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Par Carenews INFO - Publié le 28 février 2024 - 12:20 - Mise à jour le 15 mars 2024 - 12:42 - Ecrit par : Célia Szymczak
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L’ANTISÈCHE - Au fait, c’est quoi la transition écologique ?

Le terme de transition écologique s’est peu à peu imposé face au concept de « développement durable ». Il comporte toutefois des limites.

Le concept de transition écologique fait l'objet de débats sémantiques. Crédits : Carenews.
Le concept de transition écologique fait l'objet de débats sémantiques. Crédits : Carenews.

 

La notion de transition écologique désigne le passage à une société s’inscrivant dans les limites planétaires, ces seuils que l’humanité ne doit pas franchir pour bénéficier des conditions favorables qu’elle a connues jusqu’ici. 

Il s’agit de limiter les pressions des activités humaines sur les écosystèmes et sur le changement climatique. Et donc de transformer nos manières de travailler, consommer, produire, et même nos loisirs, afin qu’elles soient compatibles avec la préservation de la biodiversité et la lutte contre le dérèglement climatique. La transition écologique concerne donc aussi bien les institutions publiques que les citoyens ou les entreprises. 

 


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Une notion partagée par les acteurs publics et privés

 

La notion prend de l’ampleur en France à partir des années 2010, selon une note publiée en 2017 par le Commissariat général au développement durable (CGDD). L’autrice, Léa Boissonade, l’illustre notamment par la promulgation de la « loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte » promulguée en 2015 et la Stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable, qui débute aussi en 2015. 

C’est un terme utilisé par les acteurs publics : au fil des gouvernements, le ministre de l’Environnement devient ministre de l’Ecologie puis ministre de la Transition écologique en 2017. Mais il est aussi employé par les ONG, comme Oxfam ou le Réseau action climat, qui dit agir pour une « transition écologique juste ». La CFDT s’est également emparée du concept en décembre avec son « manifeste pour une transition écologique juste ». Et les entreprises engagent leur propre transition écologique dans le cadre de leur politique de responsabilité sociétale (RSE). 

 

La transition n’existe pas ? 

 

Selon la note du CGDD, le concept de transition remplace celui de développement durable, formulé dans le rapport Brundtland en 1987 puis mis « sur le devant de la scène » lors du Sommet de Rio de 1992 et dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD), fixés par l’Onu. Ce terme se caractérise par un « flou conceptuel [qui] a favorisé une appropriation très large du terme de développement durable, (...) a facilité la récupération et le détournement marketing, certains s’en réclamant pour légitimer des politiques existantes ou des intérêts particuliers ». L’autrice ajoute que « plusieurs acteurs regrettent l’affaiblissement de l’aspiration initiale de transformation systémique de nos sociétés que portait le projet de développement durable et qui se traduirait finalement par une perpétuation du modèle économique classique ». 

Sous la pression d’organisations syndicales et associatives, le terme de transition « monte en puissance sur la scène internationale depuis les années 1990 », peut-on lire dans la note. Les résultats des politiques de lutte contre les inégalités et pour la protection de l’environnement sont « décevants », précise la professeure de philosophie Catherine Larrère dans un article du média The Conversation. « L’annonce d’une “transition” marquerait une volonté de changement plus radical », explique-t-elle. Le terme de « transition juste » figure d’ailleurs dans le préambule de l’Accord de Paris, issu de la Cop 21

Léa Boissonade prévient toutefois que le concept de transition écologique peut comporter les mêmes limites :  risque de flou conceptuel, de récupération abusive, incapacité à engager une réelle transformation. En effet, le concept de « transition » fait lui aussi l’objet de critiques. L’historien des sciences Jean-Baptiste Fressoz a récemment publié un ouvrage intitulé Sans transition (Seuil, 2024), dans lequel il met en cause l’idée de transition énergétique. Il montre que les sources d’énergies ne sont pas substituées les une aux autres, comme on le conçoit habituellement : elles se sont accumulées. L’utilisation du charbon s’est ajoutée à celle du bois, et le pétrole n’a pas remplacé le charbon, il s’y est ajouté. Et l’exploitation de nouvelles sources d’énergies nécessite de l’énergie : exploiter du pétrole nécessite du charbon, fabriquer des panneaux solaires nécessite des énergies fossiles. Ainsi, il n’existe pas de situation dans l’histoire correspondant à la substitution des renouvelables aux fossiles. Dans un autre livre (Collapsus, Albin Michel, 2020), Jean-Baptiste Fressoz explique que le président américain Jimmy Carter a préféré le terme de « transition » à celui de « crise »  dans les années 1970, le jugeant moins anxiogène. 

En 2022, huit étudiants diplômés de l’école d’ingénieur AgroParisTech dénoncent dans un discours lors de leur cérémonie de remise de diplôme une « formation qui pousse à participer aux ravages sociaux et écologiques en cours ». Ils contestent à cette occasion le terme de transition écologique, s’opposant à « une expression qui sous-entend que la société pourra devenir soutenable sans qu’on se débarrasse de l’ordre social dominant ». Pour cette raison, certains acteurs préfèrent utiliser la notion de « transformation écologique », qui appelle à des mesures plus radicales, plutôt que de transition. 

 

Célia Szymczak 

 

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