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Par Carenews INFO - Publié le 4 juin 2025 - 16:24 - Mise à jour le 4 juin 2025 - 16:36
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L’Observatoire des inégalités alerte sur les inégalités environnementales

L'Observatoire des inégalités consacre un dossier de son Rapport sur les inégalités en France, publié le 3 juin, à la question des inégalités environnementales et à la manière dont l’exposition aux pollutions et ses conséquences touchent différemment les catégories sociales.

Tous les deux ans, l'Observatoire des inégalités dresse un bilan des inégalités en France. Crédits : Carenews.
Tous les deux ans, l'Observatoire des inégalités dresse un bilan des inégalités en France. Crédits : Carenews.

 

Quelles sont les inégalités en matière d’environnement ? Touchent-elles davantage les catégories de population les plus pauvres ? L’Observatoire des inégalités s’interroge sur ces sujets dans son Rapport sur les inégalités en France 2025, publié le 3 juin. Celui-ci documente les inégalités de revenus, d’éducation, dans le travail, les modes de vie et les territoires. Cette année, il comprend aussi un dossier sur les inégalités environnementales, sous-titré « Fin du monde, fin du mois, même combat ? ».  

« Les plus modestes, les plus défavorisés, sont plus exposés que les autres à la pollution », commence Anne Brunner, directrice des études de l’observatoire, tout en précisant que les inégalités environnementales et de niveau de vie ne se superposent pas systématiquement. L’environnement désigne, selon l’observatoire, « ce qui est autour de nous » comme l’air ou l’eau, mais aussi « l’ensemble des ressources naturelles ».  

 

Infographie sur les inégalités environnementales
Crédits : Carenews, à partir des données rassemblées par l'Observatoire des inégalités.

 

Une grande différence entre cadres et ouvriers 

 

« C’est sans doute dans le travail que les inégalités environnementales sont les plus grandes », peut-on d’abord lire dans le rapport. 65 % des ouvriers déclarent respirer des fumées ou des poussières dans leur travail, contre 25 % des employés et 9 % des cadres, selon des données datant de 2019. La part d’ouvriers concernés a augmenté depuis 2005, alors que celle des cadres a diminué. 

De même, 50 % des ouvriers sont en contact avec des produits dangereux sur leur lieu de travail, contre 29 % des employés et 12 % des cadres. Les hommes sont 1,5 fois plus souvent concernés que les femmes. En règle générale, 30 % des salariés sont en contact avec des produits nocifs ou des fumées et des poussières sur leur lieu de travail.  

Le constat est similaire pour le bruit : 32 % des ouvriers déclarent subir des nuisances sonores au travail, contre 11 % des employés et 6 % des cadres. « L’écart est très grand dans ce domaine entre l’univers des bureaux et l’environnement hostile subi par une grande majorité des ouvriers », pointent les auteurs.  

 

Une exposition variable aux pollutions  

 

Ces inégalités s’observent aussi dans la vie personnelle : 25 % du cinquième de la population le plus pauvre déclare que son logement est trop bruyant, contre 12 % du cinquième de la population le plus riche. Les plus modestes sont trois fois plus nombreux que les plus riches à estimer vivre dans un logement humide. Ils disent souffrir davantage du froid en hiver et de la chaleur en été, notamment en raison de leur capacité à payer les factures et de la qualité de leur logement. Les inégalités s’aggravent dans le temps : le confort des logements chez les plus aisés s’améliore plus rapidement que chez les plus modestes.  

L’impact des conditions de logement diffère aussi selon l’âge, l’activité professionnelle et les territoires. Par exemple, les jeunes vivent plus fréquemment en ville et dans des logements exigus, les employés de bureau et cadres bénéficient du chauffage au travail.  

En matière de pollutions de l’air et des sols, l’exposition dépend des polluants et des territoires. « Des communes très riches et des communes très pauvres sont soumises au cumul de fortes pollutions », indiquent par exemple les auteurs. Les zones plus denses et urbanisées sont davantage concernées.  

