé : nous préparons tous les colis sur mesure, en les distribuant lors de rendez-vous individualisés pour respecter les besoins de chaque femme et de chaque bébé.

Cela prend un temps infini mais c’est ce temps qui permet d'offrir de la dignité et de la douceur dans la distribution des colis.

 

Olivia Grégoire interviewe l'association MaMaMa. Crédit : Hamilton de Oliveira

 

 

  • Je suis venue vous voir en mai pour annoncer le soutien du Gouvernement à votre projet à hauteur de 270 000 euros grâce à France Relance. Ce soutien visait à développer le nouveau projet « Mama Boost ». De quoi s’agit-il et quels sont les projets de développement de l’association pour la suite ? 

 

Nous nous sommes lancées dans l’aide alimentaire pleines d’énergie et peut-être de naïveté et nous avons dû inventer dans l’urgence, bricoler avec des bouts de ficelle et en comptant sur toutes les bonnes volontés autour de nous. C’est avec la camionnette de Mourad, le boulanger au coin de notre rue, que nous avons fait les premières livraisons, c’est Francis Dubrac, patron d’une entreprise travaux publics qui nous a prêté des camions de chantier pour aller chercher nos premières cargaisons de petits pots ou de biberons et c’était chez Didier Diaz, patron du studio de cinéma Transpalux que nous avons commencé à tout stocker. Mais face à la demande qui explosait, nous avons dû trouver des solutions plus adaptées et durables et c’est alors que nous nous sommes tournées vers les collectivités territoriales et vers l'état. La mairie de Saint-Denis et Plaine Commune nous prêtent un ancien bâtiment des Studios AB qui est devenu notre vaisseau amiral, la Ville de Paris nous a prêté un véhicule et le Carreau du Temple pour organiser des livraisons, la mairie de Meudon et de Neuilly nous mettent à disposition des locaux pour les collectes, le département de Seine Saint Denis nous a donné les moyens pour sécuriser notre entrepôt et nous avons été enfin lauréates du Plan de relance.

Avec cet argent, nous sommes en train de nous professionnaliser et de mettre en place les systèmes informatiques et logistiques qui rendent possible le changement d’échelle et le renforcement de nos activités. Sans cette aide de l’État, nous n’aurions pas pu continuer… Nous considérons que la lutte contre la précarité féminine et infantile est l’affaire de tous mais que c’est aussi une question de santé publique qui nécessite des forces et des moyens bien plus importants que ce que nous avons réussi à mobiliser avec notre seule énergie ! Et au-delà des moyens financiers du plan de relance, votre visite avec Nadia Hai a été très importante pour légitimer notre action : nous étions une association créée et gérée par des femmes, non spécialistes de l’aide alimentaire, une curiosité amusante en quelque sorte !

Votre visite et le Plan de relance ont été une étape importante de validation de nos compétences et de l’importance de nos actions. Et elle nous ouvre la voie pour tous nos futurs projets : production de petits pots, en chantier d’insertion, avec des fruits et des légumes hors calibre, mise en place de duos de femmes pour accompagner la sortie de la précarité, vidéos de conseils nutritionnels infantiles en 10 langues dont la langue des signes, etc. 

 

  • Et pour finir, s'il n'y avait qu'une seule chose à retenir sur votre association, quelle serait-elle ?

MaMaMa est une association très jeune, qui fonctionne encore beaucoup grâce au bricolage et à l’inventivité illimitée de toutes les bénévoles. Nous sommes très fières de l’incroyable diversité des personnes qui travaillent ensemble pour que MaMaMa existe. Océane, notre plus jeune bénévole a 10 ans et elle participe régulièrement aux activités de l’entrepôt. Il y a aussi Amine et Coline, jeunes ingénieur.e.s agronomes, Martine, professeure de boxe française, Salomé, demandeuse d’asile togolaise, Christian, jeune retraité de la Poste, Marine, ancienne responsable du mécénat à l’Opéra de Paris, Consuelo, lycéenne, Axelle, juriste, Kristelle et Anne-Sophie qui sont profs d’allemand et d’anglais, mais aussi Castel, Marie-Ange, Chance, Aude, Soumia, Agnès, Sarah, Paul, Sira, Yacouba, Élodie, Mickaël, Mariame, des personnes sans domicile et des polytechniciens, des femmes victimes de violence et des anciennes championnes de basket ou de boxe, il faudrait toutes et tous les citer !

Il y a aussi beaucoup de bénéficiaires qui sont devenues de « bénévoliaires » et qui ont retrouvé de la fierté en aidant d’autres femmes en difficulté. Mariama nous a dit que son premier jour en tant que bénévole chez MaMaMa était le plus beau jour de sa vie en France ! 

 

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