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Par Carenews INFO - Publié le 1 octobre 2024 - 17:30 - Mise à jour le 2 octobre 2024 - 11:22 - Ecrit par : Elisabeth Crépin-Leblond
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Jeunes, diplômés, urbains : les Français qui prennent le plus l'avion le font pour le loisir

Les émissions de CO2 du secteur aérien français sont en grande majorité le fait de vols de loisirs, réalisés par une population aisée, met en avant le Réseau action climat dans un rapport récent. L’organisation écologiste y évalue neuf mesures pour réduire le trafic aérien et plaide pour l’instauration d’une « taxe grands voyageurs ».

Entre 2008 et 2018, les vols de loisirs sont les principaux contributeurs de la hausse du trafic aérien chez les ménages français. Crédit : Carenews
Entre 2008 et 2018, les vols de loisirs sont les principaux contributeurs de la hausse du trafic aérien chez les ménages français. Crédit : Carenews

 

« Rare secteur dont la contribution au réchauffement climatique continue d’augmenter année après année, l’aérien pesait pour 7 % des émissions françaises de CO2 en 2019 », rappelle le Réseau action climat (RAC) en préambule de son rapport publié le 26 septembre et intitulé « Comment réduire le trafic aérien de manière juste et efficace ? ».  

Le regroupement d’associations de protection de l’environnement, qui ajoute qu’au-delà des solutions technologiques, « les trois études les plus complètes sur la décarbonation du secteur aérien en France concluent qu’il est nécessaire de réduire le trafic dès maintenant pour respecter l’Accord de Paris », y détaille la sociologie des passagers aériens et évalue neuf propositions pour réduire le trafic et son impact.  

 

infographie usages de l'avion réseau action climat
Crédits : Carenews
 

  

Parmi les passagers, les CSP + surreprésentées 

  

« Les Français qui prennent l’avion sont principalement des personnes aisées, diplômées, jeunes et urbaines, qui l’utilisent pour partir en vacances », analyse le rapport qui a compilé plusieurs études publiques. Parmi les passagers du trafic aérien, le RAC pointe une représentation accrue des membres de catégories sociales aisées par rapport à l’ensemble de la population française. 

L’enquête sur la mobilité des personnes, réalisée en 2018 par le ministère de la Transition écologique et solidaire, compte ainsi sur 100 passagers aériens, 37 cadres supérieurs (contre 14 dans la population générale) et seulement 8 ouvriers (contre 21 dans la population générale), rapporte le RAC.  

2 passagers aériens sur 3 sont des habitants des grandes aires urbaines et un habitant de région parisienne a également deux fois plus de chance qu’un habitant de zone rurale de prendre l’avion, toutes choses égales par ailleurs, complète-t-il. 

 


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« Cette répartition inégalitaire, déjà présente en 2008, s’est renforcée en 2018 : le dernier décile (les 10 % de Français plus aisés) est encore plus représenté parmi les passagers aériens (+ 4 points), tout comme les cadres supérieurs (+ 10 points) », met en avant le RAC qui précise que 20 % des passagers aériens sont trentenaires (contre 13 % dans la population générale) et seulement 19 % d’entre eux ont plus de 60 ans (contre 30 % dans la population générale). 

 « Les vols low cost n’ont pas révolutionné la sociologie des passagers aériens. Ils ont surtout permis à des personnes qui prenaient déjà l’avion de le prendre encore plus souvent », analyse lui Alexis Chailloux responsable aérien et ferroviaire du RAC sur le réseau social LinkedIn.  

« Une fois écartés les effets de structure, on observe bien que les jeunes adultes ont une propension plus grande à utiliser l’avion que leurs aînés », met quant à lui en avant le rapport. 

  

Les vols de loisirs et longs courriers, principaux émetteurs 

 

Sur les différents types de vols, le RAC met en lumière une très forte prédominance des vols de loisir, qui représentent 75 % des émissions de CO2. Le quart restant se réparti à égalité entre les vols professionnels (13 % des émissions) et les vols familiaux (12 % des émissions).  

