Le nouveau « Traité sur la haute mer » vise à protéger 30 % des océans d'ici 2030
Après 20 ans de pourparlers, les délégués de la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale (BBNJ) viennent de s’engager, devant l’ONU, ce samedi 4 mars, à la protection de 30 % des océans du monde afin « d’assurer la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique marine dans les eaux internationales ». Les ONG saluent un engagement historique pour les océans, malgré quelques lacunes.
Une victoire jugée « historique »
« Cette action est une victoire pour le multilatéralisme et pour les efforts mondiaux visant à contrer les tendances destructrices auxquelles sont confrontées la santé des océans, maintenant et pour les générations à venir », a déclaré António Guterres, secrétaire général des Nations unies dans un communiqué publié samedi soir, quelques heures seulement après la conclusion de l'accord à l'ONU à New York, après deux semaines intenses de négociations.
Le secrétaire général a félicité les pays membres de l'ONU d’avoir finalisé un texte « décisif » visant à « assurer la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique marine dans les eaux internationales ». En effet, António Guterres a précisé que le traité était « crucial pour faire face à la triple crise planétaire du changement climatique, de la perte de biodiversité et de la pollution », peut-on lire sur le site des Nations unies.
La création d’aires marines protégées entérinée
De quoi s’agit-il exactement ? Le traité vient entériner l'objectif du « 30 pour 30 » qui vise à protéger au moins 30 % des océans de la planète d'ici à 2030 en les plaçant dans des zones protégées. En effet, ces zones de la mer sont situées en dehors des zones de souveraineté et des zones économiques exclusives des États côtiers, ne relevant d’aucune juridiction nationale, et aussi plus connues sous l’intitulé « haute mer » ou « eaux internationales ». Rappelons que la haute mer représente près de 60 % de la surface des océans et près de la moitié de la surface du globe. Jusqu’à présent, ces zones de haute mer ne disposaient d'aucune protection spécifique.
L’accord de ce nouveau traité fait suite aux enjeux du Programme de développement durable à horizon 2030 sur les océans et au Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal issu de la COP15.
Les objectifs du traité sont :
- la définition d'un cadre réglementaire ;
- la reconnaissance d'un patrimoine commun de l'humanité ;
- l'internationalisation des décisions sur les études d'impact environnemental ;
- le partage juste et équitable des avantages découlant des ressources génétiques marines ;
- la création d'aires protégées marines afin de préserver, restaurer et maintenir la biodiversité ;
- la production de connaissances, d'innovations techniques et d'une compréhension scientifique.
Les ONG plutôt satisfaites malgré des lacunes
Pour Greenpeace France, qui a salué le soir même le fait qu’un accord ait été trouvé, il persiste encore des « problèmes majeurs ». L’association a fait valoir qu’il s’agissait d’un traité viable, véritable point de départ pour la protection de 30 % des océans de la planète, mais que le texte devra passer « par une révision technique et une traduction, avant d’être officiellement adopté lors d’une autre session ». La principale question qui subsiste concerne la mise en pratique du traité par les gouvernements et notamment le principe du partage des bénéfices des ressources marines génétiques collectées en haute mer.
Pour Laura Meller, chargée de la campagne océans pour Greenpeace Nordic, « C’est un jour historique pour la conservation des océans et le signe que dans un monde divisé, la protection de la nature et des personnes peut triompher de la géopolitique », a-t-elle souligné depuis New York.
Pour le WWF, « Le traité sur la haute mer permettra un type de surveillance et d'intégration dont nous avons besoin si nous voulons que l'océan continue à fournir les avantages sociaux, économiques et environnementaux dont l'humanité jouit actuellement », a déclaré Jessica Battle, experte en politique et gouvernance des océans, qui a dirigé l'équipe du WWF lors des négociations.
Le WWF précise que les activités en haute mer vont être soumises « à des évaluations d'impact environnemental proportionnelles à l'ampleur des conséquences ». Des évaluations primordiales pour les futures activités, « dont les impacts sont actuellement très mal connus, comme l'exploitation minière des fonds marins ainsi que le captage et le stockage du carbone en eaux profondes. »
Autre attente forte de l’association, un organe scientifique et technique doit être créé pour jouer un rôle déterminant en garantissant que « les plans de gestion des aires marines protégées soient évalués de manière rigoureuse ». Il permettra à la communauté internationale d'accéder plus facilement aux rapports d'évaluation de l'impact environnemental réalisé.
Christina Diego