L'association On est prêt s’engage pour alerter sur l’éco-anxiété qui explose en France
Sécheresses à répétition, incendies de plus en plus précoces dans l’année, canicules… les Français.e.s commencent à subir de plein fouet les effets du dérèglement climatique. Plus de doutes possibles, tous les feux sont au rouge, si on peut dire. Le mouvement citoyen On est prêt a lancé une nouvelle campagne pour sensibiliser les jeunes, et les moins jeunes, à l’éco-anxiété, phénomène de santé mentale qui explose dans la société…
Plus d'un Français sur deux, âgé de 16 à 25 ans, se dit « très » ou « extrêmement inquiets » du changement climatique, selon une étude parue dans The Lancet Planetary Health en 2021.
Face à ce constat, le mouvement « On est prêt », initié en 2018, a lancé entre mai et début juin, une campagne de mobilisation citoyenne afin de « prendre soin de soi en prenant soin du monde », et un projet de recherche avec des scientifiques sur plusieurs mois afin de mieux comprendre l'éco-anxiété.
Le collectif On est prêt réaffirme l’urgence écologique et sociale
Magali Payen, fondatrice de l'association On Est Prêt revient sur le lancement du collectif en 2018. « L’association On est prêt vise à mobiliser les citoyens pour une société plus respectueuse du vivant et de la justice sociale. Elle rassemble des artistes et influenceurs qui sont les porte-voix des sachants et scientifiques du collectif », précise-t-elle.
Le collectif s’appuie sur la théorie du Donut de Kate Raworth, à savoir impulser une pensée qui intègre l’ensemble des frontières planétaires, autrement dit comprendre et respecter les lois du vivant et la justice sociale. « L'extérieur du donut représente les 9 limites planétaires, l’intérieur est le plancher social pour vivre dignement, et tout l’enjeu est de vivre à l’intérieur en intégrant le tout », précise-t-elle.
Une campagne pour alerter sur l’éco-anxiété
En mai dernier, la dernière campagne de mobilisation citoyenne « Tu Flippes » a eu comme objectif d'apporter de la clarté sur les émotions intenses ressenties, d’expliquer qu’elles sont normales, que l’éco-anxiété n'est pas une maladie, qu’il est normal d’avoir peur étant donné la situation. « La peur peut être une bonne conseillère dans ce cas, car la menace est réelle », souligne-t-elle. Il est important de l’écouter pour pouvoir l’affronter. « Si la peur paralyse et empêche d’agir, elle nous rend manipulables. C’est dans ce lit qu’il faut agir, car c’est là où prolifèrent les complotistes, les mouvements extrêmes », tient à préciser Magali Payen.
En effet, le manifeste de la campagne est clair : « (...) Inondations, rapports du GIEC, érosion de la biodiversité… Toi aussi, ça te fait flipper ? Tu n'es pas seul.e, nous sommes des millions. C'est normal d’avoir peur face à la gravité de la situation, l'inaction des dirigeants et la répression de ceux qui agissent. Viens, on transforme ces émotions en actions et ensemble, on devient une force immense. » Un message qui a trouvé un fort écho sur les réseaux.
Résultat : plus de deux millions de comptes ont été touchés sur les réseaux sociaux. « Nous avons constaté une détresse immense : nous avons reçu près de 800 témoignages dès les premiers jours qui parlaient de leurs craintes à l’arrivée de l’été, des enfants et des adolescents qui ont perdu confiance envers le monde adulte », analyse-t-elle.
L’éco-anxiété peut devenir une maladie mentale
La prise de conscience et les dérives explosent dans la population française, constate Magali Payen. « Nous travaillons avec des experts sur le sujet comme Pierre-Eric Sutter, psychologue. Aujourd'hui, trois quarts des Français sont éco-conscients (ils expriment une éco-anxiété) et au sein de ces 75 %, il y a 20 % des éco-inquiets qui y pensent presque tout le temps ». Au total, cela représenterait 5 à 10 % de la population qui se sent « très fortement éco-anxieuse » au point que leur santé mentale soit menacée. Face à ce constat, il nous faut réinventer nos modes de vie. Les loisirs, notamment le tourisme, la consommation numérique, la mobilité... c'est tout notre imaginaire qui doit être déconstruit et réinventer.
Réinventer de nouveaux imaginaires
Magali Payen est également la présidente du Think and Do Tank Imagine 2050 qui accompagne et sensibilise les « leaders culturels » pour inventer de nouveaux récits adaptés au monde de demain, plus sobres et décarbonés. « Nous accompagnons artistes, journalistes, publicitaires ou producteurs de jeux vidéo, tous ceux qui font le soft power, qui implémentent nos imaginaires ». Pour ce faire, une conférence Imagine 2050, en partenariat avec l’Ademe, a synthétisé 15 scénarios de prospectives issus de dix rapports scientifiques « pour mieux comprendre les nouveaux récits », ce qui fait consensus chez les scientifiques et se projeter « vers un projet de société enthousiasmant qui s'appuie sur les réalités des lois de la nature et qui soit le plus juste possible. »
Magali Payen s’appuie aussi sur le collectif Scientifiques en rébellion, « qui invite à la désobéissance civile, car ils sont désespérés ». Ils portent une parole rationnelle que les puissants n’écoutent pas, ne reprennent pas. « Les personnes les plus conscientes ne savent plus quoi faire pour changer les choses », avance-t-elle.
Christina Diego