« Là où les vols professionnels sont empruntés principalement par des personnes aisées (souvent des hommes quarantenaires), les vols familiaux sont aussi le fait de ménages modestes, qui vont voir leur famille en Afrique du Nord notamment », pointe Alexis Chailloux.  

Entre 2008 et 2018, les vols de loisirs sont les principaux contributeurs de la hausse du trafic aérien chez les ménages français (11 millions de vols supplémentaires, soit +82 %). Les vols familiaux connaissent également une forte dynamique à la hausse (3 millions de vols supplémentaires, soit +121 %). 

Les vols professionnels, de leur côté, connaissent une croissance plus faible. Entre 2008 et 2018, ils ont augmenté de 800 000 vols supplémentaires, soit plus 16 %. « Par ailleurs, ces données ayant été récoltées en 2018, elles ne prennent pas en compte l’érosion des vols professionnels constatée à la suite de la crise du Covid », complète le rapport du RAC. 

Les vols de loisirs, plus nombreux, sont également en moyenne plus lointains que les autres vols. Or, les vols longs courriers (vers des directions au-delà de la France, de l’Europe et de l’Afrique du Nord) sont les plus émetteurs. Ils représentent 20 % des vols et 55 % des émissions de gaz à effet de serre.  

De leur côté, les vols à destination de la France métropolitaine représentent 24,9 % des vols et 10, 6 % des émissions de gaz à effet de serre, tandis que les vols à destination de l’Europe et de l’Afrique du Nord représentent 53,4 % des vols et 34 % des émissions de gaz à effet de serre.  

« On observe également que les 20 % des Français les plus riches concentrent 41,5 % des émissions de gaz à effet de serre du transport aérien des ménages français. Ce chiffre est très similaire à la répartition en termes de nombre de vols (40,4 % des vols sont réalisés par les 20 % les plus riches) car deux phénomènes se compensent : si les plus aisés prennent plus l’avion pour les loisirs (plus émetteurs car plus lointains), ils réalisent également plus de vols professionnels (moins émetteurs car plus proches) », analyse le RAC. 

                                              

Neuf propositions évaluées pour réduire le trafic aérien  

 

À la lumière de ces chiffres, le Réseau action climat a passé au crible neuf mesures proposées dans le débat public pour réduire le trafic aérien, à l’aune de trois critères : l’impact sur le climat, les recettes fiscales générées et la répartition de l’effort au sein des différentes parties prenantes et de la population. 

Les mesures analysées sont les suivantes :  

  • relever la « taxe Chirac » sur les billets d’avion,  

  • créer une taxe « grands voyageurs »,  

  • supprimer les vols courts (qui possèdent un équivalent de moins de cinq heures en train),  

  • interdire les jets privés,  

  • taxer l’aviation d’affaires,  

  • plafonner le trafic à la baisse (- 20 %),  

  • supprimer les niches fiscales sur les vols intérieurs,  

  • instaurer un quota d’un aller-retour par an par personne, 

  • mettre fin aux systèmes de miles.  

« Parmi elles, une mesure spécifique satisfait tous les critères : la création d’une “taxe grands voyageurs”, qui fonctionnerait à l’inverse des systèmes de fidélité type “miles” : plus un passager prend régulièrement l’avion, plus le prix unitaire d’un billet augmente », défend le Réseau action climat. L’organisation environnementale estime que cette mesure permettrait de baisser les émissions du secteur aérien de 13,1 %, tout en faisant peser l’essentiel des efforts sur les passagers les plus réguliers et en générant 2,3 milliards de recettes.  

« Un relèvement de la “taxe Chirac” sur les billets d’avion avec un barème élevé pour les jets privés en location, comme le proposait la Convention citoyenne pour le climat, répondrait aussi aux trois critères. Cela réduirait les émissions du secteur aérien de 8 %, en ciblant en priorité les plus aisés, et générerait près de 4 milliards d’euros supplémentaires de recettes », complète le RAC, tout en mettant en avant un possible report des gains obtenues par ces mesures fiscales sur la relance ferroviaire. 

 

Élisabeth Crépin-Leblond

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