 

La vulnérabilité aux inégalités environnementales, un point clé 

 

Mais pour décrire les inégalités environnementales, la prise en compte de l’exposition ne suffit pas, affirment les auteurs du rapport. « Il faut distinguer ce qui relève de l’inégalité d’exposition (...) de l’inégalité face aux conséquences de cette exposition », écrivent-ils. « Habiter au bord d’une route et bénéficier ou non d’un double ou triple vitrage, cela change beaucoup », illustrent-ils.  

Par exemple, les bébés nés dans des familles favorisées respirent un air de moins bonne qualité, parce qu’ils vivent plus souvent dans les grandes métropoles, d’après des données du ministère de la Santé. Pourtant, ils sont moins fréquemment hospitalisés que les enfants de familles modestes pour des pathologies respiratoires. Un enfant né dans une famille faisant partie des 10 % les plus riches respire 0,88 microgramme de plus par mètre cube de particules fines par rapport à la moyenne, contre 0,44 microgramme de plus pour un enfant né dans une famille faisant partie des 10 % les plus pauvres. Pourtant, 5 % des enfants de moins de 2 ans ont été hospitalisés pour une bronchiolite parmi les plus modestes, contre 2,4 % parmi les plus aisés. « Chez les jeunes enfants, les victimes d’inégalités en matière de pollution de l’air sont d’abord ceux qui vivent dans les familles aisées », expliquent les auteurs. « En revanche, les plus modestes sont davantage vulnérables à la pollution en termes de maladies respiratoires », du fait d’inégalités sociales, résument-ils.  

De fait, les catégories les plus favorisées « ont souvent les moyens de réduire les conséquences des inégalités environnementales » continuent les auteurs. Autrement dit, « les inégalités environnementales sont d’abord des inégalités sociales », résume Anne Brunner.  

 

Une responsabilité différenciée dans le changement climatique 

 

Dernier point : l’impact sur le climat est différent selon le niveau de vie. Les plus aisés émettent 2,7 fois plus de gaz à effet de serre que les plus modestes. Cela s’explique par plusieurs facteurs : la taille du logement à chauffer ou l’usage de la voiture et de l’avion, par exemple.  

Cependant, il arrive que les catégories sociales les plus défavorisées vivent dans des logements moins bien isolés ou disposent de véhicules plus énergivores. « Les politiques environnementales doivent tenir compte de leur impact sur les conditions de vie des plus modestes », conclut l’Observatoire des inégalités. 

 


À lire aussi : « Il faut prendre en compte l’inégale répartition des coûts de la transition écologique entre les citoyens » (Théodore Tallent, chercheur) 


 

Des inégalités persistantes

Le rapport porte quelques bonnes nouvelles : le taux d’échec scolaire, les écarts de salaire entre les femmes et les hommes ou la part de personnes se déclarant « un peu » ou « plutôt » racistes, par exemple, diminuent au fil du temps.

En matière de revenus cependant, « les écarts restent très importants », alerte Anne Brunner. 8 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté fixé par l’observatoire, avec moins de 1 014 euros par mois après redistribution. Cela correspond à cinq millions de personnes. Cette part a augmenté de 1,5 point depuis 2002. L’origine sociale est le « premier déterminant » du niveau de vie, note encore Anne Brunner. Le niveau de vie médian s’élève à 2 028 euros. Le 1 % le plus riche gagne 7 500 euros par mois après impôt et redistribution.

Huit millions de personnes sont en situation de « mal emploi », c’est-à-dire qu’elles sont sans emploi alors qu’elles désirent travailler ou en emploi précaire. Le chômage touche davantage les ouvriers peu qualifiés, les immigrés et les personnes en situation de handicap.

« Notre pays est l’un des plus inégalitaires dans le domaine de l’éducation », affirme par ailleurs la directrice de l’Observatoire des inégalités, insistant sur les meilleurs niveaux scolaires des enfants de parents diplômés. 73 % des enfants nés dans des familles de cadres supérieurs ou de professions intermédiaires ont accès à l’enseignement supérieur, contre 41 % des enfants d’ouvriers ou d’employés.

 

Célia Szymczak 

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